Les formations continues en anglais, swahili et en sciences humaines dont bénéficient les enseignants du primaire sont jugées insuffisantes. Le directeur du bureau d’études des programmes de l’enseignement de base estime que, faute de moyens, il faut se contenter de ces stratégies.
<doc5065|left>« Les enseignants ont besoin d’une formation qualifiante et bonifiée », insiste Chantal Nihishubuje, présidente du syndicat libre des enseignants du Burundi (SLEB). Les nouveaux programmes du primaire comprennent l’apprentissage de l’anglais, du swahili et des sciences humaines. Des formations continues sont dispensées à l’intention des enseignants, surtout durant les vacances scolaires. Les enseignants sont insatisfaits quant à la durée de ces formations et en ont fait part aux autorités habilitées.
Mais, déplore la présidente du SLEB, les concernés ne semblent pas se rendre compte de la gravité de la situation : « C’est la qualité de l’enseignement qui en pâti. Les enseignants ne maîtrisent toujours pas l’anglais et le swahili. » Néanmoins, selon Chantal Nihishubuje, ceux qui le peuvent sont en train de suivre des cours particuliers, mais se heurtent au manque de formateurs en swahili.
Un autre syndicaliste affirme qu’il faut un bagage important pour dispenser des cours dans ces langues : « Les formateurs eux-mêmes ne sont pas suffisamment outillés. Sans parler de la méthodologie utilisée qui est inefficace. » Il ajoute que la plupart des enseignants sont issus du milieu rural : « Ils ne parlent pas le swahili ou entendent parler cette langue que lorsqu’ils côtoient des swahiliphones. » Il ne comprend comment ils peuvent passer seulement quelques heures de formation pour, plus tard, enseigner ces langues aux écoliers. « Cela va se répercuter sur les services rendus par des enseignants incompétents. C’est l’avenir d’un pays qui est en jeu. C’est toute une génération qu’on va sacrifier si on ne change pas de stratégie », déplore-t-il.
La maîtrise d’une langue exige au minimum 240 heures
Tharcisse Habonimana, directeur du bureau d’études des programmes de l’enseignement de base (BEPEB), reconnaît que c’est un besoin légitime des enseignants de réclamer plus de temps pour ces formations. Mais il regrette que les moyens ne suivent pas. «Pour prétendre maîtriser une langue, il faut étudier au minimum 240 heures. Avec les 42 milles enseignants du primaire, cela nous coûterait 1milliard 900millions de Fbu. Où trouverions-nous une telle somme ? », s’interroge-t-il.
Organisées depuis 2005 pour améliorer la qualité de l’enseignement, d’autres formations additionnelles sont effectuées sur la méthodologie de l’enseignement de ces langues et des mises à niveau en fonction de la spécificité de chaque discipline. Le directeur du BEPEB précise que des animations pédagogiques mensuelles se font dans toutes les écoles primaires, chaque lundi du mois : « Ce sont 8 heures par mois, où les enseignent parlent des difficultés rencontrées. » Et d’ajouter qu’il existe 3 formateurs par commune. Au total, 387 forment les enseignants en swahili, anglais et en sciences humaines.
Tharcisse Habonimana signale que le BEPEB a mis en place une cassette audio pour les programmes, depuis la 1ère année à la 6è, pour améliorer la prononciation et l’écoute. Actuellement, 3000 magnétos sont disponibles pour 3000 directions. « Ce sont les quelques stratégies en attendant des lendemains meilleurs», conclut-il.
« On ne bricole pas avec un système éducatif »
Pour le pédagogue Joseph Ndayisaba, il faut une politique linguistique nationale qui fixe les langues officielles et les langues d’enseignement. Au point de vue pédagogique, insiste-t-il, il faut choisir la langue d’apprentissage. Sinon, il assure qu’aucune langue ne sera maîtrisée par les écoliers. « Si l’objectif est d’avoir des enfants capables de suivre les cours en anglais ou en swahili à la fin des humanités, il vaut mieux qu’ils commencent à apprendre l’anglais au milieu de l’enseignement primaire et le swahili au secondaire », souligne-t-il.
Normalement, déplore le pédagogue, il fallait que ces langues soient insérées dans les programmes des lycées pédagogiques. Il estime que c’est du gaspillage : « On ne bricole pas avec un système éducatif. C’est pratiquement impossible de faire un apprentissage de deux langues simultanément. » Le mieux, selon Joseph Ndayisaba, serait que certaines décisions politiques ou certaines réformes fassent l’objet d’études de faisabilité avant leurs mises en application.