Samedi 12 avril 2025

Environnement

Dr. J. Nsabimana : « Canaliser Gasenyi et Kinyankonge pour sauver Buterere »

08/04/2025 4
Dr. J. Nsabimana : « Canaliser Gasenyi et Kinyankonge pour sauver Buterere »

En mairie de Bujumbura, la zone Buterere, de la commune Ntahangwa est souvent touchée par des inondations. Dr Jean Nsabimana, chef du département de Science géographique, de l’environnement et de la population à l’Université du Burundi fait son analyse sur les causes et les conséquences de cette situation. Il revient aussi sur le dépotoir des déchets installé dans cette même zone.

Chaque année, nous observons des inondations dans la zone Buterere, commune Ntahangwa. Pourquoi est-elle souvent touchée ?

C’est une pire réalité. Si on essaie d’interroger les statistiques, on voit que parmi les treize zones de la mairie de Bujumbura, la zone Buterere est la plus affectée par les inondations fluviales ainsi que les inondations pluviales.

Pourquoi concrètement ?

Nous allons en tout petit peu passer sur la vulnérabilité de cette zone face à cet aléa : l’inondation. Si on essaie de voir à son amont, nous avons en haut le quartier Gasenyi vers le Palais présidentiel, les quartiers Mirango et les autres qui canalisent les eaux pluviales jusque dans la vallée de la Kinyankonge.

Si on commence vers les années 2010, on voit que le nord de Bujumbura a été fortement habité, urbanisé bien que cela ne respecte pas les règles d’urbanisme. Ce problème, avec l’occupation anarchique de la partie nord de la ville, Buterere en sort beaucoup plus perdante que les autres zones.

Car, quand on aménage une infrastructure, c’est comme imperméabiliser la zone. L’eau qui devrait s’infiltrer est canalisée par le ruissellement ou les eaux des toitures. Ce qui augmente la concentration de l’eau pluviale dans les rivières Gasenyi et Kinyankonge. En liaison avec les autres canaux, elles vont former la vallée de la Kinyankonge.
Vous constatez souvent qu’elles entrent beaucoup plus en crues après une petite averse même si la zone Buterere n’a pas eu une goutte de pluie.

Ce qui affecte la population. A chaque saison de pluies, nous verrons des maisons qui sont détruites par les inondations. On enregistre chaque fois des sans-abris. Ce qui affecte également le développement parce que cette population qui n’a plus de toits pour se loger ne peut plus produire. Elle doit vivre aux dépens des organisations humanitaires et du gouvernement.
Les rizières sont souvent très affectées par l’inondation de la Kinyankonge.

Quid effectivement de la part de la rivière Kinyankonge dans ce qui se passe là ?

Il faut d’abord noter que la rivière Kinyankonge est un mélange de plusieurs rivières : il y a Kinyankonge elle-même, Gasenyi, le canal de l’endroit dénommé ‘’Kuri main d’œuvre’’. Il y a un autre canal qui arrive jusque dans le quartier Bukirasazi II. Tout cela constitue la rivière Kinyankonge en aval.

Cette rivière est un grand défi pour la zone Buterere en général et pour certains quartiers en aval du canal qui a été construit après 2015. Malheureusement, ce dernier n’a pas été achevé. Cela devient un grand souci pour cette zone.

Depuis les années 2020, la population locale a essayé de s’adapter à ce phénomène d’inondations mais, à chaque fois, elle n’est pas arrivée à canaliser directement et correctement la rivière Kinyankonge pour qu’elle suive son canal initial.

Cela est lié à l’occupation de la ville de Bujumbura et à son urbanisation. Elles augmentent le débit de ces rivières. Bref, on a un grand torrent si bien que les simples blocages faits par la population ne peuvent pas servir à grand-chose.
C’est un défi pour le gouvernement, pour l’administration locale et pour la population.

Quelles sont les actions à mener afin de résoudre ce problème ?

Pour résoudre ce problème et pour sauver cette zone, il faut canaliser les rivières Gasenyi et Kinyankonge, jusqu’au lac Tanganyika. Cela serait très bénéfique non seulement pour la population de cette zone mais également pour celle de la ville en général. Si elle n’est pas canalisée, elle se divise en trois branches.

Sa 3e branche finit vers l’aéroport international Melchior Ndadaye. Vous avez déjà constaté que chaque fois qu’il y a de fortes pluies, elle inonde la RN5. On a vu Kinyankonge inonder ou détruire la RN4. Vous savez que la RN5 est d’une importance capitale.

Elle relie la ville de Bujumbura au seul aéroport international du pays. S’il advient que cette route soit bloquée, il y aurait un grand impact économique non seulement au niveau national mais également au niveau international.

Est-ce que vraiment Buterere est vivable ?

Je ne dirais pas que la vie est presqu’inexistante mais si on essaie de voir avec d’autres zones de la ville de Bujumbura, elle est très touchée par les inondations. Elle  connait deux types d’inondations : les inondations causées par la Kinyankonge et les inondations pluviales.

Il s’agit d’une zone qui a une faible densité des infrastructures d’évacuation des eaux pluviales. C’est presque même inexistant. Même s’il n’y aurait pas Kinyankonge, il y aurait toujours des inondations suite à ce problème.

Elle se trouve dans la zone basse où la pente est très faible par rapport à d’autres zones. Une petite averse peut causer des inondations parce que l’eau pluviale n’est pas facilement évacuée.

Est-ce que le dépotoir de Buterere ne constitue pas un autre danger pour la population ?

D’abord il collecte des tonnes de toutes les sortes de déchets : plastiques, organiques, mais également en tout petit peu métalliques. Il y a même la population qui vit aux dépens de ce dépotoir. C’est un grand problème de santé publique. Je dirais par exemple le problème de respiration vu les gaz dégagés par ce dépotoir ainsi que les feux qui sont brûlés tout au long de la journée.

Des bouteilles en plastiques rassemblées pour être recyclées

Il y a aussi des matières organiques qui, quand ils sont pourris, dégagent des déchets par l’écoulement qui sont canalisés directement vers le lac Tanganyika. Ce qui affecte sa biodiversité. Avec la pollution de ces eaux, nous sommes aussi affectés. Vous savez que Bujumbura est alimentée par le lac à plus de 90% de l’eau utilisée.
On voit qu’il y a des maisons qui sont au niveau du dépotoir. Les occupants sont plus affectés.

Que faire ?

C’est d’abord interdire les constructions tout près du dépotoir et déménager ce dépotoir vers un autre endroit. Il faut aussi penser au triage. Sélectionner les matières organiques, les plastiques, les verres et les matières métalliques. On lancerait un appel au gouvernement de mettre en avant le triage de ces déchets pour le nouveau dépotoir
A partir des matières organiques, on peut fabriquer des fertilisants agricoles. Avec les plastiques, on peut faire le recyclage et fabriquer d’autres objets. Le pays va y gagner.

Forum des lecteurs d'Iwacu

4 réactions
  1. Nsabimana zabulon

    Je vous remerciez à votre activités dans environnements.alors,nous avons soutien le projets et le programme.

  2. Il y a un constat dans tout cela. L’impression générale est que les inquiétudes des responsables administratifs aux niveaux inférieurs ne parviennent pas aux décideurs au sommet de l’État. Sinon on devrait établir les priorités. Les impôts et taxes sont collectés mais le constat est qu’ils ne profitent pas aux contribuables alors que les autorités à différents niveaux devraient être soucieuses du bien-être des gouvernés.-

  3. MANIRUMVA Janvier

    ce qui importe pour tenter de mettre fin à cette situation catastrophique de la zone Buterere,reste en premier la canalisation de kinyankonge et même des autres petits cours d’eaux qui s’y jettent puisque la preuve est celle de la rivière nyabagere, qui , récemment inondait kamenge et d’autres quartiers mais après son canalisation les dégâts sont du tout presque diminués voire même terminés.

    • Gegelesage

      il faut aussi créer une usine de traitement des déchets urbains. il ne faut surtout pas polluer le Lac.

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