Les pluies du dimanche 12 janvier ont laissé des maisons des quartiers Carama et Gahahe détruites. Sur les traces d’une famille éprouvée.
Une grande maison, un bon travail dans une institution publique, un mari et six enfants adorables. Thérèse était une femme comblée avant la catastrophe du 12 janvier qui a presque tout emporté dans sa maison. Aujourd’hui, c’est une maman des plus désespérées, malheureuse, rencontrée, ce mardi 14 janvier.
19h, Thérèse sort enfin de son lit où elle vient de passer toute la journée, déprimée. Elle a demandé un toit, avec son petit garçon de 3 ans, chez une amie du même quartier. Ce cadet est traumatisé. Il est en pleine crise d’asthme. Il pleure tout le temps. « Maman rentrons chez nous. Allons voir Papa… »
Thérèse se prépare, met son joli ensemble de pagne, presque le seul vêtement qui lui reste. Elle va voir ses enfants qui vivent séparément. Ils n’ont plus de domicile fixe. Elle quémande, chaque jour, un toit. Aujourd’hui, chez un voisin. Demain, chez un membre de la famille. Elle doit passer dans chaque famille pour s’assurer que les enfants ont passé une bonne journée.
« Maman où sont les autres ? » lui demande son fils. Il s’inquiète pour ses frères et sœurs. « Maman, apporte-moi une brosse à dents s’il te plaît… » 20h et des poussières, il commence à se faire tard… Elle n’a pas encore vu les autres enfants. Elle le prend sur elle et lui répond en soupirant : « D’accord mon chéri, je te l’apporte tout de suite. »
Aucune assistance
Thérèse doit aussi passer voir son mari qui est resté dans la maison inondée. Elle s’est transformée en un chantier. Elle n’est plus clôturée. La cour et la terrasse, jadis cimentées, se sont transformées en un sol détrempé et glissant. Quelques autres maisons d’à côté sont aussi détruites.
A l’intérieur de la maison, l’eau a laissé place à des amas de boue qui se sont entassés jusqu’au niveau des fenêtres. Les meubles sont détruits. « Tous les stocks de nourriture ont été emportés, il ne nous reste rien », confie cette mère, les larmes aux yeux.
L’endroit dégage une mauvaise odeur. « Probablement des poules et souris qui sont morts sous la boue », glisse le chef de famille. Ce dernier, tout trempé de boue vient de faire quelques travaux dans la maison. Au milieu des amas de boue, un petit lit de fortune. « Je suis un père de famille. Je ne peux pas quémander un toit, je dois garder la maison, malgré tout. »
Le 22 décembre dernier, ils ont vécu la même situation. Les eaux avaient envahi la maison. La famille avait même commencé à retaper la maison et acheter quelques biens qui étaient abîmés. Le matériel scolaire, des habits… Mais tout a été emporté de nouveau. La maîtresse de maison affirme qu’ils avaient déjà utilisé environ 400 mille BIF.
D’après le mari, quelques ménages avaient réussi à louer une machine pour enlever les amas de boue dans les rues. Les travaux avaient commencé, le même dimanche des intempéries. « Tout est encore détruit», désespère-t-il.
Cette famille affirme que la Croix-Rouge et certaines ONG sont passées par là. Mais aucune action.
Une bombe à retardement…
Cette maison, l’une des plus touchées par les inondations, se trouve à quelques mètres du caniveau où coule la rivière Gasenyi. Profond d’1m 80, d’après Thérèse, ce caniveau est rempli de sable et de cailloux. Or, quand la pluie tombe, le caniveau était censé transporter les eaux vers le bassin construit à quelques mètres. Mais désormais les eaux dévient vers les maisons d’à côté.
Ces victimes confient qu’une commission avait été nommée pour s’occuper du curage de ce caniveau. Mais rien n’est encore fait. « Nous continuons de subir des malheurs alors que l’argent est là».
Ces familles menacées sont en train de cotiser, à peu près 60 mille BIF par ménage, pour totaliser les 4 millions BIF requis pour le curage de ce caniveau afin de limiter les dégâts. 74 ménages sont concernés. Ils totalisent aujourd’hui environ 700 mille BIF. « Si rien n’est fait dans l’urgence, tout le quartier Carama sera inondé».
Cette famille estime que ces inondations ont pour origine la mauvaise canalisation de la rivière Gasenyi. Des travaux réalisés par la société Abutip.
Ces ménages crient au secours. A chaque coup de tonnerre, tout le quartier s’alarme. « Avant, la pluie était une bénédiction pour la population. Nous dormions bien quand il pleuvait. Aujourd’hui, nous ne pouvons plus fermer l’œil».
Le ministre en charge de la gestion des catastrophes, Alain Guillaume Bunyoni, a affirmé, mercredi 15 janvier, que certains de ces victimes ont fait des constructions illégales. « Pas d’émotion. Ils retourneront d’où ils sont venus. » Il précise que ceux qui sont dans la légalité vont être assistés et réinsérés dans leurs maisons.