Sur base de la peur de l’autre groupe, des gens peuvent être manipulés et commettre l’irréparable. Comment les manipulateurs y arrivent-ils ? Le socio-anthropologue Blaise Izerimana explique ce phénomène. Il propose plutôt la cohabitation pacifique.
Chaque groupe dispose d’un répertoire propre de représentations qui servent de symboles du mal, du diabolique, de la brutalité ou de la méchanceté.
Cette dynamique met bien en évidence que la peur est articulée à des systèmes de représentations produits autour d’un enjeu défensif d’ordre identitaire et vital.
Ainsi, explique le socio-anthropologue Blaise Izerimana, certains individus essaient de convaincre les autres qu’un groupe social donné est une menace à leur endroit.
D’après lui, cette manipulation peut favoriser la transmission des messages de haine. Un groupe est diabolisé comme constituant une menace. «C’est eux qu’il faut écarter car si on ne les écarte pas ils vont nous faire du mal. Vous comprenez que ce sont des messages de haine qui sont distillés avec les conséquences néfastes».
Le manipulateur, dit-il, ne s’adresse pas directement à tout le monde. Il a des leaders à qui il va faire le message et ces derniers servent de relais pour que son message arrive au destinataire de façon efficace.
« Ils ont des stratégies pour pouvoir manipuler le plus grand nombre de gens ». Et d’ajouter que le profil de cibles recherchées est des membres du groupe qui sont moins critiques, disposés à le transmettre aux autres membres du groupe.
Pour Blaise Izerimana, les conséquences que l’éveil de la peur a sur les rapports intergroupes et sur l’acceptation des groupes sont fâcheuses. Elles sont marquées par une différence nationale, ethnique, raciale, religieuse ou sexuelle. « Si on vous dit que ces gens représentent une menace pour vous, en tant qu’humain, vous éprouvez la peur de vos voisins même si vous ne connaissez pas les raisons exactes. Cela crée la méfiance. Et enfin, les tueries et les violences de masse s’ensuivent».
Le socio-anthropologue rappelle néanmoins que les gens ciblés par la manipulation par cette peur réagissent de façon différente. D’une part, explique-t-il, certains acceptent et le prennent à la lettre et ceux qui hésitent.
D’autre part, d’autres refusent de cautionner ces agissement, car pour eux, il n’est pas question de propager la haine. « Ceux qui adoptent cette voie de la réconciliation peuvent avoir des problèmes vis à vis des autres. Ils sont considérés comme des traîtres. Pour dire qu’il faut écarter un autre membre du groupe. Qu’il est ennemi de plus qu’un membre d’autre groupe», relève-t-il.
Blaise Izere fait savoir qu’il est difficile de résister à la manipulation car l’on ne sait pas que l’on est manipulé. « Pour résister à l’emprise de la manipulation, il faut privilégier le social, le collectif ». Il sous-entend la cohésion sociale pour bâtir une société juste et prospère.