Incarcérés à la prison centrale de Ngozi, ils ont des difficultés de comparaître devant les juridictions de Kirundo.
Ils sont à plus de deux cents, ces prévenus ressortissants de la province judiciaire de Kirundo. Ils sont incarcérés à la prison centrale pour hommes de Ngozi. Certains d’entre eux affirment être à la deuxième année ou plus d’emprisonnement. Ils sont tous confrontés au même problème : la lenteur ou la négligence dans le traitement de leurs dossiers, la non comparution devant les juges. Le directeur de la prison centrale Aloys Habonimana est lui-aussi du même avis : « Ils ont besoin d’être jugés comme les autres détenus. Les magistrats de Kirundo ne viennent plus en itinérance pour les faire juger.» Pour lui, s’ils sont jugés, ils peuvent avoir les chances d’être acquittés, condamnés oud’ interjeter appel.
Le président de la Cour d’Appel de Ngozi Fabrice Bayarwize reconnaît une lenteur dans le traitement de certains dossiers surtout ceux des prévenus du ressort judiciaire de Kirundo. Il évoque le problème de l’éloignement des détenus par rapport aux lieux de commission des infractions qui oblige les juges et magistrats de Kirundo de faire des itinérances. « Ne disposant pas de prison pour l’hébergement de ses détenus , la province judiciaire de Kirundo est donc obligée de les amener à la prison centrale de Ngozi et les juges doivent faire itinérance pour entendre les prévenus à Ngozi ou faire, en collaboration avec la prison, le déplacement des prévenus vers Kirundo », souligne le président de la Cour d’Appel de Ngozi.
Selon lui, la panne du véhicule de service du tribunal de Grande Instance de Kirundo pour une période de plus d’une année est aussi une autre cause qui explique cette lenteur.
Outre le problème de déplacement, des sources bien informées parlent de problèmes de frais de mission pour le staff judiciaire de Kirundo en mission d’itinérance à Ngozi.
Une caisse d’indemnisation
Les Associations de Défense des Droits Humains œuvrant dans les provinces du nord du pays condamnent les lenteurs observées dans le traitement des prisonniers. Jean Nayabagabo, coordonnateur régional de l’Association volontaire pour la défense des droits des prisonniers (AVDP) parle de prévenus dont les dossiers restent pendants depuis 2008.Pour lui, l’Etat du Burundi devrait mettre sur pied un fonds d’indemnisation des justiciables acquittés après une longue période d’incarcération : « Actuellement, il arrive qu’un détenu soit acquitté après cinq ans d’incarcération injuste. Ce qui constitue une grave violation de droits humains. En outre, ce genre de prévenus perdent pendant cette période beaucoup de faveurs dont les avantages accordés par la grâce présidentielle et les mesures de libération conditionnelles qui ne profitent qu’aux condamnés », souligne Monsieur Nayabagabo.
Par ailleurs, le directeur de cette maison d’incarcération parle d’une surpopulation carcérale liée à cette lenteur de traitement des dossiers. « Avec une capacité d’accueil de 400 prisonniers, la prison centrale pour hommes de Ngozi enregistre actuellement 1340 détenus dont 754 prévenus et 586 condamnés. »
Le directeur Habonimana évoque aussi le problème de gestion quotidienne, ration alimentaire, hygiène avec la promiscuité pouvant causer des maladies contagieuses et l’insalubrité du milieu, l’absence de brancards pour le transport des malades.