Le braconnage prend une allure inquiétante dans le Parc National de la Rusizi. Tous ses animaux sont ciblés. Rencontre avec Claude Ndayishimiye, responsable de cette aire protégée.
Quelle est la situation du braconnage dans la Rusizi ?
Très alarmante. Nous observons des cas de braconnage de grande envergure. Par exemple, nous avons trouvé une antilope tombée dans un piège. Heureusement, nous l’avons sauvée. Elle traînait une corde métallique autour du cou et portait de profondes plaies. Avec notre service de santé animale, nous l’avons soignée.
En outre, nos crocodiles sont menacés. Deux sont tombés récemment dans des pièges. Comme ils sont adultes, ils ont pu se sauver, mais sont partis avec des fils barbelés qui ne cessent de s’enfoncer dans leur chair. Une situation dangereuse pour leur santé.
Qu’est-ce vous êtes en train de faire pour les secourir ?
C’est une situation difficile à gérer. Les crocodiles sont des animaux dangereux. On ne peut pas s’approcher d’eux, si on n’a pas pu les assommer ou les endormir. Dans d’autres pays, ils ont des moyens pour le faire avec des substances adaptées pour réaliser des anesthésies. Mais par nos moyens rudimentaires, nous avons pu sortir de l’eau l’un d’eux, lundi 27 août. Nos éco-gardes ont fait un travail louable. Ils ont pu lui enlever les fils barbelés de son cou. Il est actuellement sous traitement.
Qui sont les auteurs ?
Ce sont les riverains et les Congolais qui chassent surtout les antilopes, pour le commerce de la viande sauvage.
Par exemple, un crocodile de quatre à six mètres se vend facilement à dix millions BIF. D’autres capturent des petits crocos pour les vendre chez les privés. Et aujourd’hui, plus de 50 crocodiles sont élevés en captivité à Gatumba, dans différents bars, etc.
C’est vraiment déplorable que des individus gardent chez eux des animaux sauvages. Dans tout le parc de la Rusizi, il ne nous reste que deux ou trois crocodiles. D’où la nécessité et l’urgence d’une opération de grande envergure pour les ramener dans leur biotope.
Tous les animaux sont-ils ciblés par les braconniers ?
Dans notre parc, nous avons des crocodiles, des hippopotames, des antilopes et des oiseaux tant migrateurs que sédentaires. Parmi ces derniers, certains pèsent 20 kg et plus. Tous sont menacés, mais il y a un léger mieux chez les hippopotames. Depuis le début de l’année, nous n’avons enregistré que trois animaux tués.
Quid de la loi pour protéger ces animaux ?
Il y a des lois nationales, internationales ou des traités que le Burundi a ratifiés régissant l’environnement ou spécifiquement la biodiversité. Citons le code de l’environnement, le code forestier, la loi sur les aires protégées, la CITES (convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction), etc.
Et quels sont vos besoins pour bien contrôler ce parc ?
Les éco-gardes sont insuffisants. Nous avons besoin d’autres agents, jeunes et vigoureux capables de parcourir 10.673 hectares. Les équipements sont presqu’inexistants. Nous avons besoin d’un véhicule, de deux motos, de moyens de communication et de défense contre les malfaiteurs. Cela nous permettrait de mener des patrouilles nocturnes. Qu’on nous accorde aussi un bateau de surveillance dans les zones lacustres et un effectif suffisant pour le personnel patrouilleur.
Ailleurs, ils ont déjà compris l’importance de tels animaux qui tombent souvent malades et ont besoin de soins. S’ils veulent immobiliser un animal ou l’endormir, ils ont des moyens adaptés. Nous avons besoin de financements pour la bonne marche de nos activités.