Par Jean-François Bastin*
Chère Agnès, chère Christine, cher Egide, cher Térence,
Votre détention est une honte pour le Burundi. Vous n’êtes pas complices d’atteinte à la sûreté de l’Etat, vous êtes tout simplement des journalistes.
Votre métier consiste à établir les faits et à vérifier les informations qui vous parviennent. C’est ce que vous avez fait le 22 octobre. Ce jour-là, alertés par des bribes d’informations sur des affrontements en province de Bubanza, vous avez été sur place pour tenter d’établir la réalité des faits qui vous étaient rapportés : leur déroulement, la provenance des assaillants, le nombre et l’identité des morts et des blessés éventuels, les mesures de sécurité, etc. Bref, de l’enquête de terrain, du journalisme. Vous avez été aussitôt jetés au cachot. Aucune « complicité », aucune « atteinte » dans tout cela, juste l’exercice d’une liberté garantie par la Constitution et d’un métier censé être protégé par le CNC. La loi de 2018 définit clairement en son article 7 les missions du CNC : « Garantir l’indépendance, notamment en matière d’information, des médias publics et privés ; garantir l’accès aux sources d’information ». C’est la loi, mais qui la lit, qui la respecte ? Pas le CNC en tout cas.Il n’y a pas de logique, comme il n’y a pas de justice dans cette affaire : seulement la volonté d’empêcher la presse d’exister, l’information de circuler, les faits d’être connus de tous. L’ennemi des pouvoirs totalitaires est la vérité.
A vous tous, courage, salut fraternel, et merci à Abbas pour ses mots si forts : « Chacun choisit sa manière d’entrer dans l’histoire »… Une manière glorieuse pour vous, honteuse pour eux.
*Jean-François Bastin est journaliste.Il a travaillé à la RTBF (télévision Belge) pendant plus de 28 ans en tant que journaliste et réalisateur de documentaires. Il a couvert la région des Grands Lacs pendant plusieurs années et connaît bien le Burundi.