Après un bilan largement positif qu’il a dressé, pour ses bientôt 15 ans à la tête de la présidence de la République du Burundi, des recommandations pour son successeur, Pierre Nkurunziza a apporté, jeudi 26 décembre lors d’une émission publique, des éclaircissements aux préoccupations actuelles du peuple. Retour sur certaines des réponses…
Bilan
Des réalisations positives, selon le président Nkurunziza, dans tous les domaines, durant ses 14 ans et plus au pouvoir. C’est dans ces années, dit-il, qu’on a connu plus de prospérité en termes de développement socio-économique, mais aussi politique. «Aucun de nos prédécesseurs n’avait réalisé un tel progrès ».
Un résultat dû essentiellement à la participation de la population aux décisions politiques. «Nous avons parlé une fois, ils ont entendu 5 fois». Notamment pour la sauvegarde de la paix et le développement. A ses yeux, au moins 90% des Burundais sont restés loyaux durant les 15 ans.
Cela a fait que le Burundi jouit d’une autonomie financière. «Aujourd’hui, près de 90% du budget général de l’Etat proviennent des recettes intérieures alors qu’il était auparavant financé de l’extérieur à 50 ou 60%».
Durant les 15 ans, les Burundais ont pu manifester leur patriotisme en participant à la construction du pays. «Les Burundais ont contribué à plus de 80% à la construction des infrastructures,», assure le numéro un Burundais, citant la construction des marchés, des hôtels, des industries, etc.
Parmi les obstacles rencontrés, le président Nkurunziza parle d’une ingérence étrangère, pointant du doigt entre autres le Rwanda. «Nous n’avons de problème interne». Il dit avoir mené un combat sans merci contre cette ingérence et déplore que celle-ci persiste toujours. «N’eût été cela, on serait déjà très avancé en termes de développement»
Pierre Nkurunziza invite son successeur à s’investir pour le patriotisme. Selon lui, les générations actuelles, et à venir, devraient être imprégnées des valeurs ancestrales pour aboutir au développement. Il évoque le retour aux mœurs et coutumes des ancêtres. «Sans culture, le développement est impossible».
Parmi les autres priorités, le président de la République recommande la poursuite du processus de vérité et réconciliation. Les Burundais ont besoin de savoir quels ont été les défis, les obstacles rencontrés par leurs aïeux pour aller désormais de l’avant, au lieu de retomber dans les mêmes bassesses.
Les journalistes d’Iwacu incarcérés…
Au sujet de la question des journalistes Christine Kamikazi, Agnès Ndirubusa, Térence Mpozenzi et Egide Harerimana incarcérés à Bubanza depuis le 22 octobre dernier, le président burundais soutient qu’il ne peut pas s’immiscer dans une affaire qui se trouve déjà devant les juridictions. «Le président de la République, quoique magistrat suprême, ne peut pas s’ingérer dans un procès qui n’est pas encore tranché». Il avance le principe de la séparation des pouvoirs et l’indépendance de la magistrature.
Pierre Nkurunziza demande néanmoins que le procès soit fait au plus vite. «Qu’ils cherchent des avocats, présentent des preuves devant la justice et qu’ils soient jugés sans injustice. A notre niveau, nous intervenons en dernier lieu quand il n’y a plus de recours ».
«Le Rwanda a attaqué le Burundi»
Le président burundais appelle les Burundais à être attentifs au sujet de «l’agression du Rwanda» contre le Burundi. Pierre Nkurunziza veut surtout être clair sur l’attaque perpétrée à Mabayi de la province Cibitoke en novembre dernier : «Ce ne sont pas des militaires rwandais qui ont attaqué le Burundi, c’est plutôt le Rwanda qui a attaqué le Burundi », affirme-t-il tout enprécisant : «Nous avons toutes les preuves sur nous».
Le chef de l’Etat p tient à préciser : «Ce n’est pas une position militaire qui a été attaquée par le Rwanda, c’est plutôt le Burundi qui a été attaqué». Ainsi les Burundais doivent le comprendre : «Il y a un ennemi qui attaqué le Burundi. Sachez-le». Et ce n’est pas la première agression. Il dit disposer des preuves que les attaquants de Ruhagarika et de Musigati étaient tous en provenance du Rwanda.
Le commandant suprême des forces de défense soutient que le Burundi n’a pas de culture belliqueuse. «Cependant, si nous sommes attaqués, nous nous défendons et nous ne faisons si bien », conclut-il avant un appel : «Vous avez des oreilles pour entendre et des yeux pour voir. A bon entendeur salut».
La fermeture des cabarets
«La fermeture des cabarets à 21h n’aura aucun impact négatif sur l’économie», dixit le président Pierre Nkurunziza. Il estime que les consommateurs peuvent toujours commander leurs boissons et les prendre à la maison. Pour lui, il faut de la joie, mais en toute sécurité.
Idem pour les jeunes qui exerçaient sous des parapluies à travers la ville de Bujumbura, en facilitant les services ecocash ou lumicash. «La plupart n’étaient pas connus de l’administration» Pierre Nkurunziza dit qu’il faut tout réguler pour préserver la sécurité. «Faisons nos activités commerciales en toute sécurité. Car sans celle-ci, le commerce est impossible »
L’impact des rencontres de moralisation…
D’après le président Nkurunziza, les réunions de moralisation organisées ces dernières années à l’endroit des différentes couches de la population ont connu de bons résultats. Depuis ces rencontres, explique-t-il, le Burundi organise trois scrutins sur ses propres fonds. Il évoque les élections de 2015, le referendum constitutionnel de 2018 et les élections prochaines. «Les Burundais ont participé, chacun à la hauteur de ses moyens, parce qu’ils avaient compris l’importance d’être burundais».
C’est aussi grâce à ces réunions qu’il y a une grande participation électorale au référendum constitutionnel dernier. «La mairie de Bujumbura a été la quatrième alors qu’elle se classait toujours dernière lors des autres scrutins. C’est que les habitants ont finalement compris ».
Enfin, les Burundais ne ménagent aucun effort pour le développement. Pour le président Nkurunziza, les différentes infrastructures dont des établissements universitaires, des hôtels, des entreprises, des stades prouvent que les Burundais deviennent peu à peu patriotes.
L’état des lieux de la politique «tolérance zéro» ?
Pour le président Nkurunziza, la politique de tolérance zéro à la corruption a bien réussi. Il s’en tient notamment sur le financement du budget général de l’Etat. « Avant cette politique, la part des fonds internes ne dépassait pas les 48%. Aujourd’hui, nous en arrivons à 90% ». Ceci est dû à une bonne éducation fiscale. Selon lui, l’OBR est passé de 9 mille contribuables en 2014 à 97 mille en 2019. «Il y a eu changement de comportement et les résultats sont palpables».
En outre, la corruption et les infractions connexes sont sévèrement sanctionnées. Il parle de plus de 4 mille cas devant les juridictions tandis que mille autres ont été déjà rendus depuis l’introduction de cette politique. Aussi des fonds détournés ont été retournés dans les caisses de l’Etat. Plus de 6 milliards de BIF «Nous arrivons à un niveau satisfaisant, mais il faut faire un autre pas. Les débuts étant difficiles».
Déclaration des avoirs pour les autorités
Le président Pierre Nkurunziza se dit prêt à respecter le principe de déclaration des avoirs à l’entrée et à la fin des fonctions. « Nous y sommes préparés, nous le ferons au terme de notre mandat ».
Il se dit satisfait que d’autres autorités l’aient également fait. «C’est une politique de transparence qui a été bien suivi par mon gouvernement.» Pour lui, ceux qui diraient que le président burundais est parmi les dirigeants les plus riches du monde ne seraient que des menteurs.
«Tous nos biens se trouvent au Burundi et non à l’étranger. S’il y a des comptes à mon nom là-bas, qu’ils soient gelés », admet-il, citant des vaches, des chèvres, des poules, véhicules, et « nous sommes à mesure de prouver leur origine».