Après avoir retrouvé sa fille, Nadine Nahimana reçoit presque chaque soir des coups de fils anonymes depuis octobre 2011. Elle craint pour sa vie et celle de ses deux enfants. <doc1971|left>Jeudi 10 novembre, à 14 heures. Tout le monde est affolé dans cette parcelle de Kanyosha, tout près du nouveau pont dit de la 12ème avenue. Des amis arrivent, qui en voitures, qui à pieds dans la famille de Gad Niyonkomezi et son épouse Nadine Nahimana. Le chef de ménage n’est pas au pays et Mme Nahimana a peur : « Comme hier, je reçois presque chaque jour des menaces téléphoniques. Je vit terrifiée depuis qu’on a retrouvé notre petite fille qui avait été kidnappée », raconte-t-elle, d’une voix tremblotante. Ce sont tantôt des femmes, tantôt des hommes qu’elle entend au bout du fil : « Ils appellent souvent le soir et j’ai peur qu’ils viennent la nuit enlever encore une fois ma fille. Je fais des cauchemars chaque fois que ces terroristes raccrochent », ajoute Mme Nahimana qui souligne avoir déjà parlé de cette situation aux autorités communales sans succès. Ce qui lui fait encore peur, c’est que deux grandes filles (la vingtaine), Appoline et Nadine ainsi que la bonne de la petite, appréhendées et placées en garde-à-vue au Bureau spéciale de recherche, viennent d’être relâchées avant l’aboutissement de l’enquête. Le début du cauchemar En fait, la petite Ange Erlode Iradukunda avait disparu le 26 octobre, tôt le matin à 8h30min alors que sa mère venait de quitter le domicile pour se rendre au travail. Appoline et Nadine ainsi que la bonne de la petite ont alors organisé l’enlèvement: « Elle ( la bonne) m’a transportée sur une moto », explique d’une voix candide Enge Erlode (2 ans 6 mois) dans les bras de son oncle maternel venu réconforter la famille. Selon l’oncle, les ravisseuses ont été retrouvées par la police au quartier Gisyo (Commune urbaine de Kanyosha) le même jours vers 14 heures: « Après un interrogatoire du chef de poste chez mon beau-frère, elles ont été placées en garde-à-vue au Bureau spécial de recherche. Malheureusement, elles ont été libérées avant même l’aboutissement des enquêtes », se plaint-il. Lui et sa sœur (la mère de la petite) pensent qu’il existe dans la ville de Bujumbura un réseau de kidnappeurs car, précise-t-il, il s’agit du troisième cas dont il est au courant: « J’ai suivi à la radio, avant hier, que deux enfants avaient été aussi enlevés à Kamenge (nord de Bujumbura). » La rançon Il n’est pas le seul à soupçonner l’existence d’un réseau. Une voisine parle de femmes de ménages, communément appelées bonnes, qui se seraient organisées pour simuler des enlèvements afin de rançonner les familles éprouvées: « La bonne planifie un enlèvement, fait comme s’il avait réellement eu lieu en emportant l’enfant chez des pseudo ravisseurs. Quelques heures après, une autre personne revient avec l’enfant en demandant 800 milles Fbu en contre-partie (Ikibonamaso) », indique-t-elle. Pour le cas de la famille Niyonkomezi, le coup n’a pas marché: « Nous avons exigé des enquêtes auprès de la fille qui nous a ramené notre enfant afin de savoir où elle l’avait trouvée et comment elle a su qu’elle devait conduire la petite exactement chez nous. On voulait donc remonter la chaîne jusqu’à savoir qui est à la tête de cette lugubre organisation. » La famille demande que la police s’investisse encore plus pour démanteler ce qu’elle prend pour un réseau de kidnappeurs qui opèrent dans la capitale burundaise.