La culture burundaise prévoit des mécanismes pour éviter tout écart de langage. Il s’agit des méthodes de la communication non-violente et de gestion pacifique de conflits à la burundaise. L’anthropologue et Mushingantahe Zénon Manirakiza appelle tout Burundais à éviter les messages de haine qui sont des antivaleurs.
Quels sont les mécanismes prévus par la culture burundaise pour lutter contre les messages haineux ?
Ils sont prévenus par la sagesse des proverbes, les bons principes de la vie véhiculés à travers les interdits, la recherche des richesses qui ne tue pas, l’esprit éclairé par la morale des contes et chantefables ainsi que le souci permanent de protéger l’environnement. C’est cette source pleine de ressources sans lesquelles la pharmacopée, l’agro-élevage et le bien être en général, ne saurait qu’illusion. Les messages de haine sont combattus pour ces différentes raisons.
Est-elle efficace pour freiner la prolifération des messages haineux?
La culture burundaise freine la prolifération des messages de haine, surtout à travers les proverbes. « Sakirimikibi yatanze umurozi gupfa» pour dire que les écarts de langage peuvent attirer au locuteur le traitement pénal réservé au sorcier. Que dire de ces autres proverbes qui insistent sur l’attention qu’il faut porter à toute parole à prononcer ou proférer comme « umutavu w’ururimi uraca ntibagarura». Toute parole prononcée a hâte de s’envoler et de produire des effets qu’il était impossible de limiter, d’arrêter. Notons que les esprits malveillants peuvent recourir à des expressions qui prônent la provocation et la vengeance. Dans ce cas, ils se servent des antivaleurs.
Comment expliquer la persistance de ce phénomène?
Les valeurs culturelles courent toujours le danger d’être travesties, d’être attaquées par les antivaleurs. C’est ce qui s’est produit à cause de l’acculturation et de la mauvaise gouvernance. Le passé du pays porte ainsi les marques de cette déchéance. C’est avec les valeurs culturelles qu’on arrivera à redresser la pente, à sortir du tunnel.
Comment s’approprier les traits positifs de la culture burundaise dans cette lutte ?
Sous d’autres cieux, on parle de méthodes non-violentes, de communication non-violente et de gestion pacifique de conflits. Chez nous, on apprend dès le bas âge à vivre en société, à se garder de jeter le discrédit sur la famille, à protéger sa propre dignité et à rechercher l’honneur.
Concrètement ?
Il s’agit surtout des expressions proverbiales, des interdits et de la littérature. Ce sont des ressources qui insistent sur la dimension intérieure de la personne humaine, la droiture, le respect de l’autre et la non-violence. Les messages de haine sont combattus pour ne pas porter atteinte à la dignité humaine et faire l’apologie du crime ou de la violence.
Propos recueillis par Jérémie Misago
Le Mushingantahe Zénon Manirakiza est une personalité remarquable mais qui se trompe de société. La culture burundaise n’existe plus. Les cultures naissent, se développent et meurent. L’occident, pendant 1500 ans, fut profondément chrétien mais le christianisme est mort avec Dieu et enterré. Il ne reste plus qu’une infime minorité de vieilles personnes qui professe cette foi. L’Afrique du Nord fut chrétienne avec des pères de l’Eglise mythiques comme Saint Augustin, Tertullien et Cyprien de Carthage. L’actuelle Turquie fut chrétienne sous l’empereur Constantin mais le christianisme n’y existe plus. Les chrétiens du Moyen-Orient sont en voie de disparition totale.
La culture burundaise est morte depuis le triomphe du nazisme tropical qui nous a transformés en tribus sauvages et cruelles qui n’a même pas de compassion pour des bébés. Il faut froidement accepter notre tragique sort et attendre l’évolution naturelle de la société et des peuples pour sortir de cette impasse dramatique.
@Bellum
Une fois n’est pas coutume, je suis d’accord avec vous sur quelques points de votre commentaire, alors que habituellement tout nous éloigne.
Certes, la culture burundaise prône la communication non violente mais il y a ceux qui en abusent en développant le mensonge et l’hypocrisie. Par exemple « Gucumwano » qui semble à l’humilité mais en réalité c’est une hypocrisie pure et simple poussée par le complexe d’infériorité ou de supériorité. Il y a également l’utilisation du métaphore surtout mûri Arya majambo bashikiriza mu manza ou les gens profèrent des mensonges en public. Abantu bagahera kw’ijambo rya mere urubanza rutanguye gushika kuryanyuma babesha Ababa bumva. Ngo aha mubona turi murugo Kwa baka ku mutumba uyu kandi bibereyr muri salle de réception i Bujumbura. None ko bahisemwo guheba Ingo zabo bakikundira seller de réception kiki batavyemanga? Bariko baroga urwaruka Nico gituma kubesha bigenda biba bisanzwe cane mu mico y’abarundi. Ikindi hari abantu gutukana ari ikintu gisanzwe eka n’iyo mutashwanye wumva akwuriza nyoko. Canne arahira nyina, umwana, umwishwa atan’uwamurahije eka ata n’impamvu zo kurahira zihari. Aho simvuze abavuga amajambo y’ishegu abana bumva ukaza wumva ngo ntawuca umugani umwana asinziriye. None iyo si communication violente yemwe?
Correction svp: .j’zi écrit …Ababa bumva… au lieu de …abana bumva.
@Fernand
« …en développant le mensonge et l’hypocrisie… »
Moi je n’ai jamais compris comment le Burundi qui connait une insécurité alimentaire (voir les interventions du PAM et de World Vision au Burundi) peut être appelé PAYS DE LAIT ET DE MIEL/ igihugu c’amata n’ubuki.
@ Gacece
… et malgré tout, il n’est pas stupide, ni malhonnête, ni indécent de souhaiter que s’établisse une société moins disposée à la violence.
Si l’on trouve dans la sagesse traditionnelle des enseignements, des fables qui mettent en valeur le vivre ensemble, le respect de soi et de l’autre – tant mieux, et qu’on rende honneur à ces valeurs traditionnelles – elles aident à atteindre le but recherché.
Observer le Burundi en période pré-electorale, lire un article qui parle d’un père qui a gravement maltraité un jeune enfant, ou un autre qui parle de violences conjugales, ou un article plus ancien qui rapportait qu’un groupe chantait la gloire d’engrosser les femmes des adversaires politiques … le Burundi est malade des violences qui’il a subies et qu’il s’est infligées. Et, au fond, faire appel à la police et à l’armée pour contenir ces excès, c’est encore faire appel à la violence, même si cette violence paraît justifiée parce qu’elle émane de l’État.
Alors, il faut utiliser toutes les ressources à disposition : sagesses traditionnelles, enseignements religieux, activités artistiques (chants et danses), et peut-être penser à une éducation ciblée à la non-violence pour les écoles du pays …
… et se dire que, même si l’homme peut se révéler un loup pour l’homme, l’humanité n’existerait plus si l’homme n’était pas AUSSI doué d’empathie et disposé à tendre la main ä son prochain.
Inlassablement, IWACU remet le sujet sur la table. On finira bien par l’écouter.
@roger crettol
Je n’ai rien contre les enseignements des valeurs traditionnelles. J’ai voulu dire qu’il faut surtout rester vigilent pour détecter et prévenir les situations et les événements susceptibles d’engendrer des affontements violents entre groupes de toute sorte. Et si parfois ce n’est pas le cas, la seule présence de la police ou de l’armée lors de ces événements suffit à dissuader les gens. Vous mettez seulement l’accent sur la répression, mais dans les pays où la police et l’armée font correctement leur travail, il est rare qu’ils aient recours à des moyens létaux pendant leurs interventions.
Dans l’autre commentaire ci-dessous, j’ai cité l’exemple des supporters qui s’affrontent dans des violences verbales et/ou physiques. Mais le sport fait justement partie de ces événements qui rassemblent des gens de tous horizons. Des supporters d’une équipe de Bujumbura peuvent détester ceux d’une équipe de Ngozi, mais quand il s’agit de l’équipe nationale qui affronte celle d’un autre pays, les mêmes supporters peuvent se retrouver ensemble dans un même stade, à chanter et à encourager la même équipe… et à invectiver les supporters l’autre équipe!… L’effet entraînant des fo*ules fait en sorte que les individus, même prédisposés à la non-violence, perdent leur jugement et leur inhibition et se laissent entraîner dans des actes irréfléchis.
Comme je l’ai écrit, je le réécris : l’instinct animal, qui se trouve dans chacun de nous, prend toujours le dessus lors des situations fortement chargées en émotions!… comme aussi lors de ces chants que vous dénoncez… Faites le test. Retrouver un de ces jeunes et demandez-lui de chanter, seul, le même chant. Il n’en fera rien. Mais si vous le mettez dans un groupe connaissant le chant, il suffira qu’un seul d’entre eux ose l’entonner pour que les autres le suivent.
La présence des policiers ou des militaires, s’ils ne sont pas là pour mettre de l’huile sur le feu, peut parfois servir à désamorcer ou à prévenir des débordements.
C’est bien louable d’évoquer les messages de sagesse contenus dans la culture burundaise, mais il ne faut pas être naïfs.
Je ne connais d’enseignements aussi sages que ceux se trouvant dans les écritures saintes telles que les bibles des différentes religions chrétiennes, dans le Coran ou dans d’autres textes religieux. Mais cela n’a pas empêché la commission des hécatombes au nom de ces mêmes religions. Tenez! Même des « guerres saintes » existent pour de vrai! Moi je ne vois rien de saint, ni même de sain, dans une guerre!
Des prêtres ont abusés des enfants et ont commis des viols… Des religieuses partout dans le monde ont maltraité et/ou massacrés des enfants/orphelins dont elles avaient la garde, dans des couvents ou des écoles… Et j’en passe!
Dans une attroupement ou seul, un humain peut être entraîné dans des actions irrationnelles, dictées par les émotions du moment. Il suffit de voir comment les supporters de deux équipes peuvent s’engager dans des querelles verbales et/ou physiques après une défaite ou une victoire de leur équipe. Pourtant, certains de ces gens sont comme des agneaux quand ils sont seuls ou dans un autre contexte.
Un homme très calme et pacifique en apparence, rentrant de l’église, peut s’avérer être un psychopathe en puissance qui terrorise, persécute et bat sa femme et ses enfants.
L’instinct animal de l’homme ne change jamais. Il est toujours dicté par les émotions du moment, qu’on ait reçu des enseignements de sagesse ou une éducation pacifiste. Sinon, il n’y aurait aucun crime violent dans le monde entier.
Les messages de haine et les incitations à la violence sont à proscrire, voire même à punir… dans toute société. Mais le fait de les combattre ne constitue qu’un outil parmi d’autres contre les crimes violents. Il y a aussi la justice et les services de sécurité comme la police et l’armée, qui doivent être préparés et prêts à intervenir dans des situations et événements à risque.