La récente mesure prise par l’Office burundais des recettes (OBR) de quadrupler la valeur de la marchandise éligible à la déclaration simplifiée est saluée positivement par les petits commerçants de Muyinga.
« Nous tirerons à coup sûr un grand profit de la nouvelle mesure », témoigne un commerçant rencontré au marché de Muyinga.
Il indique qu’avant cette mesure, les petits commerçants effectuaient beaucoup de navettes entre les villes tanzaniennes et Kobero (poste frontière) pour le transport des marchandises d’une valeur de 2000 USD. « Notre marge bénéficiaire était sérieusement affectée par le coût du transport ». Il ajoute que pour certains produits importés de la Tanzanie (comme le riz), il était presque impossible de tirer leur épingle du jeu face à la concurrence des commerçants qui importent des camions entiers.
D’après lui, avec la nouvelle mesure, un commerçant pourra louer à lui seul une camionnette pour aller s’approvisionner en Tanzanie, ce qui relèvera sa marge de bénéfice.
Un autre commerçant signale que bien de ses confrères étaient obligés de se livrer à la fraude. D’après lui, si le petit commerçant doit se plier à la procédure de la déclaration, fût-ce simplifiée, le bénéfice sur les produits d’une valeur de 500 USD est très faible. Pire, martèle-t-il, le pouvoir d’achat des Burundais reste très faible, ce qui fait que les produits ne s’écoulent pas rapidement des rayons des boutiques.
Scission des colis pour échapper à la déclaration normale
Les commerçants se félicitent aussi de ce qu’ils ne vont plus perdre du temps à scinder les marchandises importées de la Tanzanie en de colis de moins de 500 USD. De retour, ils prenaient soin de passer un coup de fil à des collègues du marché de Muyinga qui ont le NIF (le numéro d’identification fiscale) pour venir les attendre à la frontière. Là, chaque commerçant se faisait passer pour propriétaire d’un colis et la procédure de la déclaration simplifiée pouvait commencer.
Les petits commerçants disent que même l’OBR gagnera dans la nouvelle mesure puisque désormais, pour des marchandises de 2000 USD, les agents de l’OBR auront à produire une seule déclaration de mise en consommation (dite IM-9) au lieu de quatre.
Signalons que les commerçants qui s’approvisionnent en Tanzanie disent ne pas éprouver des problèmes de transport de marchandises. Celle-ci se fait à l’aide des camionettes tanzaniennes qui déposent les colis au niveau du poste frontière de Kobero. Après la déclaration, des camionnettes immatriculées au Burundi chargent la marchandise pour Muyinga ou autre destination.
Par ailleurs, les commerçants de Muyinga qui importent leurs marchandises de l’Ouganda disent que la nouvelle mesure est très bonne. Mais ils observent aussi qu’elle ne leur profite pas car, disent-ils, ils ne savent pas grand-chose de la déclaration, quelle soit normale ou simplifiée. « Nous payons 2.500Fbu par Kg de marchandise au transporteur. Celui-ci nous livre la marchandise au marché de Muyinga après s’être acquitté de toutes les déclarations », dira un d’eux.
Eclairage de l’OBR
Dans un café de presse de ce mardi 7 octobre à Bujumbura, le commissaire général de l’OBR, Domitien Ndihokubwayo explique que la mesure de porter la valeur de la marchandise éligible à la déclaration simplifiée de 500 à 2000 USD s’inscrit dans le cadre de la facilitation du commerce transfrontalier.
Pour lui, la mesure impulsera certainement le commerce transfrontalier. Mais il se garde de préciser à quel pourcentage ce commerce va se développer.
Il a aussi indiqué que dans la même visée du développement du commerce transfrontalier, de nouveux bureaux de dédouanement ont été ouverts notamment à GasenyiI (Kirundo) et à Ruhwa (Cibitoke) pour faciliter la déclaration des importations à destination respectivement des provinces du Nord et de l’Ouest. Toujours dans cette volonté de booster le commerce transfrontalier, certaines marchandises importées en provenance des villages voisins non accessibles au certificat d’origine ont été dispensées de l’exigence de ce certificat.
Répondant à la question de savoir pourquoi la nouvelle mesure ne profite pas aux petits commerçants qui s’approvisionnent en Ouganda, M. Ndihokubwayo fait deux observations. D’abord, c’est légitime que des scellés soient placés sur des camions et bus en provenance de l’Ouganda qui entrent au Rwanda par le poste de Gatuna. Pour lui, le Rwanda doit prendre des dispositions pour que les produits destinés au Burundi ne soient pas détournés en cours de route pour être vendus sur le marché rwandais. « Cela serait un cas de fraude qui porterait préjudice à l’économie de ce pays ».
Ensuite, au sujet des petits commerçants des provinces du Nord qui se lamentent de devoir descendre à Bujumbura pour la déclaration de leurs marchandises, le commissaire général fait remarquer que les scellés mis au poste de Gatuna peuvent être enlevés au bureau de Gasenyi ou de Kayanza. Et de souligner que s’il y a un commerçant qui se voit obligé de dédouaner ses marchandises au port de Bujumbura, c’est que par distraction ou par manque d’expérience peut-être, il regroupe ses marchandises avec celles de ses confrères qui eux font la déclaration au port de Bujumbura.
Selon Joas Katanga, directeur des Douanes, Ports et Frontières à l’OBR, la mesure de revoir à la hausse la valeur des marchandises éligibles à la déclaration simplifiée est une conséquence logique d’une autre mesure qui date de longtemps. Elle permet aux commerçants membres d’un pays de l’EAC de pouvoir bénéficier d’une déclaration d’exportation simplifiée pour les marchandises d’une valeur ne dépassant pas 2000 USD. Dans le pays où la marchandise est exportée, le produit bénéficie d’une déclaration d’importation simplifiée. Il était donc temps d’harmoniser la valeur de toutes les déclarations simplifiées que ce soit à l’importation ou à l’exportation.