Vendredi 22 novembre 2024

Politique

Interview exclusive :« Après les élections, la vie continue »

25/10/2019 Commentaires fermés sur Interview exclusive :« Après les élections, la vie continue »
Interview exclusive :« Après les élections, la vie continue »

A l’approche de 2020, des cas d’intolérance politique sont signalés ici et là dans le pays. Ngozi n’est pas épargnée. Rencontre avec Albert Nduwimana, son gouverneur, qui revient aussi sur d’autres aspects de la vie de sa province.

Comment se porte la cohabitation entre les partis politiques  à Ngozi?

Notre province a une particularité. Nous avons environs 15 partis politiques. La cohabitation y est bonne.

Ainsi pas de conflit?

Quelques cas ont été observés surtout entre les jeunes du Cnl et du Cndd-Fdd à Nyamurenza, Gashikanywa et Kiremba. C’était beaucoup lié à l’ouverture des permanences. Actuellement, la situation est calme.

Comment avez-vous pu les résoudre ?

Depuis août, des réunions ont été organisées entre les partis politiques. Elles se tenaient une fois en deux semaines au niveau provincial, communal et collinaire. Nous avons demandé aux administratifs à la base qu’en cas de conflit, il faut mettre ensemble toutes les parties et enquêter avant de prendre une décision. Ce qui a mis fin aux mensonges.

Quid de la question de l’ouverture des permanences ?

Nous avons tenu une réunion le 28 août avec les responsables des partis. Nous avons alors fixé la distance qui doit séparer ces permanences, déterminé les emplacements appropriés au niveau collinaire, des quartiers, etc. D’autres mesures ont été prises pour éviter les affrontements.

Par exemple ?

Nous avons constaté que les conflits se passent loin des permanences ou du lieu des réunions. Désormais, si la réunion doit se tenir sur telle colline, il faut que seuls les natifs y prennent part. Idem pour la commune et la province. S’il y a des invités, ils doivent être mentionnés dans la lettre d’information adressée à l’administration. La clôture des activités a été fixée à 16h pour permettre aux militants de rentrer en toute sécurité. Cela concerne tous les partis politiques. Après chaque deux semaine, il y a des réunions d’évaluation de la situation sécuritaire et de la cohabitation entre les partis.

Récemment, vous avez organisé des jeux entre les membres des différents partis politiques

Oui. C’était le 4 octobre. Une journée dédiée à la réunification des partis politiques. Côté athlétisme, les membres des partis étaient autorisés de compétir arborant les habits de leurs partis. Il y a eu un match de football entre une équipe des membres des partis politiques et celle des administratifs. Pour dire qu’après les élections, les administratifs, les politiciens en compétition se retrouvent dans la vie normale. Avant ces jeux, il y a eu une marche de 2,5 km comprenant des politiciens, des administratifs. Bref, après les élections, la vie continue.

Quel était votre objectif ?

Notre but était d’initier les Burundais à participer à une compétition sans rancune, sportivement. La divergence des idées politiques ne devrait pas être la cause des conflits.

Votre appel aux autres provinces où des conflits entre les partis s’observent encore ?

Il faut comprendre qu’il n’existe pas de sécurité pour un individu ou un groupe. Un membre d’un autre parti est un partenaire. Impossible de te sentir en paix quand ton voisin est persécuté. D’une façon ou d’une autre, il veille sur ta sécurité, celle de tes biens, de ta famille. Vice-versa. Tu ne peux pas envoyer tes enfants à l’école quand ceux de tes voisins ne peuvent pas y aller. Personne ne peut dormir tranquillement alors que les autres sont en train de fuir, d’être persécutés. Après avoir compris cela, les conflits deviennent rapides à résoudre pacifiquement.

Ngozi se développe aussi ?

Elle est sur une bonne lancée. On y trouve de belles infrastructures. Plus de 90% des routes reliant les communes sont bonnes et praticables. La production y est bonne, que ce soit pour les cultures vivrières ou d’exportation surtout le café. Il y a aussi la sécurité.

Certains disent que c’est parce que le président de la République est natif de Ngozi…

(Rires). La charité bien ordonnée commence par soi-même. Avoir le président de la République comme natif est un atout. Par des projets individuels ou en groupes, d’autres natifs contribuent aussi à son développement.

D’où est venu son surnom de ‘’Dubaï ‘’ du Burundi ?

On le surnomme ainsi parce que  80% des provinces du pays s’y approvisionnent désormais en différents produits. Nous avons environ 120 importateurs qui arrivent en Chine et passent des commandes aux usines de fabrication de vêtements et de chaussures surtout. Sur le marché local, ces produits deviennent moins cher.

Malgré cet élan, des mendiants grouillent dans les rues …

C’est un problème. Des mesures ont été prises pour les ramener dans leurs familles. Même à Bujumbura, on les chasse, mais demain on les retrouve là. Certains ont fait de la mendicité leur métier. D’autres fuient leurs marâtres, sont des orphelins ou n’ont pas été scolarisés. La mendicité est difficile à éradiquer. Dans le cadre de la solidarité nationale, nous sensibilisons la population à assister ces démunis.

Depuis 2015, les relations entre le Rwanda et le Burundi se sont détériorées. Auparavant, il y avait des échanges entre votre province et les Rwandais. Qu’en est-il aujourd’hui?

La population n’a pas peur. Mais depuis cette période, les relations entre notre province et le Rwanda se sont arrêtées. Nos cultivateurs écoulent leurs produits localement. Il n’y a pas d’interdiction. Ceux qui veulent y aller doivent passer par les voies officielles. Toutes les voies clandestines ont été fermées. Les ennemis du pays pouvant entrer par-là et attaquer la province.

Quelle est la situation dans les sites de déplacés ?

A Ngozi, plusieurs communes ont des sites de déplacés. Ruhororo compte deux sites : Ruhororo et Mubanga. Kiremba aussi : Gakere et Kiremba  et Tangara a le plus grand site. Les déplacés sont calmes. Aujourd’hui, ils entretiennent de bonnes relations avec l’administration. En cas d’incident, on y va avec les responsables des partis politiques ayant des militants dans ces sites.

Propos recueillis par Rénovat Ndabashinze

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