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La Représentante de la Banque Mondiale, à la fin de son mandat : « Il y a des problèmes, mais l’avenir est prometteur »

05/05/2013 Commentaires fermés sur La Représentante de la Banque Mondiale, à la fin de son mandat : « Il y a des problèmes, mais l’avenir est prometteur »

Mme Mercy Tembon, la Représentante résidente de la Banque Mondiale, est arrivée au Burundi en 2008. Au cours des 4 dernières années, elle a été à la fois témoin et actrice du développement économique du Burundi. Iwacu s’est entretenu avec elle.

<doc5045|left>{Vous avez vécu quatre ans au Burundi, quels sont les souvenirs que vous en gardez?}

Je garde de bons souvenirs du Burundi, un pays qui s’est beaucoup développé en un peu de temps et sur tous les plans. Politiquement, en 2008, quand je venais d’arriver, le FNL était un groupe rebelle. A la fin de la même année, il a signé l’accord de cessez-le-feu. On a démobilisé les ex-combattants de ce mouvement et il est devenu un parti politique. Sur le plan économique, la croissance économique a connu une tendance positive, même si la vitesse n’a pas été accélérée comme on aurait pu le souhaiter. Malheureusement, le Burundi a été frappé par la crise économique mondiale et le taux de croissance a ralenti. Actuellement, on est à 4,2% mais la tendance a été positive. Sur le plan social, les gens participent aux discussions sur le développement de leur pays. Les indicateurs de mortalité maternelle et infantile ont baissé. Nous avons beaucoup de points d’eau, de centres de santé et d’écoles. Les changements ont eu lieu aussi à l’intérieur du pays comme par exemple à Ngozi et Gitega où les maisons et hôtels ont poussé comme des champignons.

{Mais les investisseurs hésitent à venir à cause des problèmes d’accès à l’eau et à l’électricité. Quel est votre commentaire ?}

Le Burundi est un petit pays, enclavé, qui sort d’une longue crise. Personne ne peut changer ces trois choses. Un des grands défis pour le Burundi est le manque d’infrastructures et en particulier l’énergie. Le pays n’était pas stable pour que les investisseurs viennent. Il y a des potentialités non encore exploitées. Le Burundi a beaucoup d’eau et est parmi les 10 pays du monde qui ont beaucoup de nickel. Il faut un environnement propice pour que les investisseurs viennent. Pour le moment, le Burundi est prêt à les accueillir. Il a fait des réformes dans la gestion des finances publiques, dans les lois qui protègent les investisseurs, dans la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption. L’Office Burundais des Revenus a été créé. Le Burundi a réussi à mettre en place les réformes de 1ère génération qui sont les réformes de la fondation. C’est alors le moment de bâtir.

{Et pourtant on construit des stades au lieu des barrages hydroélectriques …}

Le Burundi dispose de 38 mégawatts pour 8 millions d’habitants. Dans notre projet multisectoriel, nous avons mis 65 millions pour préparer le terrain. Parmi les activités, nous avons réalisé les études de faisabilité en matière d’hydro énergie et nous avons fourni des centrales thermiques qui ont augmenté la production de l’énergie. Les études de faisabilité préparent le gouvernement à solliciter le financement des investisseurs. Les études étaient un préalable. On a catégorisé dix sites qui peuvent produire 20, 30 ou 5 mégawatts. Pour le moment, il y a des discussions autour des barrages à Jiji et à Murembwe qui vont produire 50 mégawatts. Cela a commencé. L’Union européenne et la Banque Mondiale vont mettre de l’argent. Il y a aussi le barrage de Mpanda et d’autres encore en préparation. D’ici 3 à 4 ans, tout va complètement changer. Cela va alors attirer les investisseurs.

{Selon différents rapports, le Burundi accuse une certaine lenteur dans l’intégration de la Communauté Est Africaine. Peut-on dire qu’il s’est précipité ?}

Le Burundi a pris une bonne décision d’entrer dans cette communauté. Les possibilités du Burundi et de son peuple sont limitées à cause de sa taille et de sa position géographique. Mais, s’il fait partie de la grande communauté, le marché devient grand parce qu’il a accès à ces pays. Cela ouvre les frontières du Burundi et il va gagner beaucoup de choses. Même les Burundais vont changer de mentalité parce que les esprits vont s’ouvrir. Il y a par exemple des banques kenyanes et tanzaniennes qui commencent à s’installer au Burundi. Il est vrai que le Burundi accuse une lenteur, mais les gens vont voir les avantages de cette intégration. Les Burundais ne parlaient pas anglais mais pour le moment ils commencent à s’intéresser à cette langue.

{Même si vous constatez que l’espoir est permis, tous les bailleurs de fond n’ont pas débloqué l’enveloppe promise au Burundi ces deux dernières années. Que peut-il faire pour mériter la confiance lors de la prochaine conférence de Genève ?}

C’est vrai que les dernières années ont été très difficiles, mais c’est pour le monde entier à cause de la crise économique mondiale. Si les aides ne sont pas venues, cela ne veut pas dire que le Burundi est mauvais. On ne peut pas donner à quelqu’un d’autre quand on n’a pas suffisamment à manger chez soi. Cette situation conduit à chercher les alternatives. La 1ère est de générer les ressources soi-même. Une des choses pour générer les ressources à l’interne, si les ressources extérieures commencent à baisser, il faut que les recettes intérieures commencent à monter pour avoir l’équilibre. La 2ème chose est la bonne gouvernance pour gérer le peu que l’on a. La 3ème chose, il y a beaucoup de ressources naturelles non exploitées. A la conférence de Genève, c’est le moment propice pour le Burundi de présenter le bilan de ce qu’il a pu faire pendant ces années, de présenter les perspectives et les ressources non exploitées pour que les investisseurs soient intéressés. Mais les défis sont énormes aussi. Si on a une vision positive, ça demande l’appui de tout le monde. L’appui des burundais, du gouvernement, de la société civile, du secteur privé et des partenaires internationaux. Car, le Burundi est comme un enfant. Il est né, il est en train de marcher à quatre pattes, il n’est pas encore atteint le stade d’être indépendant, il a donc besoin d’appuis pour aller un peu plus loin. La Banque Mondiale a été présente au Burundi, même pendant le temps de la crise, et on va rester avec le Burundi jusqu’à ce qu’il arrive au bout.

{Et la société civile actuellement considérée comme un opposant au régime, qu’en dites-vous ?}

La société civile et les médias, c’est très important pour la santé du pays. Et moi, j’ai trouvé qu’il y a beaucoup d’analyses qui sont faites par eux, ce qui est une bonne chose. On ne peut pas être du même avis, mais on peut ne pas être d’accord ou pas à condition que ça ne dégénère pas en quelque chose de mauvais. Donc, ça demande beaucoup de formation et d’éducation pour être capable de prendre le bon de ce quelqu’un a dit et de laisser le reste. Et ça va venir. La société civile, le secteur privé et les médias doivent avoir un seul objectif : le développement de ce pays, la paix, le bien être de tout le monde. De notre côté, il faut prendre du recul. Dans les pays développés, les partis aux pouvoirs font ce que l’opposition dit. Ils changent en fonction de ce qu’ils entendent.

{Les jeunes générations qui sortent de l’Université, que peuvent-elles espérer ?}

Mon message, c’est de ne pas désespérer. C’est de prendre leur avenir en main, de ne pas attendre qu’on leur donne tout. Mais, il faut qu’ils soient innovateurs. Qu’ils utilisent ce qu’ils ont appris. Il ne faut pas attendre le gouvernement car il n’a rien à donner. Les jobs sont créés par les gens eux-mêmes, le secteur privé. Quand les gens, surtout les jeunes ont cet esprit de développer leurs propres affaires, il y a de l’espoir.

{Par rapport aux missions de la Banque Mondiale et pour votre mandat, de quoi pouvez-vous être fière ?}

Je suis fière du progrès que le Burundi a fait sur le plan des infrastructures. Je peux citer notre projet PTPCE qui a créé beaucoup d’emplois avec le pavage des routes. Et ça a amélioré la vie urbaine. Nous avons aussi construit les hôpitaux, les marchés, les écoles, qui ont amélioré la vie de la population. Autre chose que nous avons fait, c’est l’aide dans la démobilisation des ex-combattants. Nous avons aussi soutenu la politique de relance de la production agricole en octroyant des semences, etc. Sur le plan économique, nous avons travaillé dans la bonne gouvernance, dans la gestion des finances publiques avec l’établissement de l’OBR (Office Burundais des Recettes), dans la mise en œuvre de la stratégie de la bonne gouvernance, y compris la privatisation du secteur café qui a fait hausser les revenus des producteurs. La question genre n’a pas été oubliée car nous avons encouragé les femmes à travers notre projet d’appuis à la micro finance et à l’accès au capital pour les femmes, comme nous l’avons fait pour la micro finance « Wise».

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