Les coopératives Sangwe totalisent plus d’une année d’existence. Quel est l’état des lieux ? Quid du suivi quant à leur gestion ? Qu’adviendra-t-il d’une coopérative qui sera insolvable? Eclairage avec Roger Ngabirano, directeur chargé de la promotion d’appui assistance aux sociétés coopératives au sein de l’ANACOOP.
Quel est l’état des lieux des coopératives « Sangwe », après plus d’une année de fonctionnement ?
L’initiative de créer ces coopératives émane du gouvernement. Elles ont été créées dans le but de booster la production. Elles ont d’abord élaboré des projets avant de bénéficier des 10 millions de la part du gouvernement. Ces coopératives sont éparpillées sur 3021 collines de recensement et dans les quartiers. Elles sont à l’œuvre.
A qui revient le suivi quant à la gestion de ces coopératives ?
Au niveau local, le fonctionnement et la gestion de ces coopératives reviennent aux coopérateurs eux-mêmes. Au niveau national, par souci de l’encadrement et du suivi, le gouvernement du Burundi a jugé bon qu’il y ait une agence de promotion et de régulation des sociétés coopératives. Le gouvernement venait de sensibiliser la population à créer ces coopératives. Bref, c’est l’Agence nationale pour la promotion et la régulation des sociétés coopératives au Burundi (ANACOOP) qui assure l’encadrement de ces coopératives.
Est-ce que les membres de ces coopératives ont été formés quant à leur gestion?
Notre tâche principale est d’effectuer des descentes sur terrain pour encadrer ces sociétés coopératives. Leurs membres bénéficient du renforcement des capacités de la part de l’ANACOOP. Nous avons adopté une stratégie d’envoyer les cadres de l’ANACOOP au niveau de chaque province pour les encadrer.
Y-a-t-il un plan d’affaire interne pour ces coopératives et un règlement d’ordre intérieur leur permettant de gérer au quotidien leurs avoirs ?
Il faut savoir que parmi les documents exigibles pour une société coopérative, il y a des documents de gestion de leurs projets et de l’organisation interne. Ces coopératives s’inspirent de leurs statuts pour établir leurs règlements d’ordre intérieur. Nous les sensibilisons toujours à avoir ce document pour une bonne gestion interne. Par ailleurs, toute société commerciale doit avoir au préalable un plan d’affaire. Je peux affirmer que la plupart des coopératives ont un plan d’affaire pour le suivi de leurs investissements.
Mais certains disent qu’elles ne sont pas bien encadrées et donc qu’il y a risque de faillite…
L’ANACOOP est là pour les encadrer. Peut-être que ceux qui le disent reçoivent des informations qui n’émanent pas de sources fiables. Mais il peut y avoir des coopératives qui sont mal gérées suite à un comportement qui n’est pas approprié de leurs leaders. Mais ce n’est pas par manque d’encadrement.
Quel sera le mode de remboursement des fonds reçus et avec quel taux d’intérêt ?
Les gens ne sont pas bien informés. Il n’y aura pas d’intérêts. Quant au mode de remboursement, il y aura un compte qui sera ouvert par le ministère des Finances où ces emprunts seront versés.
Quelle sera la suite réservée à l’une ou l’autre coopérative qui sera incapable de rembourser ?
S’il advient qu’une coopérative soit insolvable, nous allons d’abord mener des enquêtes pour établir la responsabilité.
Concrètement….
Nous allons chercher à savoir si les difficultés ne sont pas dues aux aléas climatiques ou si cela incombe à la mauvaise gestion des coopérateurs. S’il advient que la responsabilité incombe aux coopérateurs, les organes compétents vont appliquer la loi pour que les emprunts retournent dans les caisses de l’Etat.
Des mesures de redressement en cas de faillite ?
Je pense bien qu’il y en aura. Le gouvernement tient à cœur ces groupements. Il ne pourra pas permettre qu’une coopérative tombe complètement en faillite alors qu’il y a des organes en charge de la promotion et de la régulation de ces coopératives. A moins qu’il soit établi que cette coopérative est totalement incompétente mais je pense que ce risque pourra être évité.
La plupart de ces coopératives opèrent dans l’agri-élevage et il y a risque de surproduction. Quid du marché d’écoulement de ces produits ?
Nous n’en sommes pas encore-là. La vision du gouvernement est d’abord d’avoir une production suffisante avec pour slogan« Que chaque bouche ait à manger et chaque poche ait de l’argent ».
S’il advient qu’il y ait la surproduction, l’ANACOOP va intervenir conformément à l’article 5 de loi qui la régit et qui lui ordonne « de structurer et de développer des débouchés nationaux, régionaux et internationaux des sociétés coopératives pour des filières qui en expriment le besoin ». Je pense que ces coopératives vont venir auprès de l’ANACOOP pour voir comment elles sont connectées aux marchés d’écoulement.
Par ailleurs, le décret présidentiel portant gestion de la production agricole, animale et halieutique commercialisable se réfère aussi à la loi régissant l’ANACOOP. Je pense qu’il y aura des textes d’application définissant les relations et les textes entre l’ANACOOP et l’Agence Nationale de Gestion de Stocks et de Sécurité Alimentaire (ANAGESA).
Nous allons vulgariser ce décret pour que les coopérateurs soient rassurées que leurs produits vont être vendus. Nous allons établir des manuels de procédure entre l’ANACOOP et l’ANAGESA. Le gouvernement a le souci que la production ne pourrisse pas. Cela va encourager d’autres producteurs agricoles à augmenter la production.
Les partis de l’opposition, dont le Cnl, se lamentent comme quoi leurs militants n’ont pas été associés à ces coopératives. Qu’en dites-vous ?
Je ne suis pas au courant de ces lamentations parce qu’on n’a pas de grogne qui nous soit parvenue à l’ANACOOP. Je pense que ces lamentations ne sont pas fondées parce que les sociétés coopératives revêtent un caractère inclusif. Mais il y a d’autres sociétés coopératives qui rassemblent toutes les sensibilités politiques. Je citerai une société coopérative qui réunit les jeunes des partis politiques dans la province Ngozi. Je pense que les gens pourront s’inspirer de ce bel exemple pour mettre fin à ces accusations.
Propos recueillis par Félix Haburiyakira