Jeudi 21 novembre 2024

Politique

Kefa Nibizi : « C’était un moment douloureux mais aussi une occasion de constater les souffrances qu’endurent les prisonniers »

21/10/2023 7
Kefa Nibizi : « C’était un moment douloureux mais aussi une occasion de constater les souffrances qu’endurent les prisonniers »

Kefa Nibizi, président du parti CODEBU est en liberté provisoire depuis l’après-midi de ce samedi 21 octobre 2023. Il revient sur son arrestation, et comment il a vécu à Mpimba. Une occasion de lancer un appel à la Justice burundaise.

Vous venez de bénéficier d’une liberté provisoire. Votre réaction.

La liberté provisoire qu’on vient de nous accorder est un ouf de soulagement. Nous avons un sentiment de joie et de gratitude parce que nous sommes maintenant libres. Vous comprenez qu’on ne peut que s’en réjouir.

Nous saisissons cette occasion pour remercier bien sûr le ministère publique qui a vu qu’il n’y avait pas de nécessite à être emprisonné et qui a procédé à notre libération. Mais, nous ne pouvons pas ne pas remercier les différents acteurs notamment les médias et d’autres acteurs socio-politiques qui ont contribué en l’élevant la voix pour dénoncer notre emprisonnement qui, en réalité, n’était pas fondée.

Quel est votre commentaire sur votre emprisonnement ?

Notre emprisonnement était vraiment très étonnant. Pourquoi ? Nous avons été accusé d’atteinte à la sureté intérieure de l’Etat en se fondant sur un tweet qui a été sorti le 13 octobre 2023 à l’occasion du 62ème anniversaire de l’assassinat du héros de l’indépendance.
Cette accusation se fondait sur un appel que nous avons lancé à la population pour qu’elle ne cède pas à la résignation et qu’elle prenne l’exemple du Prince Louis Rwagasore afin de redresser la situation. Il y a la pauvreté qui ne fait qu’empirer la situation. Alors moi je me suis posé beaucoup de questions.

Lesquelles ?

Est-il interdit à un parti politique d’inviter la population à ne pas céder à la résignation en cas de difficultés ? Deuxièmement, si nous appelons les gens à prendre référence au Prince Louis Rwagasore, est-ce un soulèvement ?

Finalement est-ce que le gouvernement du Burundi considère le héros de l’indépendance comme celui qui a porté atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat ? On n’a pas pu trouver une réponse. Parce que nous, l’appel que nous avons lancé s’est référé à ce héros.

Autre chose qui nous a étonnés dans cet emprisonnement : c’est qu’en réalité nous avons été convoqué régulièrement et à l’arrivée au parquet, on n’a pas eu le temps suffisant de chercher un avocat.
Et puis nous n’avons pas eu l’occasion de nous expliquer sur les accusations portées contre nous.

Pourquoi ?

Parce qu’effectivement, il n’y avait pas d’avocat et le parquet n’a pas pu attendre qu’on l’amène pour que nous puissions nous justifier en profondeur sur ces accusations.

Un autre fait très étonnant : les messages-là ont été publiés par un parti politique qui est une personne morale avec une personnalité juridique bien connue au Burundi et qui ne peut pas quitter le territoire national.

Comment alors un fait qui a été publié par une personne morale peut impliquer l’emprisonnement de son représentant alors que je devais personnellement comparaître pour répondre de ces faits en tant que représentant du parti ? On ne pouvait pas s’en prendre à moi directement. Là, il y a un très grave vice de procédure.

Comment avez-vous vécu cet emprisonnement ? Et à Mpimba c’était comment ?

Vous comprenez que la privation de liberté est toujours dure. Cela a été un moment très douloureux pour nous d’autant plus que les conditions carcérales que nous avons trouvées à Mpimba sont très déplorables.

Qu’est-ce que vous avez constaté ?

Les prisonniers ne sont pas bien nourris, ils ne mangent pas suffisamment, les conditions de logement sont déplorables parce qu’il y a des prisonniers qui dorment dans les couloirs, sur terrain, sans matelas, etc.

La plupart des prisonniers se trouvent dans des conditions inhumaines. Vivre dans ces conditions, assister à ces scènes presqu’inhumaines, c’est très touchant.

Mais, à chaque chose, malheur est bon, dit-on. Nous avons eu une occasion de constater de nous-mêmes comment les prisonniers vivent dans des conditions intenables.

Le gouvernement devait faire à ce que ces conditions carcérales soient améliorées. D’après les témoignages que nous avons eu, il y a pas de mal de prisonniers qui ont terminé leurs peines mais qui ne sont pas libérés.

Ce qui est aussi étonnant : la majorité des prisonniers le sont de manière préventive. Ce n’est pas normal. Il ne faut pas s’empresser à emprisonner les gens, ce qui gonfle les effectifs des populations carcérales.

Bref, c’était un moment douloureux mais une occasion de constater les souffrances qu’endurent les prisonniers.

Est-ce que cet emprisonnement n’aura pas d’impact sur votre activité politique ? Allez-vous continuer à vous exprimer sans contrainte ?

Cet emprisonnement ne peut en aucun nous empêcher de continuer le combat. Je suis un homme politique qui milite pour la démocratie, pour une vie meilleure de notre population, pour la bonne gouvernance administrative, politique et économique. On ne peut pas lâcher.

Par ailleurs, quand vous êtes obligés de vous taire dans votre pays, cela signifie que vous êtes des prisonniers libres. On ne va pas céder.

Nous allons continuer à nous battre conformément à la Constitution et aux autres textes qui régissent notre pays. Pas d’inquiétudes à ce niveau.

Votre appel à la Justice burundaise

On ne peut pas empêcher la justice de faire son travail mais il faut qu’on se souvienne que la liberté est la règle et que l’emprisonnement est l’exception. Qu’ils appliquent cette privation de liberté à des personnes qui nécessitent vraiment qu’elles soient en détention provisoire pour ne pas continuer à gonfler les maisons carcérales inutilement.

Propos recueillis par Rénovat Ndabashinze

Forum des lecteurs d'Iwacu

7 réactions
  1. Joannes

    Malheureusement, de part ses réponses, le type n’a pas compris le monde dans lequel il vit et a quoi sert un parti politique! c’est dommage!

  2. Ia prison fait peur à tout le monde. Même le procureur qui met injustement les autres en prison, lorsque son est tour arrive, il crie fort de l’injustice. La prison devait être destinée aux gents qui Ont commis des crimes graves .

    • Serge victor

      Que Dieu vous entende.

  3. Kabizi

    Fallait il aller en prison pour savoir comment sont les prisons burundaises?
    Pathétique.
    Que font alors les partis politiques d’opposition?
    Nagira mwahora mubikurikira.
    Même Mandela le savait😭😇

  4. Anonyme

    Il sort et il monte le volume, très bien. Avec trop d’amitiés avec le voisin du Nord, il ne faut pas que ce « prisonnier libre » meure après demain dans un accident de circulation.

  5. Stan Siyomana

    1. Vous ecrivez:« Je suis un homme politique qui milite pour la démocratie, pour une vie meilleure de notre population, pour la bonne gouvernance administrative, politique et économique… »
    2. Mon commentaire
    a. C’est quand meme bien que ce monsieur a ete libere.
    b. Mais vu la mauvaise situation socio-economique du Burundi apres 61 ans d’independance, moi je suis convaincu que la classe politique burundaise veut tout simplement arriver au pouvoir pour en beneficier materiellement SANS TROP SE SOUCIER DU SORT DU CITOYEN LAMBDA.
    Il y a plus de 40 partis politiques agrees, y aurait-il 40 facons de resoudre les problemes socio-economiques du Burundi?

  6. Gacece

    « Un autre fait très étonnant : les messages-là ont été publiés par un parti politique qui est une personne morale avec une personnalité juridique bien connue au Burundi et qui ne peut pas quitter le territoire national.

    Comment alors un fait qui a été publié par une personne morale peut impliquer l’emprisonnement de son représentant alors que je devais personnellement comparaître pour répondre de ces faits en tant que représentant du parti ? On ne pouvait pas s’en prendre à moi directement. Là, il y a un très grave vice de procédure. »

    Une personne physique a tapé le message et a appuyé sur le bouton ‘Publier’!

    De qui s’agit-il exactement. Cette personne a-t-elle rédigé le tweet de sa propre initiative ou était-ce une réflexion/décision collective du comité directeur du parti? Mon petit doigt me dit que c’est Kefa Nibizi lui-même qui gère ce compte Twitter et qu’il publié le tweet. Je peux me tromper.

    Tant mieux s’il a pu s’expliquer et clarifier sa situation… et qu’on l’a cru!

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