Les associations AFRABU et APFB ont organisé un atelier de formation, du 27 au 30 novembre 2018, pour les femmes et hommes leaders de la commune Kibago en province Makamba. C’est en partenariat avec l’ONG Search For Common Ground.
Une quarantaine de femmes et hommes leaders s’étaient rassemblés au chef-lieu de la commune Kibago pour suivre une série de formations dans le cadre du projet de SFCG : «Soutenir les femmes leaders d’aujourd’hui et de demain pour faire avancer la paix au Burundi.»
Dispensées par l’Association des Femmes Rapatriées du Burundi (AFRABU) et l’Association pour la Promotion de la Fille Burundaise (APFB), les partenaires d’exécution de ce projet, ces formations sont essentiellement axées sur les thèmes en rapport avec le leadership, la résolution pacifique des conflits et la masculinité positive.
Financé par le Fonds des Nations Unies pour la Consolidation de la Paix (UNPBF), ce projet vise à renforcer les femmes leaders déjà établies ou en devenir (plus de 35 ans). Il concerne également les jeunes femmes pouvant jouer un rôle clé de leaders (18-35 ans), dans les efforts de consolidation de la paix et de cohésion sociale dans leurs communautés.
Des femmes résolues à faire avancer la paix
Ces bénéficiaires du projet ont été choisis lors de la phase d’identification. Ils devaient provenir des différentes appartenances ethniques, socio-économiques, politiques et culturelles. Le profil recherché chez les femmes et jeunes filles était des femmes leaders de plus de 35 ans à la tête des organisations, des jeunes femmes de 18 à 35 ans actives dans différents groupes ainsi que des jeunes filles et femmes marginalisées et vulnérables (handicapées, les albinos, les filles-mères, les Batwa, etc).
Pour les hommes, les critères d’identification étaient des jeunes garçons de 18 à 35 ans, membres des clubs de paix, agents de changement, membres des associations ou mouvements d’action chrétienne. Des hommes leaders locaux à savoir les élus locaux, les Bashingantahe, les membres des comités mixtes de sécurité, les agents de santé communautaire, les membres des comités collinaires de développement, les membres des comités communaux de développement communautaire, les leaders religieux, les leaders des partis politiques et des organisations de la société civile.
Pour Jean Bosco Nizigiyimana, conseiller de l’administrateur chargé des questions politiques et sociales, ce projet est d’une importance capitale car il vient renforcer les capacités des femmes leaders de la commune Kibago à résoudre pacifiquement les conflits sur leurs collines.
«Dans le passé, les femmes et jeunes filles avaient été oubliées mais comme vous le savez, aucun développement n’est possible sans la femme.» Il a exhorté les participants à bien utiliser ces nouvelles connaissances pour le bien-être de la commune et du pays.
Languide Uwihoreye est une femme leader de la colline Jimbi en commune Kibago. Ses voisins ne tarissent pas d’éloges pour cette jeune dame. «Elle est très active dans la résolution des conflits qui surgissent dans le voisinage. Nous demandons des conseils auprès d’elle chaque fois que des conflits éclatent dans nos ménages», témoigne Capitoline, une voisine. «Même des hommes la consultent», renchérit une autre voisine.
«Ces nouvelles connaissances vont beaucoup m’aider. Souvent on fait appel à moi pour décanter une situation. Avec cette formation, je vais m’améliorer encore plus», assure Languide Uwihoreye.
D’après elle, les femmes commencent à endosser l’habit de leader, un travail qui était jadis réservé aux hommes, leur chasse gardée. «Les choses commencent à changer. J’exhorte d’autres femmes à ne pas avoir peur. Ce que les hommes peuvent faire, elles aussi en sont capables».
Dévote Ntisumbwa est elle aussi une femme leader de Kibago. Elle est membre du comité communal de l’Association Umuhivu w’Imboneza. «Chaque fois qu’un conflit surgit dans notre association, c’est à elle qu’on s’adresse. C’est une femme leader qui n’hésite pas à voler au secours de ses voisins. Elle est toujours là pour apporter son aide», confie un membre de cette association interrogé.
Pour la concernée, ce projet va changer beaucoup de choses. «J’utilisais mes capacités pour résoudre tel conflit mais ce n’était pas bien affiné, j’improvisais. Pour le moment, je viens d’acquérir d’autres connaissances et mon travail de femme leader sera facile.»
Elle demande aux autres participants à cette formation d’être des ambassadeurs et de transmettre ces nouvelles connaissances sur leurs collines respectives. Elle exhorte les autorités administratives à leur faciliter la tâche.
Vestine Bigirimana est une jeune femme albinos de 19 ans. Elle habite sur la colline Kiyange. Elle témoigne : «Nous sommes seulement deux albinos sur ma colline. Nous sommes marginalisées. Nous vivons dans la pauvreté. Mais avec cette formation, j’ai l’intime conviction que je peux être une femme leader malgré mon handicap».
Selon cette jeune femme albinos, cette formation lui a ouvert les yeux. Vestine Bigirimana appelle d’autres albinos à ne pas se terrer dans leurs maisons mais de sortir au grand jour. « Nous sommes capables de beaucoup de choses».
Ercane Nyabenda, un jeune homme de 23 ans, originaire de la colline Kiyange se dit étonné de voir les femmes sortir de l’ombre : «Je ne savais pas qu’une femme pouvait être un leader. Je pensais que c’était dévolu aux hommes et uniquement aux hommes.»
Ce membre de la Coopérative Sangwe de Kibago trouve que ces enseignements sur le leadership et la résolution pacifique des conflits incitent les gens à changer de mentalités. «Lorsqu’une femme devient leader, c’est toute la communauté qui en tire bénéfice. Qu’on ne s’y trompe pas, les femmes connaissent les problèmes qui surgissent dans la cité ».
Il lance un appel aux autres hommes à soutenir les femmes afin qu’elles deviennent des leaders : «C’est pour l’intérêt de leurs communautés respectives et de tout le pays.»