Cris des membres des institutions de microfinance (IMF) et des établissements financiers sans guichets de paie. 300 Fbu par opération et par mois imposés par le ministère de la Fonction publique sont retenus sur leur argent. Le montant prélevé n’est pas énorme, selon les autorités de ce ministère.
« Nous n’en pouvons plus ! », s’écrie un enseignant qui a contracté un crédit auprès du Fonds de Solidarité des Travailleurs de l’Enseignement (FSTE). Pour lui, les supérieurs hiérarchiques de la ministre de la Fonction publique devaient prendre des sanctions très sévères à son encontre. Cette somme retranchée « injustement » sur son salaire dérisoire est un détournement pur et simple, estime-t-il. Un autre membre d’une IMF remarque que l’attitude des autorités du ministère est le résultat de l’impunité: « Je pense qu’elles sont couvertes par leurs supérieurs hiérarchiques, sinon elles seraient toutes limogées. »
Aucune nécessité de percevoir cette somme
Selon Désiré Ntavumba, directeur du comité exécutif du Réseau des Institutions de Microfinance (RIM), cet argent n’est pas peu. Dans une des IMF qu’il connaît, ils ont 12 mille personnes qui ont contracté des crédits. Il fait un simple calcul : « Puisqu’on doit verser 300 Fbu par opération et par membre, le ministère de la Fonction publique récolte mensuellement 36 millions Fbu pour une seule institution ! » Or, mentionne-t-il, le budget général de l’Etat de 2012 prévoit 51.682.495 Fbu pour tous les services rendus dans la rubrique « Droits sur services ». Et, précise le président du comité exécutif du RIM, le gouvernement devrait supprimer cette taxe « inutile », qui ne vient « qu’enfoncer les membres des IMF et établissements financiers déjà pauvres », car, pour régler la facture, ces institutions prélèvent l’argent sur le montant des clients, selon Désiré Ntavumba. Une autre IMF, selon un de ses responsables, paie plus de 100 millions Fbu par an : « De janvier à août 2011, on avait déjà payé 69 millions Fbu au ministère de la Fonction publique. »
Une somme insignifiante ?
Rose Kankindi, directrice de gestion des traitements, déclare que ce service rendu aux IMF et établissements financiers n’est pas dans les attributions du ministère. C’est une somme qui, selon elle, est attribuée aux travailleurs de sa direction qui font des opérations pour les IMF et établissements financiers en dehors de heures de service : « Pour qu’ils puissent acheter de la nourriture à midi, parce qu’ils ne rentrent pas à 15 heures comme les autres fonctionnaires de l’Etat. » Cette somme n’est pas énorme aux yeux du porte-parole du ministère de la Fonction publique, Joseph Ntakabanyura : « Un fonctionnaire qui paie annuellement 3.600 Fbu, ce n’est pas du tout alarmant. » Cependant, la directrice de gestion des traitements et le porte-parole du ministère de la Fonction publique n’ont pas dévoilé qui gère exactement ce compte, l’effectif d’employés qui bénéficient de cet argent et le montant annuel des primes payés. Ils ont parlé d’une ordonnance ministérielle qui serait signée conjointement par les ministres des Finances et de la Fonction publique qui affecte ces fonds sur le compte du trésor public. Cependant, les représentants du RIM, ceux des IMF et établissements financiers n’ont pas eu des copies, témoignent-ils.
Beaucoup de doutes
La gestion de la somme perçue suscite des doutes. Pourquoi ce compte n’est pas logé à la Banque de la République du Burundi (BRB) comme cela est d’usage ? Pourquoi les autorités du ministère de la Fonction publique n’osent pas préciser les effectifs d’employés qui bénéficient de ces primes ? Un représentant d’une IMF affirme que seule son entreprise verse plus de 100 millions par mois. Et le budget général de l’Etat prévoit plus de 51 millions Fbu dans la rubrique « Droits sur services ». Où va le reste ? Le porte-parole du ministère de la Fonction publique affirme que 3.600 Fbu perçues annuellement sur le salaire d’un fonctionnaire moyen, comme un enseignant, n’est pas un montant énorme. Faisons de simples calculs. 3600 Fbu peuvent payer le transport en commun pendant exactement 12 jours. Ou acheter 4 kg de farine de manioc. Et un jour qui passe ne revient jamais. Pour nos fonctionnaires qui vivent au jour le jour. Cette même somme peut acheter 18 morceaux de pains pour l’enfant (du moins pour ceux qui prennent encore le petit déjeuner), pendant 18 matinées. J.C B Désiré Ntavumba : « J’insiste, il faut que cet argent ne soit plus perçu »