Samedi 23 novembre 2024

Économie

Kayanza : les cerises peinent à mûrir, les caféiculteurs sont inquiets

15/07/2020 Commentaires fermés sur Kayanza : les cerises peinent à mûrir, les caféiculteurs sont inquiets
Kayanza : les cerises peinent à mûrir, les caféiculteurs sont inquiets
Côme Ndikumana : « Je fais le tour pour voir si demain, j’aurais au moins 1 kg de cerises mûres »

Au moment où la campagne café se clôture d’ici peu, il s’observe encore des cerises vertes dans les plantations. Les agriculteurs demandent une prolongation de la cueillette et l’autorisation de traiter manuellement cette partie restante de la récolte.

Sur la colline Kirema en commune Kayanza, le ciel est clair, il fait beau. Alors que la campagne café 2020-2021 peut se clôturer dans quelques jours, les champs de caféiers ne donnent pas l’impression d’être en fin de campagne. La plupart des caféiers croulent sous le poids des cerises verdoyantes par-ci et par-là.

Lundi 6 juin 2020, il est 1o heures. Côme Nduwimana est dans son champ des caféiers. Il fait savoir qu’il ne fait pas la cueillette. Les stations de lavage de l’Odeca (Office pour le Développement du Café du Burundi) n’achètent que mardi et vendredi. « Je fais le tour pour voir si demain, j’aurais au moins 1 kg de cerises mûres ».

Déçu, ce caféiculteur est dans la désolation totale. « Cette campagne café est très mauvaise. Depuis le mois de mai, je n’ai cueilli que 45 kg de café alors que la saison dernière, à la même époque, j’avais déjà vendu plus 200 kg ».

Découragé, ce dernier fait savoir que même cette petite quantité a été vendue au cours du dernier mois. «Vous comprenez qu’au premier paiement du mois de juin, je n’ai rien perçu», déplore-t-il.

Pour le moment, il ne perd pas l’espoir. Il pense que dans un mois le café sera prêt pour la cueillette. Mais il est  inquiet. La campagne café 2020-2021 se clôture dans quelques jours. Il ne pourrait plus vendre sa production. C’est une perte énorme pour lui.
Face à cette situation, M. Nduwimana indique qu’il ne laissera pas sa production pourrir. Pour sauver une partie de la production, il explique qu’il recourra à la méthode du traitement manuel du café.

Même si ladite méthode est interdite par le gouvernement, ce dernier affirme qu’il assumera  : « J’ai investi beaucoup d’argent et d’énergie pour l’entretien de mon champ, je ne peux pas rester les bras croisés s’il y a moyen de traiter la récolte ».

Par ailleurs, précise Côme Nduwimana, je ne suis pas seul. D’autres caféiculteurs vivent la même situation. Ils feront la même chose. « Si nous ne trouvons pas de preneurs, ça sera à jeter dans une compostière ».

Pour récolter toute cette production, ce dernier demande au gouvernement d’accorder aux caféiculteurs un délai de cueillette supplémentaire d’au moins un mois.

Les caféiculteurs veulent traiter les cerises en café washed

Libère Bucumi, caféiculteur de la colline Kavumu se lamente aussi. Il indique qu’il espère que la production sera doublée ou triplée par rapport à l’année passée.

Malheureusement, son objectif reste irréalisable. Le temps file et la campagne peut se clôturer à tout moment. « J’ai déjà 500 kg. Cette production est égale à celle que j’ai obtenue l’année dernière».

M. Bucumi trouve que la solution serait d’autoriser les caféiculteurs de traiter manuellement une partie de la production qui ne serait pas encore mûre après la clôture de la campagne café. Sans quoi, indique-t-il, c’est une porte ouverte à la fraude. Les caféiculteurs seraient dans ce cas tentés de vendre à tout prix le café washed dans les pays limitrophes.

Selon ce cultivateur, les cerises ne mûrissent pas parce que les caféiers n’ont pas reçu des fertilisants suffisants notamment l’engrais. Pour ces dernières campagnes, il n’a pas épandu l’engrais NPK après le sarclage. Ce qui pourrait, selon lui, freiner la phase de mûrissement des cerises.

En outre, acheter de l’engrais est un casse-tête. Il faut d’abord payer l’avance et attendre entre 4 et 5 mois. Un autre facteur. L’argent qui finance l’achat de l’engrais est tiré de la vente du café. Or, les deux dernières campagnes, il y avait eu des retards de paiements. Plusieurs caféiculteurs avaient fait recours à l’usure. Ils n’avaient pas pu s’acheter des fertilisants. « Et voilà la conséquence ».

Un autre problème, le coût de l’engrais . Son prix ne cesse d’augmenter alors que le prix d’un kg de café reste presque le même. « Nous privilégions acheter l’engrais pour les cultures vivrières qui rapportent plus que le café ».

Concernant la prolongation de la période de la collecte du café cerise, Félix Niyibitanga, superviseur de qualité à l’ODECA dans la région Kayanza est ferme. « Nous ne pouvons pas accorder un délai supplémentaire aux caféiculteurs pour attendre que les cerises mûrissent». Car, enchaîne-t-il, ces cerises qui ne sont pas mûres donneront le café fully washed de mauvaise qualité.

La campagne se clôture bientôt

Félix Niyibitanga : « Nous prévoyons clôturer la campagne de la collecte du café bientôt »

Ce responsable tient à souligner que la récolte dure en moyenne trois mois au Burundi. « Raison pour laquelle, nous prévoyons clôturer la campagne de la collecte du café bientôt ».

Ce responsable souligne que l’ODECA Kayanza ne peut pas autoriser aux caféiculteurs de traiter manuellement les cerises de café qui seront mûres après la clôture de la campagne. « C’est au gouvernement de décider ».

Cependant, précise-t-il, même si une partie de cerises n’a pas encore mûri, cette saison s’annonce bonne. Jusqu’au 29 juin dernier, l’ODECA Kayanza enregistre 3.25o tonnes de cerises.

M. Niyibitanga fait savoir que l’ODCA Kayanza constate des cerises vertes dans plusieurs plantations. D’après lui, la phase de mûrissement semble longue. Cela est dû à la faible précipitation.

Signalons que la première tranche a été trop courte alors que la majorité mise sur le premier paiement pour réaliser leurs projets. Contrairement aux campagnes passées, une grande production a été vendue dans la deuxième tranche. Peu de caféiculteurs ont perçu plus de 30 mille francs burundais.

Cette situation ouvre la porte aux usuriers. Désormais, les caféiculteurs n’ont pas de choix car ils n’ont aucune autre source de revenus. Ce qui pousse certains d’entre eux à recourir à l’usure, un phénomène communément appelé ’’Umugwazo’’.

Ainsi, pas mal de commerçants usuriers sillonnent les collines pour acheter les tickets aux caféiculteurs qui sont dans un besoin urgent de moyens financiers pour subvenir à leurs besoins. Ils vendent à 400 francs les tickets sur lesquels est enregistrée toute la quantité de café cerise. Les caféiculteurs acceptent de perdre 150 francs par kg.

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