Effondrement des maisons, destruction des routes… Des dégâts causés par la rivière Kanyosha sur son passage. Les riverains sont déboussolés.
« Nous ne savons plus à quel saint nous vouer », lâche Adélaïde, une habitante de Kanyosha, à proximité de la rivière Kanyosha. De part et d’autre du pont séparant Musaga et Kanyosha, à la 12ème avenue, cette rivière ne cesse de causer des ravages.
Certaines maisons sont déjà amputées d’une ou deux chambres tandis que d’autres se sont entièrement effondrées. « Ici, il y avait deux maisons. Elles se sont écroulées, suite à l’élargissement de ses berges.»
D’autres habitations chèrement acquises sont sur le point de s’écrouler. « Mis à part le coût de la parcelle, ma maison tourne autour de 80 millions BIF. C’était en 2008. Si rien n’est fait pour limiter l’élargissement de cette rivière, elle sera inévitablement la prochaine à s’effondrer», déplore un propriétaire d’une maison sur l’avenue Rwihinda. Elle se trouve à moins de 2m du danger.
Si ma maison s’effondre, souligne ce pensionné, cela marquera le début d’un calvaire pour ma famille. « Je n’ai fait aucun autre investissement. Je n’ai plus la force pour travailler. S’il advient que ma maison s’écroule, mes enfants vont se retrouver dans la rue ».
L’Etat enregistre également des pertes. Deux poteaux de la Regideso déjà tombés, une partie de l’avenue Rwihinda devenue impraticable et le pont sur la 12ème avenue sur le point de s’effondrer. Pour lui, si les maisons ne sont pas protégées, même ces infrastructures publiques ne vont pas tenir. « Je ne pense pas qu’il lui sera facile de trouver de l’argent pour ériger un autre pont ». I.B., un autre riverain, accuse le gouvernement de ne pas avoir tenu promesse. « Il nous avait promis d’ériger des gabions pour limiter l’élargissement du lit de la rivière Kanyosha, en vain. »
Les arbres qui servent de protection des rives de cette rivière tombent l’un après l’autre.
L’homme en est la cause
Les riverains dénoncent l’extraction abusive du moellon comme une des causes de cette situation. « Les extracteurs le font anarchiquement, ce qui rend les rives très fragiles », confie Déogratias, un habitant de Musaga, un autre quartier riverain de la Kanyosha. Il pointe aussi du doigt l’explosion démographique dans les montagnes surplombant Bujumbura. Jean-Marie Sabushimike, professeur à l’Université du Burundi, département de Géographie, abonde dans le même sens : « Dans les montagnes surplombant la ville, la végétation naturelle a complétement disparu. Il ne reste que des pratiques culturales qui ne protègent plus le sol. »
En cas de pluie, les bassins versants des rivières traversant Bujumbura, dont Kanyosha, apportent des sédiments immenses. Ces derniers obstruent le passage des eaux pluviales et des rivières. « Et au bout d’un certain temps, ces eaux finissent par se créer un passage entraînant d’importantes inondations en aval et ravageant tout sur leur passage. » Les rives s’en trouvent fragilisées, et partant des maisons s’effondrent et les lits s’agrandissent. Cet expert évoque aussi des cas d’attribution de parcelles dans des zones à risques.
Pour lui, l’extraction du matériel de construction devrait être contrôlée.
« Nous sommes en train de faire un inventaire de tous les ponts menacés. Après, nous allons rassembler des moyens pour leur réhabilitation », a déclaré Jean-Bosco Ntunzwenimana, ministre des Travaux publics. Et d’ajouter aussitôt : « Nous leur demandons d’être patients. Nous sommes à l’œuvre. » Le ministre promet que dès que l’argent sera disponible, les travaux de stabilisation des rives de la Kanyosha commenceront.