Réaccréditation de la Cnidh au statut A, embuscades à Muramvya, découverte de cadavres ici et là, cas de viol sur mineures et d’assassinat entre conjoints, désengorgement des prisons, etc. Sixte Vigy Nimuraba, président de la Commission nationale indépendante des droits de l’Homme fait le point.
Qu’est-ce que la Cnidh va gagner après sa réaccréditation au statut A?
La Commission va gagner en termes de crédibilité parce que si vous n’avez pas le statut A, vous allez travailler sur injonction des organes étatiques, ou même d’autres personnes et organisations.
Avec le statut A, c’est une preuve que vous faites de votre mieux pour essayer d’être guidé par les principes de Paris – faire preuve d’indépendance – pour contribuer dans la protection et la promotion des droits de l’Homme dans le pays.
Par ailleurs, nous serons en mesure de participer à toutes les réunions qui impliquent les institutions des droits de l’Homme. Avec le statut A, nous pourrons faire partie des organes dirigeants chaque fois que de besoin.
En termes de partenariat, il nous sera facile d’avoir des partenaires et de faire des travaux en synergie avec des organisations internationales.
Et pour le Burundi ?
Au niveau étatique, le pays qui a une commission avec le statut A est reconnu pour les efforts en ce qui est du respect de droits de l’Homme parce qu’il n’y a pas une main derrière des organisations pour dicter quoi faire et comment intervenir.
Cela montre aussi une intention de mieux faire parce que le respect des droits de l’Homme est un travail de tous les jours. C’est-à-dire que vous avez l’intention d’améliorer la situation des droits de l’Homme, tout en respectant les intervenants dans ce domaine.
Qu’est-ce que vous avez fait pour mériter cette crédibilité ?
Ce sont nos réalisations. Nous avons toujours dit que ce sont les activités bien faites qui vont guider l’équipe des commissaires et les cadres. Nous avons dit que nous n’allons pas courir derrière le statut mais que nous allions être au service de la population burundaise en intervenant très rapidement chaque fois que de besoin en cas de violation des droits de l’Homme.
Nous avons essayé de travailler en toute indépendance en nous attaquant à tous les problèmes en rapport avec les droits de l’Homme. Et les médias ont été témoins de nos différentes interventions ici et là en faisant des enquêtes pour prendre des décisions bien réfléchies.
Dernièrement, des malfaiteurs ont tendu des embuscades à des véhicules causant des morts et des blessés sur la route Bugarama- Gitega dans la province Muramvya. Avez-vous diligenté des enquêtes ?
Nous ne sommes pas ici pour faire des enquêtes en rapport avec les crimes de droit commun. Ces derniers sont punis par la loi burundaise. Nous avons la police, la justice, l’administration. Chacun doit faire son travail. Nous pouvons nous impliquer si nous voyons que le gouvernement ne fait rien pour protéger la population ou si les enquêtes ne sont pas menées. Or, nous avons appris que les enquêtes sont en cours. La Cnidh ne peut pas s’y impliquer.
Il faut qu’on différencie les crimes de droit commun et les violations des droits de l’Homme. Le Burundi a un arsenal juridique (le code pénal, le code de procédure pénale) pour faire face à ce genre de situation.
Il y a des dossiers qui pèsent sur le procureur de la République dans la province Bururi et l’administrateur de la commune Buganda. Est-ce que la Cnidh s’est saisie de ces deux cas ?
Un dossier judiciaire a été ouvert à l’endroit de ces personnalités. Lorsque nous faisons un suivi et que nous voyons que la justice a pris en main l’affaire, nous ne nous inquiétons pas. L’essentiel pour nous est que personne ne soit au-dessus de la loi. Il faut que chacun réponde de ces actes sans distinction aucune.
Un message aux uns et aux autres…
Nous lançons un appel vibrant aux organes habilités à garantir la sécurité pour tout citoyen. Les organes compétents doivent mener des enquêtes pour punir les coupables. Nous devons mettre fin à l’impunité. Nous ne devons pas rester les mains croisées. Il faut toujours des actions de la part des institutions étatiques.
Des cas de viol sur mineures prennent une allure inquiétante….
Nous sommes aussi au courant de cette situation. Nous sommes en train de faire des itinérances judiciaires pour des cas répertoriés dans la province Kirundo. Nous apportons une assistance judiciaire aux cours et tribunaux pour pouvoir accélérer les dossiers. Nous avons été tristement surpris de constater qu’il y a un nombre alarmant de cas de viol.
Et comment y remédier ?
Nous sommes en train de réfléchir avec l’équipe des commissaires pour voir comment effectuer des visites sur le terrain. Nous allons nous entretenir avec les magistrats, les responsables administratifs et même la population pour en apprendre davantage sur les présumés auteurs et les mobiles. Nous devons en savoir la genèse et nous allons nous prononcer après avoir épuisé toutes les enquêtes.
Des cas d’assassinat entre conjoints prennent aussi de l’ampleur. Comment expliquez-vous ce phénomène ?
C’est triste d’assister à ce genre de crime. Mais, il faut reconnaître que nous sommes dans un pays qui sort d’une série de crises. Il y a des gens qui ont été blessés par ce passé douloureux. Des gens ont été traumatisés par ces événements sanglants qui se sont abattus sur le Burundi. D’autres sont blessés par ce qu’ils ont fait.
La société ne peut pas être guérie dans un cours laps de temps. Il faut mener des actions de détraumatisation des bourreaux et des victimes. Il faut initier des activités de sensibilisation de la population vers un changement des mentalités pour plus de respect des droits humains en général, et du respect du droit à la vie en particulier.
Des détenus se lamentent du retard mis dans le traitement de leurs dossiers. Que comptez-vous faire ?
Nous avons déjà fait quelque chose. Nous avons plaidé pour le désengorgement des milieux carcéraux. Nous allons continuer notre plaidoirie pour la mise en application effective du travail d’intérêt général comme une alternative à la peine d’emprisonnement.
Nous allons renforcer et multiplier les itinérances judiciaires pour raccourcir les délais d’attente. Nous sommes en train d’approcher certains bailleurs pour un soutien aux magistrats pour qu’ils accomplissent leur travail dans un temps raisonnable.
Nous avons apprécié cette innovation de digitalisation des données sur la population carcérale. Elle sera bénéfique pour les détenus et tous les intervenants en matière de détention.
Propos recueillis par Félix Haburiyakira
Merci pour les informations que vous nous donnez. Mais il faudra faire encore en effort pour corriger les fautes d’orthographe pour
Vous différencier de certains média étatiques. Merci
Merci pour votre commentaire
L’auteur du papier va vous lire certainement.
C’est une critique constructive
Antoine Kaburahe