Malgré des réserves importantes de dolomie sur le territoire nationale, les terres arables continuent de subir les effets néfastes de l’acidité du sol. L’ l’International Fertilizer Development Center (IFDC) s’emploie dès maintenant à renforcer et à maintenir la rentabilité alimentaire et la productivité agricole en finançant le projet pilote dolomie dans les provinces qui sont plus menacées de l’acidité.
Dans les communes de Mutaho (Gitega), Ruhororo (Ngozi), Muruta (Kayanza) et Mabayi à Cibitoke, le projet pilote dolomie a fait des merveilles. Les agriculteurs qui ont appliqué la dolomie sous la supervision des partenaires de l’IFDC n’en reviennent pas ; «C’est spectaculaire et du jamais vu », clament-ils. Selon eux, ce serait de l’avarice si quelqu’un qui a suivi à la lettre les conseils et mis en pratique les techniques culturales données par les techniciens agricoles s’il dit que la production est mauvaise.
En témoignent les champs de maïs, pomme de terre, haricots, tomates visités. Sur une seule tige on y trouve deux ou trois épis, les gousses de haricots sont grandes et longues, un seul pied de pomme de terre produit plus de 10 à 15 tubercules. Pour les agriculteurs interviewés, toute cette production résulte de l’utilisation de la dolomie qui manquait dans leurs sols malgré l’utilisation des engrais et différentes techniques culturales.
« Je cultivais comme tout le monde et le rendement était très médiocre. Parfois je me demandais pourquoi continuer de cultiver ce champ alors que je ne gagne rien. A vrai dire je n’étais pas motivé vraiment j’avais envisagé même d’y planter des eucalyptus », indique Rose Ndacayisaba de Nyabisaka à Mutaho. Pour lui et ses voisins, ils avaient tout fait mais rien ne changeait. Quand le projet pilote dolomie a été initié dans son champ, les résultats ne se sont pas fait pas attendre. Depuis le sarclage, ils affirment qu’ils ont constaté qu’il y’a un changement radical dans ces champs.
« Si la pluie était tombée à temps, je ne doute pas que la récolte aurait été très bonne. Mais malgré ça je ne doute pas que la production pourra se multiplier par trois », ajoute- Charles Wakana de Mutaho.
Ces cultivateurs de Mutaho ne sont pas les seuls à s’émerveiller devant ces maïs qui inspirent confiance. Que ce soit à Ruhororo, Muruta ou à Mabayi, tous ceux qui ont pu bénéficier de ce projet pilote de dolomie initié par IFDC indiquent que cette fois-ci ils ne vont pas regretter d’avoir chaulé leurs champs pour diminuer l’acidité du sol avant le semi.
Le chaulage seul ne se suffit pas
D’après les animateurs agricoles de One Acre Fund- TUBURA, TWITEZIMBERE, ADISCO AMR, UCODE qui encadrent les agriculteurs, la dolomie par ses qualités de rendre le sol fertile et moins acide ne peut garantir la productivité du sol si elle est utilisée seule sans tenir compte des autres matières organiques et technique culturales. Par ignorance ou par négligence, certains cultivateurs avaient commencé à s’imaginer que la chaux vient remplacer les composts et autres engrais agricoles.
« Il est difficile de s’attarder devant chez moi pour admirer ma récolte de haricots. Personne ne peut y croire vu que mes champs étaient parmi les plus ingrats de cette colline. Les voisins et les passants n’y croient pas leurs yeux. Tout le monde doit s’arrêter pour admirer ma récolte de haricots car ils n’étaient pas habitués à une telle production Tout le monde me demande comment j’ai fait pour atteindre ces résultats », se félicite Anthère Ndikiminwe de la colline Ruganza à Matongo. Quant à Dieudonné Ndikumana du service technique et suivie évaluation au sein de l’UCODE AMR, la dolomie corrige l’acidité du sol et ne remplace pas les engrais agricoles.
« Ceux qui l’utilisent sans y ajouter les engrais et acheter les semences sélectionnées ne peuvent pas s’attendre à des miracles. Le pH quoique grand ne rend pas nécessairement la terre fertile. Elle est l’un des facteurs qui favorisent la productivité mais elle ne se suffit pas seule », a-t-il expliqué. Selon lui, la chaux décagoulé les sols lourds et très argileux.
On n’a tout intérêt d’utiliser la dolomie en association avec des amendements organiques de type fumier décomposé de manière à créer un équilibre parfait. Le chaulage ne sert pas seulement à rééquilibrer le pH dans le sol c’est aussi extrêmement intéressant si vous avez une terre qui est ingrate.
« Le disperser dans un champ et le doser avec une grande précision c’est -à- dire 100g / m2 et il faut l’enfuir deux semaines avant le semi. Encore plus, il ne faut pas en abuser sur le long terme et jamais en excès et surtout en association avec les intrants organiques », précise Jean-Claude Niyonkuru de Ruhororo à Ngozi.
Et pour l’administration, la bonne récolte est là et sûre mais il reste à bien la gérer. L’essentiel n’est pas de produire beaucoup mais plutôt de songer à préserver cette récolte, ne pas tout mettre sur le marché et retourner acheter ta même production chèrement.
« Les commerçants vous guettent et veulent profiter de votre récolte à moindre frais. Si vous gaspillez vos maïs et haricots vous allez continuer de vivre dans la misère et la famine. Gardez, gérez bien ces stocks et vendez si c’est réellement indispensable », appelle Carême Bizoza gouverneur de Cibitoki.
Le Burundi riche en dolomie mais peu exploitée
D ‘après les études l’International Fertilizer Development Center (IFDC) et l’Institut des Sciences Agronomique du Burundi (ISABU) le Burundi regorge d’important réserves de dolomies. Les gisements dolomitiques sont disponibles au Burundi surtout dans les provinces de Rutana, Cibitoke, Ngozi. Six cents millions de tonnes de dolomie sont disponibles et elle peut être exploitée pendant 100ans.
Pour Dieudonné Ntanago, chef du projet Dolomie à l’IFDC, le diagnostic actuel est alarmant .La problématique d’acidité des sols au Burundi tend à s’accroître à cause de l’érosion et de l’intensification agricole. Tous les plateaux centraux et la crête Congo-Nil sont tellement acides et cette acidité constitue un des facteurs limitant dans la restauration de la fertilité des sols au Burundi.
Il affirme que IFDC a jugé urgent, avec les institutions du ministère chargé de l’Agriculture, le besoin de commencer et vulgariser l’utilisation de la dolomie à grande échelle et s’il le faut sur tous le territoire national.
« ¾ du territoire national sont en dessous du pH tolérable. 9 provinces (31 communes) sont plus menacées plus que les autres. Les mêmes provinces devraient avoir des actions urgentes mais IFDC n’avait pas assez de moyens pour toutes les communes .Il a fallu une sélection objective sur base de niveau du potentiel d’hydrogène pour rester avec les 89 collines », affirme-t-il. En tenant compte de ses propos, les capacités de production de la dolomie au Burundi sont très limitées. Les différentes entreprises qui existent jusqu’ici ne dépassent pas 126Tonnes par an alors que les besoins sont extrêmement énormes. Plus de 1800000 T de dolomie seraient nécessaires pour éradiquer le problème d’acidité au Burundi.
Pour lui, l’acidité est due à la déficience du calcium et du magnésium dans le sol, deux composants qui constituent la dolomie. Il indique que les conséquences de l’acidité sont entre autres, la faible décomposition de la matière organique, la faible utilisation des éléments nutritifs particulièrement les engrais, l’utilisation intensive du sol sans la rotation ou l’association des cultures et l’exposition à différentes type d’érosion du sol.
Pour rappel, l’IFDC s’emploie à renforcer et à maintenir la rentabilité alimentaire et la productivité agricole dans les pays en développement et en transférant une expertise efficace et respectueuse de l’environnement en matière de technologie des éléments nutritifs de cultures et d’agro-alimentaire. Les études de faisabilité sur le renforcement de la filière dolomie sont réalisées dans le cadre du projet d’appui à la gestion responsable intégré des sols (PAGRIS) de IFDC qui s’articule sur trois niveaux à savoir l’intensification agricole au niveau des exploitations, l’aménagement communautaire des bassins-versants, et la création d’un environnement favorable pour la fertilité des sols en appuyant le ministère et les autres acteurs.
1. Vous ecrivez:« Les différentes entreprises qui existent jusqu’ici ne dépassent pas 126Tonnes par an alors que les besoins sont extrêmement énormes. Plus de 1800000 T de dolomie seraient nécessaires pour éradiquer le problème d’acidité au Burundi… »
2. Mon commentaire
a). La densite de la dolomite est de 2,899 tonnes par metre cube, donc les 126 tonnes correspondent a 43,46 metres cubes de roche.
Les braves femmes qui utilisent leurs petits marteaux pour casser les pierres sortis des lits des rivieres de Bujumbura pourraient pulveriser ces 43 metres cube de roche en un mois par exemple.
b). S’il faut par exemple 20 tonnes de dolomie pour relever le pH d’un hectare, toute la production locale de dolomie ne couvrirait que 6 hectares.
Donc ce projet pilote a du importer des centaines ou des milliers de tonnes de dolomie ET LES FRAIS DE TRANSPORT DOIVENT AVOIR COUTE TRES TRES CHER AU PROJET.
Rectificatif: Prière lire 2 kg/m2 au lieu de 20kg/m2 dans le commentaire précédent. Désolé.
« Le disperser dans un champ et le doser avec une grande précision c’est -à- dire 100g / m2 et il faut l’enfuir deux semaines avant le semi. Encore plus, il ne faut pas en abuser sur le long terme et jamais en excès et surtout en association avec les intrants organiques », précise Jean-Claude Niyonkuru de Ruhororo à Ngozi.
Cette dose de 100g/m2 de dolomie me semble très faible. Cela correspond à 1T/ha. En principe, il est conseillé d’appliquer annuellement une dose de 20T/ha d’amendements calcaires pour relever graduellement l’acidité du sol soit l’équivalent de 20 kg/m2..
Dans un Burundi ou l’agriculture est prioritaire et ou l’on dispose de reserves de dolomie de plus de 100 ans, je ne comprends pas pourquoi RETA MVEYI RETA NKOZI et le secteur prive ne construisent pas des usines pour produire de la dolomie necessaire pour retablir la fertilite de tout le sol burundais.
1. Vous ecrivez:« le Burundi regorge d’important réserves de dolomies. Les gisements dolomitiques sont disponibles au Burundi surtout dans les provinces de Rutana, Cibitoke, Ngozi. Six cents millions de tonnes de dolomie sont disponibles et elle peut être exploitée pendant 100ans… »
2. Mon commentaire
La carte geologique et la stratigraphie du Burundi disent qu’il y aurait de la dolomie au sud-est du pays dans les roches du groupe de Muzindozi (qui couvrent une surface longue de 44 km avec une largeur maximale de 22 km) et les roches du groupe de Mosso (sur une surface longue de 36 km avec une largeur maximale de 15 km).
https://www.researchgate.net/publication/301689515_Etude_palynologique_dans_le_Proterozoique_superieur_du_Burundi
« The following Musindozi Group contains dolomitic limestones, calcareous shales, lavas, sandstones, quatzites and conglomerates.
In the following Mosso Group silicifi ed dolomitic limestones and lavas have been recorded… »
https://link.springer.com/chapter/10.1007/3-540-29145-8_9
Juste suggérer de poursuivre l’appui conseil en comparant la valeur ajoutée brute (richesse créée) et non le rendement avec des témoins apport de compost, de compost amélioré et compost et dolomie, compost améliorée et dolomie sur des polycultures et sur des monocultures
@ndimanya
Merci de votre commentaire. Si vous etes Professeur Patrice Ndimanya, je crois que vous etes le mieux place pour travailler sur la problematique de l’application de la dolomie.
Normalement les geologues ne font que montrer ou se trouvent les reserves minerales et leur valeur economique.
Mais j’ai des doutes: au Burundi ou le citoyen n’a meme pas un ane ou un cheval pour transporter quelques dizaines de kilos, comment va -t-il transporter des tonnes de dolomie jusque dans son champ?
Je partage votre inquiétude par rapport au coût et à l’appropriation, une innovation se justifie par le rapport coût/bénéfice et la durabilité c’est à dire la capacité de prise en charge par les communautés cibles en dehors de toute subvention (approche autonomisante). Il est utile de vérifier la productivité marginale d’une tonne de dolomie et le comparer à son coût étant donné que souvent on se contente de mettre en évidence la production par unité de surface et non la valeur ajoutée par rapport à d’autres alternatives