La Commission technique de sécurisation et de la navigation lacustre se dit prête à en découdre avec l’usage du matériel prohibé dans la pêche, les installations des sites de pêche clandestins, etc. Iwacu a rencontré Gérard Nyandwi, son président.
Depuis juin 2017, une opération de saisie et de destruction du matériel prohibé dans la pêche a été lancée. Son bilan ?
Après des séances de sensibilisation, nous avons déjà saisi plus de 300 pirogues, plus de 1500 moustiquaires destinés auparavant à la lutte contre la malaria, mais utilisés aujourd’hui dans la pêche. D’autres objets prohibés ont été saisis, dont plus de 800 filets maillants, Imitimbo (objets prohibés et fabriqués localement) et des pagnes. Ces filets maillants viennent de la RDC.
Quelles sont les conséquences de ces pratiques?
Elles sont très néfastes. Par exemple, 1 kg d’alvins (umugara) donne six tonnes de poissons en six mois seulement. Et les filets maillants, les pagnes, les moustiquaires ramassent les œufs dans les zones de frayères sans parler des Imitimbo qui entraînent le pourrissement des poissons. Du coup, la production du poisson a diminué. Sur les marchés, 1kg de Ndagala est vendu actuellement à plus de 30.000BIF, celui du poisson type Mukeke à plus de 20.000BIF.
Et en dehors de la pêche ?
Le constat est que ces pêcheurs illégaux collaborent avec les bandits utilisant des armes à feu pour voler les moteurs, les batteries appartenant aux pêcheurs légaux. Ils facilitent également la fraude et servent de relais pour faire entrer les armes dans le pays.
Est-ce que l’opération vous a-t-elle été facile ?
Elle n’a pas du tout été facile, malgré la sensibilisation. Il y a toujours des récalcitrants qui créent des sites de pêche clandestins. En outre, les administratifs à la base, les forces de l’ordre basées sur la côte du lac n’ont pas totalement collaboré.
Qu’en-est-il des sanctions ?
Les sanctions sont prévues dans le Code de transport et de la navigation lacustre, la loi sur la pêche et l’aquaculture. Des textes d’application et des ordonnances ont été signés. Et les concernés en ont eu connaissance, lors des séances de sensibilisation. Leurs copies ont été données aux représentants des pêcheurs, aux administratifs et aux forces de l’ordre.
Ainsi, en plus de la destruction du matériel saisi, les utilisateurs ont été également sanctionnés. Les amendes vont de 250 mille BIF à 2 millions BIF. Et nous leur rappelons qu’un emprisonnement de 6 mois à deux ans est prévu dans ces textes. Pour le moment, nous avons surtout privilégié le paiement d’une amende, mais bientôt nous allons passer à l’emprisonnement.
Votre message aux concernés ?
Notre commission est chargée de la sécurisation sur le lac. Nous sommes engagés à sévir contre les pêcheurs illégaux et clandestins. Nous leur demandons de joindre les sites légaux. Qu’ils prennent aussi conscience du danger. En effet, avec ce matériel prohibé, ils sont en train de détruire « leurs champs ». Demain, ils n’auront plus de poissons. Le lac Tchad n’a plus de poissons aujourd’hui alors qu’il était poissonneux.
Et au Burundi, si les choses continuent ainsi, le Lac Tanganyika connaîtra la même situation. Et quand ils sont attrapés, ces pêcheurs perdent énormément d’argent, les pirogues coûtant cher. Qu’ils se ressaisissent, sinon nous sommes déterminés à sévir contre la pêche illicite pour sauvegarder notre patrimoine.
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