Le principe de répartition du pouvoir est la séparation des différentes fonctions de l’État, qui sont confiées à des composantes distinctes de ce dernier. On pense que la confusion des pouvoirs conduit au despotisme, tandis que leur séparation conduit à la liberté : c’est un principe libéral. L’objectif assigné à cette théorie est d’aboutir à l’équilibre des différents pouvoirs, pour promouvoir une meilleure gouvernance démocratique.
Dans les définitions du dictionnaire politique, la séparation des pouvoirs est un principe, une théorie, qui préconise que les trois grandes fonctions de l’Etat soient chacune exercée par un organe ou une instance différente. On retient le plus souvent la classification de Montesquieu dans L’Esprit des Lois : le pouvoir législatif, confié à un Parlement, l’exécutif à un gouvernement, à la tête duquel se trouve un chef d’État et/ou de gouvernement, le pouvoir judiciaire confié aux juges.
Le pouvoir exécutif s’occupe de la gestion gouvernementale, c’est-à-dire de toutes les actions de l’Etat et de tout ce qui est l’émanation de ses structures. Le pouvoir législatif contrôle l’action gouvernementale d’abord, et vérifie si les lois sont bien élaborées. Il est constitué par les élus du peuple qui doivent assumer ce rôle. Le pouvoir judiciaire est un juge extérieur entre ceux qui doivent exécuter et ceux qui doivent contrôler, conformément à la loi.
Le contrôle que chacun des trois pouvoirs exerce sur les autres est censé préserver le citoyen des atteintes à ses droits fondamentaux. La séparation des pouvoirs est appliquée dans la plupart des États démocratiques modernes. Elle est plus ou moins souple car une trop stricte séparation des différents pouvoirs peut conduire à la paralysie des institutions. De ce fait, de nombreuses constitutions privilégient le principe de la collaboration des différents pouvoirs en leur attribuant des moyens d’action les uns sur les autres. Cependant, dans la pratique, le pouvoir exécutif va souvent au-delà de son rôle en s’assurant la mainmise sur les autres pouvoirs (nomination des juges, possibilité de légiférer).
Quid du Burundi ?
Selon l’historien Melchior Mukuri, c’est en 1982 que la constitution burundaise a clarifié la séparation de pouvoir au Burundi, renforcée par l’Accord d’Arusha en 2000. Ce point était primordial car, selon les différents observateurs, les éléments déclencheurs des crises burundaises étaient en général la mauvaise gouvernance et la mauvaise séparation des pouvoirs.
Pour Jean Baptiste Manwangari, ancien député, dans la pratique politique, il y a des cas où l’exécutif a tendance à empiéter sur le législatif, mais la problématique la plus fondamentale au Burundi, est la séparation de l’exécutif du judiciaire. Sinon, il indique qu’aujourd’hui les présidents des deux chambres du parlement ont une visibilité institutionnelle et protocolaire indéniable.
Le constitutionnaliste Pascal Rwankara souligne que, dans la structure actuelle au Burundi, le corps de l’exécutif n’est pas uniforme. Il y a d’abord le Président, deux vice-présidents et le Gouvernement : « Le Président de la République est en même temps chef de l’exécutif et chef de gouvernement, même s’il n’en fait pas partie. Il est aussi le Magistrat Suprême du pays. » Le constitutionnaliste indique que le législatif est contrôlé par les deux chambres du Parlement, l’Assemblée Nationale et le Sénat. Il souligne que le Président de la République peut les dissoudre, mais les deux chambres peuvent également le soumettre à la motion de censure. Quant au pouvoir judiciaire, poursuit-il, il est constitué par tous les organes qui interviennent dans les contentieux éventuels. Cette séparation vise à éviter l’abus d’un pouvoir sur l’autre. La séparation des pouvoirs existe et est claire dans la Constitution ; mais le risque est qu’elle peut être mal interprétée.
« Il faut une séparation effective ! »
« Les trois pouvoirs ne sont pas suffisamment séparés », estime David Rurama, de Musaga. En effet, comme le précise-t-il, l’exécutif influence parfois les juges dans le traitement des dossiers, et les juges ont tendance à satisfaire celui qui les a nommés. Quant au législatif, bien que les députés soient censés défendre les intérêts du peuple qui les a élus, ils agissent en fonction des désirs de leur parti d’origine, indique M.Rurama.
Aimé Parfait Nkurunziza, de Kanyosha, reconnaît lui aussi l’existence de ces trois pouvoirs au Burundi. Mais il remarque que le gouvernement prend des décisions dans la précipitation sans demander l’avis des élus du peuple.
Les personnes interrogées en Commune Bwiza partagent les mêmes avis. Elles souhaitent que chacun des trois pouvoirs respecte l’indépendance de l’autre pour assurer une séparation effective des trois pouvoirs.