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Kiremba : toujours sous le choc

05/05/2013 Commentaires fermés sur Kiremba : toujours sous le choc

{[{Quinze mois après l’assassinat de deux religieux italiens->http://iwacu-burundi.org/spip.php?article1485], Kiremba ne parvient pas à oublier. De nombreux projets soutenus par les Italiens ont été arrêtés.

<doc7683|left>Le 27 novembre 2011, à 20 heures 30, deux missionnaires, sœur Lucrezia, italienne, et Francesco Bazzani, italien d’origine croate, sont tués dans ce que les autorités présenteront comme une " tentative de vol avec violence". Depuis, à Kiremba, rien n’est plus comme avant. Surtout dans l’hôpital qui était géré par ces religieux.
Décembre 2012. Plus d’une année est passée après le meurtre des deux religieux. Il est dix heures. A l’hôpital de Kiremba, le ciel est bleu, le soleil doux. Juste à l’entrée, une salle d’accueil. Les patients sont nombreux. Ils attendent leur consultation. Dehors, les jardiniers, en uniforme kaki, coupent le gazon.

La propreté semble de mise. Médecins, infirmiers, et autres membres du personnel sont actifs. A quelques dizaines de mètres de l’entrée, près d’un lavabo, des garde-malades font la vaisselle. D’autres lavent leurs enfants.
A l’intérieur de la cour, un petit jardin, bien entretenu, clôturé. Au milieu, le mémorial des deux expatriés tués: sœur Lucrezia de la congrégation des sœurs servantes de la charité et Francesco Bazzani, qui dirigeait l’Association pour la coopération missionnaire (Ascom).

La tragédie reste présente dans les mémoires. Personnel soignant, patients, population avoisinante…tout le monde a du mal à s’exprimer sur le sujet.
« Qu’est-ce que nous n’avons pas perdu ? », s’interroge le médecin Michel Ntwali Zahinda, après une longue réflexion. « La sœur Lucrezia, explique ce responsable du service gynécologie obstétrique, avait démontré ce qu’est vraiment la charité par les œuvres et non par les paroles. L’hôpital avait accès aux médicaments qu’on ne trouve pas au Burundi. La sœur prenait en charge les frais des malades indigents : Les draps, les médicaments, le déplacement des patients qui habitent loin, leur nourriture durant toute leur hospitalisation. Même l’uniforme du personnel. Nous avons tout perdu. »

<doc7682|left>Interrogé sur la sécurité qui prévalait à Kiremba avant la tragédie, le médecin est formel : « Kiremba était un petit paradis. Aujourd’hui, les autorités ont tout fait pour renforcer la sécurité en augmentant la présence policière et militaire et nous le reconnaissons. Mais, l’assurance n’est plus là », regrette-t-il.
Le meurtre des deux religieux n’a pas affecté que l’hôpital. « Les écoliers et élèves de la communauté batwa, vivant tout près de chez nous, n’ont pas pu poursuivre leurs études. Ils ont tout arrêté. C’est la sœur qui les appuyait financièrement », témoigne Elias Ndikumana, un habitant du coin venu en consultation à l’hôpital.

Des projets au point-mort

D’après le directeur de l’hôpital, Bernard Ndikumana, Kiremba allait devenir un centre ophtalmologique, avec un matériel spécialisé. « Nous étions aussi en train de travailler sur un grand projet de mise en place d’un grand bloc orthopédique, le seul pour toute la région nord. Tout cela est oublié », regrette M. Ndikumana.

<img7685|right>Le médecin directeur explique que la congrégation italienne avait tissé des liens très forts entre l’hôpital de Kiremba et des médecins en dernière année de spécialisation des grandes universités, dont celles de Turin et Vérone. Ils venaient donner un coup de main au personnel soignant. «  Ils soignaient certaines complications. Ils aidaient aussi dans le renforcement des capacités en matière chirurgicale. Ceux qui étaient ici ont immédiatement plié bagage après l’assassinat de leurs compatriotes. Personne n’est revenu depuis lors», se désole-t-il. Mais, malgré tout, selon toujours le médecin, la congrégation poursuit toujours son soutien financier : « Cela prouve que l’œuvre que ces sœurs faisaient était le fruit de leur conviction », affirme-t-il.

<doc7684|right>A quand la vérité ?

Le 27 novembre 2011, Lucrezia et Bazzani sont tués par balles. D’autres, dont certains médecins spécialistes, d’origine italienne, sont blessés. Quelques jours seulement après le drame, deux présumés assassins, tous élèves, sont arrêtés. Dans la foulée, un procès est organisé. Tous les deux sont reconnus coupables et écopent de la perpétuité.

Malgré le procès et la condamnation, une large opinion regrette le flou qui plane toujours autour du dossier. Des questions restent sans réponses :
– Qui sont les auteurs des tirs venus de tous les coins autour du domicile des sœurs ? Des rafales de kalachnikovs, des tirs de pistolets… Pourtant, témoignent plusieurs sources à Kiremba, il n’y avait que deux policiers. Des policiers qui, d’après ces sources, semblaient avoir pris un verre de trop le jour de l’attaque.
– Pourquoi lors du procès, les témoins qui étaient sur place, les rescapés, n’ont pas été entendus ?
– Avant leur départ, les expatriés qui étaient sur place ont rédigé un document dans lequel ils témoignaient de ce qu’ils avaient vu et entendu la soirée du 27 novembre 2011. Des copies ont été données à certaines autorités ecclésiastiques et diplomatiques. Pourquoi la justice n’a pas voulu savoir son contenu ?
– Les deux coupables portaient l’uniforme du personnel de l’hôpital lors de l’attaque. Pourquoi aucune enquête n’a été menée pour savoir s’il n y a pas eu des complicités au sein des travailleurs ?

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