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La culture dans le passé burundais

05/05/2013 Commentaires fermés sur La culture dans le passé burundais

Le clan, la religion, … sont quelques traits de la culture burundaise. Les Burundais attachaient une grande importance aux clans. A la période monarchique, différentes fonctions étaient accordées sur base des clans. Ces critères ont influencé d’une façon ou d’une autre les conflits burundais. Pourraient-ils jouer un rôle dans le travail de la Commission Vérité et Réconciliation ?

<doc6571|left>« Durant la monarchie, naître d’un tel clan déterminait le poste à occuper, le statut social. Chaque clan savait la place qui lui revenait », souligne Père Désiré Yamuremye, de la congrégation des Jésuites. Certains clans étaient considérés comme nobles et d’autres marginalisés (les Bahirwa par exemple). Ce qui a conduit aux frustrations d’où le phénomène appelé ‘‘Kwihutura’’ par exemple qui touchait surtout les hutus, précise-t-il.

Ces considérations claniques, ethniques jouaient un rôle dans le choix d’une épouse. Il y avait des clans qui ne se mariaient pas entre eux. Passer outre cette interdiction, on risquait d’être mis en quarantaine. D’après Désiré Yamuremye, ces éléments n’ont rien de mal. « Le mal se trouve dans leur instrumentalisation pour des profits inavoués. Même dans d’autres pays, les ethnies et les clans existent mais ne constituent pas des critères d’exclusion ».

Père Désiré Yamuremye signale que certains hommes politiques exploitent ces éléments pour des visées politiciennes. C’est ce qui est arrivé au Burundi et cela a laissé des séquelles importantes.
Il soutient que l’heure est à panser les plaies : « Plus on guérit de ces plaies, plus on construit une société unie socialement et économiquement ».

Qu’en pense la jeunesse ?

« Je suis contre cette culture fondée sur des considérations identitaires. Le « Qui-es-tu ?, le d’où-viens-tu ? » n’ont plus d’importance. Ceux qui le faisaient à l’époque, c’était juste pour se montrer plus valeureux que ceux qui n’avaient pas le même statut social », raconte un jeune de la ville de Bujumbura.
Il précise que ces critères peuvent constituer un obstacle dans la fondation des foyers, alors que l’amour n’a pas de limites. Pour lui, il ne tient pas compte des origines, des races, des religions, …

Pour Ariane, une jeune fille de la commune Bwiza, on ne peut pas continuer à mettre en avant ce qui divise les gens. « Il faut privilégier des éléments rassembleurs qui promeuvent l’unité et la cohésion sociale, facteurs de réconciliation nationale ».
D’autres jeunes affirment que la culture burundaise n’est pas du tout saine. Il y a des traits culturels qu’il ne faut pas continuer à prendre en considération. Ils reviennent sur certains proverbes qui encouragent la gourmandise, l’injustice, etc. « C’est le cas de proverbes comme‘‘ishuri irisha aho iziritse’’(le taureau broute là où il est attaché) », précise Anicet, un jeune de la commune Buyenzi. Pour lui, tous les proverbes de ce genre sont à bannir.

Et Désiré Yamuremye de renchérir : « Les Burundais n’ont pas la culture de dire la vérité. Il y a des proverbes qui incitent les gens à ne pas dire la vérité. Selon lui, un Burundais ne va pas directement sur le vif du sujet, c’est à l’interlocuteur de discerner le message donné. « Un Burundais peut donner une réponse vague alors qu’il connaît bien la vérité », précise-t-il. Ainsi, il estime que cela ne va pas faciliter le travail de la CVR.

La part de la religion dans la CVR

« Quand je vois les Burundais peupler les églises aujourd’hui, je me demande s’ils sont réellement convertis. Sûrement qu’il y en a qui veulent montrer au public qu’ils ne sont plus mauvais », souligne Charles Berahino, un pasteur. D’après lui, ce comportement risque de désorienter le travail de la CVR. Les gens essaient de trouver un refuge dans les religions. Charles Berahino signale aussi qu’il y a des gens qui adhérent dans les religions pour d’autres intérêts.
Père Désiré Yamuremye indique que les Burundais ont connu Dieu depuis longtemps. Il considère que pour aboutir à la vérité, il faut que la foi soit concrétisée dans les actes.
« Nous les chrétiens nous connaissons Dieu à travers Jésus Christ. Et celui–ci nous a laissé deux commandements. Il faut aimer Dieu et aimez- vous les uns les autres comme je vous ai aimés. Cela nous permettra de dépasser nos critères identitaires, régionaux,… C’est la seule voix qui nous amènera à vivre en harmonie  et à se dire la vérité», précise Père Désiré Yamuremye. De cette façon, conclut-il, le travail de la CVR sera facile et on aboutira à la vérité sur le passé du Burundi.

<doc6570|left>Le théâtre et la CVR

« Avec le théâtre, on travaille avec les ‘’vérités’’. Chaque personne, catégorie vient avec son histoire, ses vérités. Chacun raconte ce qu’il a vécu sans nécessairement connaître la vérité des autres. Le fait que dans la troupe constituée toutes les vérités puissent être dites et entendues est une bonne chose », indique Frédérique Leconte, metteur en scène belge.

Selon elle, quand le spectacle est créé et que les vérités sont diffusées auprès du grand public à peu près 5000 personnes par présentation, cela change de mentalité. Le changement commence, précise-t-elle, par l’intérieur de la petite troupe formée. En effet, les acteurs se disent la vérité et chacun a l’occasion de constater qu’il n’est pas la seule victime du passé douloureux. Et par contamination, poursuit Mme Leconte, même le public est touché puisqu’il a entendu des choses auxquelles il n’était pas habitué. « Les gens voient des personnes d’ethnies différentes s’exprimer sur des points de vue différents ».

Par le théâtre, on atteint un grand public. Concernant la CVR, elle souligne que ce moyen ouvre les cœurs, étend les espaces de parole pour que les gens puissent se dire la vérité.

|||Article proposé dans la série sur Le passé non composé||

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