Samedi 21 décembre 2024

Société

La loi sur les confessions religieuses : défis et adaptation

La loi sur les confessions religieuses : défis et adaptation
La nouvelle loi sur les confessions religieuses au Burundi entrera en vigueur le 16 septembre

À partir du 16 septembre, la loi régissant le cadre des confessions religieuses entrera en vigueur. Cette loi impose, entre autres, le niveau du baccalauréat pour les dirigeants, la gestion des financements des Églises ainsi que la distanciation entre les lieux de culte. Les responsables religieux jugent cette loi contraignante. Le projet de loi sur les confessions religieuses a été adopté en septembre 2022 ; une durée de deux ans a été accordée aux responsables des confessions religieuses pour se conformer aux nouvelles règles. Une vérification de conformité par le ministère de l’Intérieur débutera le 16 septembre 2024.

D’après l’article 46 de cette même loi, une distanciation entre deux lieux de culte est exigée : au moins 500 m en milieu urbain et 1 km en milieu rural. Ce qui n’est pas respecté dans certains endroits de la capitale, Bujumbura. Par exemple, sur l’avenue de la Jeunesse, tout près du marché de Jabe, se trouvent trois églises très rapprochées. Elles se succèdent à moins de 100 m. L’Église Christ Generation City, Bethany Holy Church et La Vie Sauve de Golgotha en sont des exemples. Sur la même avenue, l’Église Vivante de Jésus de Jabe est à moins de 200 m de l’Église Israël Pentecôte Church, située sur le boulevard du Peuple Murundi. De l’autre côté de cette dernière église, à moins de 400 m, se trouve l’Église Pentecôte de Bujumbura en parallèle avec une autre nommée « Ishengero ryo kwihana no kuruhukira muri Yesu Kristo », située à moins de 300 m tout au bout de l’avenue de l’Imprimerie.

Les dirigeants des confessions religieuses estiment que les deux ans accordés pour se conformer à la nouvelle loi sont insuffisants. Prosper Bigirimana, pasteur de l’Église Beloved Church, précise : « Les églises n’ont pas les mêmes moyens. Il est possible que certaines soient actuellement en règle avec la loi, mais la majorité des Églises ne sont pas encore conformes aux exigences de l’État. Cela demande plus de moyens, comme par exemple les moyens d’avoir un endroit propre de culte ». Selon M. Bigirimana, l’État burundais pourra leur accorder une période supplémentaire pour se conformer à ces règles. Deux ans ne sont pas suffisants. « Pour ma part, je m’efforce de me conformer à cette loi, mais j’ai encore quelques difficultés liées à la construction d’un édifice selon les nouvelles exigences. On attend ce que Dieu va faire, mais on espère que ça va bien se passer, car notre gouvernement a aussi mis Dieu en avant ».

Concernant le niveau du baccalauréat exigé par cette loi, il affirme que le diplôme n’a rien à voir avec la vocation de Dieu. « La vocation de Dieu ne dépend pas des études. Dieu a sa propre manière de choisir celui qu’il veut sans toutefois se concentrer sur son niveau d’études », déclare-t-il. Un pasteur de Kamenge critique cette modification de la loi et affirme que même en deux ans, ceux qui voudraient faire leurs études n’auraient pas atteint le niveau du baccalauréat. « Ce n’est pas parce qu’un individu n’est pas bachelier qu’il ne peut pas diriger une Église. Depuis 2022, lorsque le Conseil des ministres a modifié cette loi qui existait depuis 2014, est-ce que ceux qui n’avaient même pas le diplôme des humanités ont réussi à obtenir le baccalauréat en deux ans ? » a-t-il demandé.

Le révérend Sylvestre Bizimana, secrétaire général du Conseil national des Églises du Burundi (CNEB), a affirmé que les églises membres sont prêtes à se conformer à cette loi. Selon Bizimana, la question de la qualification des dirigeants religieux ne constitue pas un obstacle majeur. « Les leaders des Églises membres du CNEB remplissaient déjà les conditions liées au diplôme avant cette loi, donc nous n’avons pas de défi à ce sujet, » a-t-il expliqué, soulignant que cette exigence n’aura pas d’impact significatif sur leurs membres.

Concernant l’exigence des accords-cadres avec le gouvernement pour les églises affiliées à des églises-mères étrangères, Bizimana a indiqué que plusieurs églises avaient déjà soumis leurs dossiers. Toutefois, il a pointé du doigt la lenteur administrative du ministère concerné : « Les Églises qui sont prêtes pour l’accord-cadre ont déjà déposé leurs dossiers. Le défi est lié seulement à une lenteur administrative de la part du ministère. »

En ce qui concerne la gestion des fonds étrangers, il n’y a pas de grand changement, selon lui. « Avant la venue de cette loi, l’argent passait par la BRB ; il n’y a rien de nouveau, sauf un rapport qui sera établi et présenté au ministère. Et nous pensons que cette loi ne nous prive pas de notre indépendance. » Sur la question des mandats limités à cinq ans, le Révérend Bizimana a affirmé qu’aucune résistance notable n’avait été enregistrée au sein des confessions religieuses. « Non, il n’y a eu aucune résistance au sujet des mandats limités à cinq ans, car la plupart des confessions avaient déjà des mandats de quatre à cinq ans. »

Quant aux défis, Sylvestre Bizimana souligne deux questions majeures liées à la mise en œuvre de la nouvelle loi religieuse. Le premier concerne la distanciation entre les églises : « Comme la loi n’est pas rétroactive, une enquête doit être menée pour déterminer la position des églises avant l’adoption de la loi, sinon des conflits pourraient émerger ». Le second défi concerne la conformité des temples en construction, où Bizimana attribue les retards à la lenteur des services publics dans la délivrance des permis.

Rappelons également que l’article 41 de cette même loi exige qu’une confession, une organisation ou un mouvement religieux bénéficiaire de dons ou de legs de toute nature en provenance de l’étranger en fasse une déclaration au ministère ayant les confessions religieuses dans ses attributions.

Par Aristide Niyonkuru, Alexandrine Ndayishimiye et Jules Bercy Igiraneza

 

Forum des lecteurs d'Iwacu

1 réaction
  1. Mafero

    Parlant des qualifications, je connais un administrateur qui a dirige, dans ce 21eme siecle, une commune ( dans le Buhumuza actuel je crois) mais qui n’avait meme pas le niveau 6eme Primaire. Aussi, je ne sais pas si parmi nos législateurs actuels il n y’a pas des cas similaires. Au Burundi, on ne pense jamais aux antecedents quand on élabore des lois!

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