Ils étaient plus d’une vingtaine à prendre part à un débat organisé à Nyanza-Lac du 29 au 30 août par l’ONG La Benevolencija pour définir des stratégies de communication sur le traitement de l’histoire douloureuse du Burundi. C’est notamment la production de l’information sur le processus en rapport avec les mécanismes de justice transitionnelle et sur le passé conflictuel.
Plusieurs experts dont des juristes, des historiens, des psychologues et sociologues ainsi que des délégués de plusieurs organes comme le Conseil national de la communication (CNC) et la Commission nationale indépendante des droits de l’Homme (CNIDH) qui suivent de près le travail des médias, ont pris part à ce débat.
Selon Fr. Emmanuel Ntakarutimana, président du CNIDH, il faut que les Burundais puissent modeler avec sagesse la gestion des mémoires blessées pour refonder de bonnes relations sociales en articulant le couple « vérité » et « justice » pour le bénéfice de la réconciliation. D’après lui, il faut « développer notre mémoire comme un souvenir stratégique à cet effet pour que nos enfants, nos petits enfants et nos arrière-petits-enfants vivent ensemble dans la paix. »
Car « les conflits qui jalonnent l’histoire récente de notre pays ont été d’une profondeur inouïe. Le processus de paix devra en prendre la mesure pour enraciner la renaissance nationale sur un socle de fond. Notre mémoire devra être stratégique. Les blessures et les humiliations du passé ont un long impact sur la mémoire des populations », fait-t-il savoir.
Pour Fr. Emmanuel Ntakarutimana, les conflits armés, les dictatures, les désastres humains et les violations massives des droits humains ont un long impact sur les archives mentales des populations. « C’est ainsi qu’ils peuvent même conduire au cercle vicieux de la violence. Les bourreaux d’hier peuvent avoir été des victimes d’avant-hier. Les bourreaux d’aujourd’hui peuvent avoir été des victimes d’hier», avertit le président de la CNIDH. Il invite les Burundais à se décider afin de casser le cercle vicieux de l’engrenage de violence.
Selon Johan Deflander, représentant de l’ONG La Benevolencija, communiquer sur le passé est incontournable et c’est même un devoir important. Au cours des échanges, les juristes et les communicateurs conviés à ce débat pour arrêter des stratégies pour le traitement du passé par les médias, ont proposé aux journalistes appelés à effectuer ce travail de se spécialiser afin d’avoir des notions substantielles en matière de droit et de justice transitionnelle. Il leur a été recommandé de renforcer leurs capacités en investigation, en analyse et surtout il leur a été demandé de revisiter l’éthique et la déontologie de leur métier pour connaître leurs droits et leurs devoirs. Les journalistes intéressés par le traitement du passé ont été appelés à avoir des notions sur les droits des accusés, des victimes et à acquérir des connaissances sur les instruments juridiques nationaux et internationaux.
Les psychologues ont insisté sur la responsabilité des journalistes dans la livraison de l’information. « Il faut éviter de culpabiliser, de traumatiser ou de »victimiser’’ de nouveau les personnes éprouvées. Il faut se garder de tenir des propos pouvant attiser la haine ».
Les historiens ont recommandés aux journalistes intéressés par le traitement du passé de s’imprégner de la rigueur dans le choix des sources, de la documentation, des témoins et pouvoir combiner mémoires individuelles et récits d’historiens avec tact tout en séparant les faits et les opinions.
Pour accompagner les producteurs d’articles, d’émissions ou de documentaires sur le passé, les régulateurs des médias demandent qu’il y ait une sorte de code de conduite et que la sécurité des journalistes, des victimes et des auteurs présumés soit garantie : « Il faut pour cela réunir tous les partenaires pour harmoniser les points de vue sur la vérité recherchée et la réconciliation voulue », notent-ils.
Malheureusement, beaucoup de journalistes ne sont pas suffisamment instruits pour saisir tous ces conseils très utiles. Et la sagesse ? Très peu en ont. Qui va canaliser et encadrer ces « self-made » ? Avec la CVR, les élections 2015, je pense que la tâche du CNC sera plus difficile qu’avant.
Il ne faut pas chercher à réinventer la roue… La pauvreté et même la guerre ne sont pas des fatailtés. A ce juste titre, certainement qu’on ne peut pas copier les autres, mais l’expérience des autres pays dont certains qui ont été les plus dévasté par la guerre sont aujourd’hui parmi les plus avancés peut nous inspirer à maints égards.