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Karusi, Muyinga, Ngozi et Cankuzo : des enseignants poursuivis pour terrorisme

05/06/2013 Commentaires fermés sur Karusi, Muyinga, Ngozi et Cankuzo : des enseignants poursuivis pour terrorisme

Depuis décembre dernier, plusieurs personnes en particulier des enseignants, sont arrêtées, dans les provinces de Cankuzo, Karusi, Muyinga et Ngozi. Souvent membres du parti FNL, ces enseignants considérés sont accusées de participation à des actes terroristes. Maître Onésime Kabayabaya estime que la qualification des actes qui leur sont reprochées ne correspond pas au terrorisme. <img2719|left>Six enseignants de la province Karusi et deux autres fonctionnaires sont sous les verrous depuis début décembre dernier. Tous membres du parti FNL d’Agathon Rwasa, ils sont accusés de participation aux actes de terrorisme. D’après M.Y, membre de la famille de Faustin Rushemeza, un de ces enseignants, il a été arrêté par le commissaire provincial de la police alors qu’il était à son service. Selon cette source, les charges qui pèsent sur Faustin Rushemeza, directeur du collège Mater Ecclesia de Mutara(une école sous convention catholique) en commune Mutumba, ne sont pas fondées : « Il se présentait régulièrement au service et habitait à côté d’une position militaire. » Et de se demander comment ce secrétaire exécutif des FNL à Karusi a pu participer aux actes de terrorisme alors que personne n’avait jamais signalé son absence à la maison. Pour I.C, un autre membre de la famille de Faustin Rushemeza, il est victime de son appartenance politique : «Le député Stany Butoyi, président du parti CNDD-FDD dans la province Karusi l’obligeait tout le temps à adhérer au parti présidentiel, chose que Faustin a refusée. » Patrice Ntahomvukiye, enseignant à l’école primaire de Bibara 1, en commune Mutumba, Léonard Muhirwa, professeur au collège communal Nyabikere, Jean Paul Nimubona, professeur au collège communal Rwimbogo, en commune Bugenyuzi, Providence Kamariza, enseignante à l’école primaire Nyaruhinda 1, en commune Gitaramuka et Charles Bwampamye, enseignant à l’école primaire Butaha 2, en commune Gitaramuka, sont également écroués à la prison de Gitega. Selon des témoignages concordants à Karusi, Alexis Ndabazi de la régie communale de l’eau à Buhiga et un certain Ezéchiel, superviseur au district sanitaire de Buhiga, sont aussi gardés à la prison de Gitega. Des sources à Muyinga font savoir que 9 enseignants sont aussi emprisonnés sous le même chef d’accusation. Une infraction d’un genre nouveau Les proches de toutes ces personnes arrêtées affirment qu’elles sont innocentes. Pour eux, elles sont accusées de participation aux actes de terrorisme alors qu’il n’y a aucun indice de culpabilité, hormis leur appartenance au parti FNL d’Agathon Rwasa. Ils parlent d’une infraction d’un genre nouveau au moment où tout l’entourage reconnaît que ce sont des hommes intègres. En province Ngozi, quatre enseignants fidèles à Agathon Rwasa, dont le préfet des études au petit séminaire de Mureke, sont emprisonnés. Quatre autres ont déjà fui. Au total, 22 personnes sont emprisonnées à Ruyigi avec Hassan Ruvakuki, journaliste de Radio Bonesha FM. Elles sont aussi accusées de participation aux actes de terrorisme. Les familles clament leur innocence. <img2720|right>« Nous attendons la décision de la justice » Gérard Ninziza, chef du personnel et des affaires sociales à la direction provinciale de l’enseignement à Karusi est au courant de ces arrestations. Pour lui, tous ces enseignants étaient réguliers au travail. Quant à la gestion du personnel, Gérard Ninziza précise que les enseignants suppléants au primaire vont occuper certaines classes en attendant la décision de la justice : « Au secondaire, nous allons augmenter la charge horaire de ceux qui n’étaient pas trop surchargés et recourir aux professeurs vacataires. » L’Abbé Jean Marie Kazitonda, superviseur diocésain pour l’éducation dans l’Archidiocèse catholique de Gitega affirme que Faustin Rushemeza est administrativement correct : « Nous attendons la décision de la justice. » Aristide Nsengiyumva, procureur de la République dans la province Karusi, explique qu’il y a certains éléments à charge que le parquet n’a pas encore collectés faute de moyens de déplacement. Toutefois, il rassure les familles des personnes emprisonnées car il va accélérer le dossier pour que les responsabilités soient vite établies. <doc2721|left>Maître Onésime Kabayabaya, un des avocats des personnes accusées de terrorisme : « Le terrorisme est un acte sophistiqué » {Cette infraction de participation à des actes de terroriste se trouve-t-elle dans la loi burundaise ?} La loi pénale burundaise parle d’actes de terrorisme dans son code pénal, en ses articles 614 et suivants. Donc, pour les actes qui sont accomplis, qui semblent rentrer dans ces dispositions et les personnes ayant posé ces actes au Burundi, peuvent être poursuivis pour les actes de terrorisme et de bioterrorisme au Burundi. {Quels sont ces actes ?} S’agissant des actes qui sont incriminés par l’article 614 du code pénal burundais, il s’agit des faits qui sont aussi incriminés sous des dispositions où ils sont érigés en infraction autonome. C’est le cas notamment de vols, des extorsions, des dégradations et des destructions. {Peut-on alors parler d’actes de terrorisme au Burundi ?} Au regard de ce qu’on entend ailleurs, on n’a pas l’impression que les actes ici poursuivis rentrent dans ces catégories aussi graves. Normalement, le terrorisme tel qu’on se l’imagine est un acte sophistiqué qui demande beaucoup de connaissances, parfois même, des organisations très fortes. Je n’ai pas le sentiment que le terrorisme dont on parle ailleurs, notamment les actes qui ont été commis aux Etats-Unis d’Amérique, les actes qui se passent ailleurs dont on entend parler ici et là, soient comparables à ce qui se fait au Burundi. J’ai l’impression que pour le terrorisme et le bioterrorisme dont on parle, s’il était avéréi, il s’agirait carrément de vols, d’extorsions, de destructions et dégradations des biens tel qu’ils sont déjà reconnus et poursuivis sur base du droit pénal commun. {Si c’était réellement le terrorisme, pourquoi le Burundi n’aurait pas déjà fait appel à la solidarité internationale comme le font d’autres pays?} C’est justement cela qui m’inspire à croire que qu’il y a exagération de dénomination dans ce qu’on désigne par terrorisme. Un pays qui vit dans le terrorisme se mobilise à l’intérieur et à l’extérieur. Le gouvernement devrait avoir déjà fait appel à la solidarité de la communauté internationale et à des professionnels de la lutte contre le terrorisme et le bioterrorisme. Comme je suis avocat dans ce dossier, il y a des gens de l’extérieur qui m’appellent tout le temps pour me demander le climat qui règne au Burundi, les dangers qu’il y a, s’il y a beaucoup de morts, s’il y a de la terreur à cause des gens qui sont poursuivis sur base des faits qui leur sont reprochés. Cela veut dire qu’entre la situation et le contenu de ces dispositions, il y a un décalage réel. Même si ces personnes étaient coupables, je dirais qu’il y aurait eu des vols, de destructions. {Le gouvernement indique que la situation sécuritaire est bonne et en même temps des personnes sont accusées d’avoir participé aux actes de terrorisme. N’est ce pas une contradiction ?} Effectivement, on dit que la situation sécuritaire est globalement bonne. En cette fin d’année, on se félicite du travail qui a été accompli. Normalement, dans un pays où il y a le terrorisme, la situation s’aggrave. On voit la mobilisation des citoyens, on interdit les groupements et les voyages. {D’après vous, pourquoi est-ce que ce sont en général les membres du parti FNL qui sont arrêtés ?} Est-ce qu’ils sont poursuivis parce qu’ils sont membres des FNL ? On le verra au cours de l’instruction parce que je ne peux pas encore préjuger. Mais que le terrorisme soit le fait des membres des FNL ou des individus, cela sera l’objet à démontrer. Mais cela sera le rôle du ministère public de convaincre les juges et nous, la défense, nous allons jouer notre rôle. Mais d’ores et déjà, j’ai comme impression que la qualification des actes qui leur sont reprochés ne correspond pas au terrorisme tel qu’on en parle dans la loi pénale burundaise. {Avez-vous peur des pressions sur la justice ?} Evidemment, ce dossier ne pourra pas échapper à l’environnement actuel. Cela est à craindre car des injonctions et difficultés peuvent venir. Quand on voit comment les juges se comportent et comment ils gèrent les dossiers, cela n’est pas à écarter. Déjà dans le dossier de Cankuzo, nous avons introduit une requête de suspicion des juges parce qu’ils ne s’acquittent pas convenablement de leur devoir de juges. {Quel appel lancé envers ces juges ?} Qu’ils jugent en âme et conscience les affaires qui leur sont soumises. Ils ne peuvent avoir de limite que la science et la conscience. Qu’ils jugent correctement en ayant uniquement pour référence la loi. Quant aux injonctions, elles sont contraires à ce que veut la loi et les juges le savent eux-mêmes.

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