A peine 17 ans, elle est la seule karateka burundaise ceinture noire à cet âge. Pour un sport qui demande autant de sacrifices et d’efforts, une singularité. Portrait.
Regard impassible, le cœur qui bat la chamade, kimono tout mouillé…L’image qui reste d’une Vedernicova au sortir de son kata, une sorte de simulation de combat.
C’est samedi 07 décembre. A cet instant, des applaudissements fusent de partout dans le grand Dojo national. Le moment d’esquisser leur habituel salut qui marque la fin d’une démonstration, Anna Vedernicova est toute émue.
Seul hic : elle ne réalise pas qu’elle vient de passer avec brio la ceinture noire.L’apothéose pour tout karateka digne de ce nom, mais, plus que tout, une preuve que même dans le sport féminin,« aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années ». Pour elle, le moment de se remémorer tous ces plaisirsgâchés à la quête de ce précieux sésame.
«Une route parsemée de tant d’embûches», confesse- t-elle. A 5 ans, la gamine étonne tout le monde par son courage. Ce qui est une simple occupation pendant les grandes vacances devient son obsession. Pour mieux s’occuper durant les vacances, raconte Alexandre Vedernicova, son père, nous l’avons fait inscrire dans le club de son école, Zanshin Karaté Club.Un coup de foudre pour la jeune Burundo-russe.
Difficile de la mettre de travers. Elle cumule les heures d’entraînement. « Même quand c’était le temps des plus grands, elle voulait en faire partie », se souvient Christophe Nkurunziza, à l’époque président du club Zanshin.
A la manière de quelqu’un qui doit manger pour rester en bonne santé, le karaté s’invite dans son quotidien. M. Vedernicov témoigne que plusieurs fois, il a été contraint de revoir son agenda « au risque qu’elle ne rentre pas tard pour réviser ses notes, je devrais attendre pour qu’elle termine son entraînement».
Une envie de toujours faire mieux
A cette philosophie d’avoir « un esprit sain dans un corps sain », confie son coach, une propension de briser les barrières. En témoigne, son goût de se mesurer aux garcons de son âge en kata.
De par son physique plutôt frêle, à peine 1m70 pour seulement 50 kg, Anna Vedernicova est une source d’inspiration. Outre ses amies de l’école, après l’avoir vue, ont commencé à pratiquer le karaté, ses aînées dans le club Zanshin et en équipe nationale.
« A première vue, sa rapidité dans l’exécution des mouvements et sa concentration durant les combats te laisse pantois », fait savoir Gilbert Havugimpundu, coach de l’équipe nationale.
Et malgré un palmarès garni (plus de 15 médailles glanées en tant que championne chez les cadets, ndlr) et le début des études universitaires, elle confie avoir encore soif. «Le karaté féminin burundais n’a encore rien donné au pays.Il faut continuer à travailler. » Et avec les JO de 2020 à Tokyo en vue, poursuit-elle, c’est une autre source de motivation.
D’après elle, l’occasion pour le gouvernement de faire feu de tout bois afin que la Febuka (Fédération burundaise de karaté) ne rate aucune compétition qualificative pour cette échéance incontournable du sport mondial. Anna est cadette d’une famille de trois enfants. Elle est burundo-russe de par sa maman qui est burundaise.