Cinquante années après notre indépendance, les relations et les correspondances entre l’ancienne métropole et notre pays restent vivaces et parfois sous des aspects inédits.
Par exemple, ce qui fut retenu dans l’histoire de la Belgique sous l’appellation de « La Question Royale » a marqué profondément le paysage politique. Libéré en Allemagne à la fin de la seconde guerre mondiale par l’armée américaine, le roi Léopold III est rentré en Belgique. Pour avoir adopté une attitude neutraliste face à l’occupation nazie, sa venue a suscité des émeutes dans le pays au point qu’il y eut même des actes de sabotage comme durant la résistance. Plus que jamais, le peuple belge fut divisé : les Flamands étant majoritairement favorables à son retour (72,2 %) et les Wallons (58%) farouchement opposés à la chose. Ce fut finalement par l’abdication de Léopold III en faveur du jeune Baudouin 1er que la paix et la cohésion nationale furent retrouvées.
L’ironie veut que « notre » question royale soit aujourd’hui ravivée par nos amis les Belges et, cette fois-ci comme chez eux il y a une soixantaine d’années, pour contribuer à la concorde nationale.
Il y a d’abord eu la publication du li[vre du journaliste Guy Poppe->http://www.iwacu-burundi.org/spip.php?article2476] sur la vie politique du prince Louis Rwagasore. Ce remarquable ouvrage lève le voile sur une série de réalités longtemps tues ou cachées. Nul ne doute que ce premier débroussaillage d’une histoire sombre et tragique contribuera à faire connaître qui était vraiment notre héros de l’indépendance, qui furent ses compagnons politiques, son action, ses adversaires et surtout ses meurtriers véritables…
De son côté, le film [« Rwagasore »->http://www.rwagasore.com/francais/index.html] produit par l’ong belge La Benevolencia donne la parole aux témoins de cette époque et contribue, lui aussi, à faire en sorte que la mythologie cède le pas à l’histoire pour le bien de la raison et de la paix des cœurs. Aujourd’hui, nous commençons à en savoir davantage et cela nous fait à la fois du bien et nous titille aussi pour aller plus loin, plus profondément dans la quête de la vérité.
Enfin, le dernier court-métrage sur [la recherche éperdue de la dépouille du roi Ntare V->www.iwacu-burundi.org/spip.php?article2452] par la télévision flamande (VRT) vient compléter le triptyque.
La « Question Royale » au Burundi aussi a déchiré le tissu national. L’assassinat du prince Rwagasore (1961) est l’acte fondateur de notre descente aux enfers politiques. L’attentat contre le palais royal sous Mwambutsa IV (1965) a sonné le glas d’une vielle monarchie multiséculaire et remarquable pour ses valeurs humaines et sa bonne gouvernance. L’assassinat de Ntare (1972), quant à lui, semble rappeler que nos rois ont toujours mêlé intimement leur destin à celui du peuple Murundi comme nous l’a si bien rappelé le Dr Pie Masumbuko lors de la première du film sur le roi immolé. Ntare V demeure jusqu’aujourd’hui dans une des innombrables fosses communes où gisent des millions de citoyens burundais fauchés par l’esprit de haine, de gourmandise insatiable et de division.
Mais comme en Belgique, au Burundi la « Question Royale » peut en fin de compte nous réunir, nous réconcilier et apaiser nos esprits. Et cet effort de fraternité retrouvée à travers nos traditions ancestrales, nous le devons beaucoup à l’ambassadeur Jozef Smets qui a été un des plus grands, sans doute le plus attentionné et le plus amical des ambassadeurs belges que nous avons connus au Burundi. C’est grâce à lui que la plupart de ces initiatives ont vu le jour. C’est grâce à lui que certaines victimes des affres de notre histoire ont eu l’opportunité de nous rappeler que quoiqu’il advienne « Nous Sommes UN » !