Lors de la présentation des réalisations de la CNIDH devant l’Assemblée nationale, les députés n’ont pas caché leurs inquiétudes sur les effectifs des détenus. Ils dépassent de loin la capacité d’accueil des maisons de détention.
Le rapport présenté ce mercredi 16 avril 2020 à l’Assemblée nationale par la Commission nationale indépendante des droits de l’Homme est formel : « Avec une capacité d’accueil de 4.194 personnes, le taux d’occupation dans toutes les prisons, était de 273,3% au 27 décembre 2019. Sur un total de 11.464 prisonniers, 5.224 étaient en détention préventive soit 45,5% ».
« Pourquoi est-ce que le Burundi regorge de prisonniers? Est-ce que la Justice prend-elle du temps pour étudier les dossiers ? » Tels sont les principales inquiétudes soulevées par les parlementaires, lors de la présentation de ce rapport.
Pour le député Léopold Hakizimana, il n’est pas normal que pour un pays de 12 millions d’habitants, il y ait 12.000 détenus. « Statistiquement, ce nombre est trop pléthorique ».
Et de demander si réellement la justice étudie suffisamment les dossiers de tous ces gens privés de liberté avant de les envoyer en prisons ou dans les cachots. Selon ce parlementaire, durant la période électorale, le nombre de prisonniers a souvent tendance à augmenter. « Avez-vous vraiment vérifié si certaines personnes n’ont pas été emprisonnées pour des mobiles politiques ? »
A cette inquiétude, M. Hakizimana suggère de revisiter la justice traditionnelle. Car, d’après lui, le nombre des prisonniers était moins excessif par rapport à la justice moderne. « Aujourd’hui, avec la justice moderne, moindre infraction, on t’emprisonne », déplore-t-il.
Avec des cas de coronavirus déjà annoncés, l’honorable Thérence Manirambona, n’arrive pas à cacher son inquiétude. « Avec ce nombre si élevé de prisonniers, il y a un risque réel d’une grande contamination dans ces maisons de détention.
Les parlementaires demandent au président de la CNIDH de renforcer son plaidoyer auprès du gouvernement et du ministère de la Justice en particulier afin de voir comment relâcher certains détenus, en vue diminuer le nombre de prisonniers. « En tant que partenaire technique du gouvernement, ne pourriez-vous pas le conseiller de voir comment libérer les prisonniers politiques, pour que ce nombre des détenus puisse baisser », renchérit Thérence Manirambona.
La CNIDH rassure
A toutes ses appréhensions, Sixte-Vigny Nimuraba, président de la CNIDH, rassure les parlementaires. Il confie qu’avec son équipe, ils ne cesseront pas de plaider auprès du ministère de la Justice pour que le nombre des prisonniers dans les cachots et dans les prisons soit réduit. Et d’annoncer que pour aider les juges à solder quelques cas, la commission a mis en place une itinérance, vers la fin de l’an 2019.
Cependant, le président du CNIDH confie que la politique de réduire le nombre le nombre des prisonniers nécessite des mesures politiques et techniques. Selon lui, il y a d’autres moyens de sanctionner une personne sans toutefois l’infliger une servitude pénale.
Il informe que le ministère de la Justice a déployé une commission technique pour étudier les dossiers des prisonniers qui vont être mis en liberté.
Pour Pascal Nyabenda, président de l’A.N, même si le nombre des détenus dans les cellules est trop élevé, ce sont eux qui sont plus à l’abri du Covid-19 que ceux qui continuent d’aller dans les églises ou dans les lieux publics. « Je ne comprends pas pourquoi vous soutenez qu’on libère les prisonniers qui ne peuvent même sortir dehors, où il y a risque de contamination ».
Le président de la CNIDH exhorte les parlementaires de laisser le ministère de la Justice conjointement avec le ministère ayant la Santé publique dans ses attributions, étudier la faisabilité de cette mesure.
Parmi les réalisations de la CNDIH au cours de l’an 2019, le président de cette commission annonce que 79 cachots ont été visités. Il informe également que 2.413 détenus dont 237 femmes ont été entendus et 154 détenus ont été remis en liberté.