Au moment où l’Assemblée nationale compte sous peu analyser et adopter le projet de loi régissant la Commission Vérité et Réconciliation (CVR), lui soumis depuis le 12 décembre 2012, le Forum pour le Renforcement de la société civile (Forsc) demande aux parlementaires de tenir compte des différents amendements proposés.
Il y a une volonté à peine voilée de paternité de la présidence de la République sur la CVR, estime le délégué général du Forsc, Vital Nshimirimana, : « Ceci transparaît dans le serment que propose ce projet de loi régissant la CVR à son article 17, où il est stipulé que le Commissaire jure devant le Président de la République et le Peuple Burundais d’accomplir sa mission dans le souci de découvrir la vérité aux fins de favoriser et de promouvoir la réconciliation nationale ». D’après Vital Nshimirimana, il aurait été préférable que le Commissaire prête serment devant le Parlement et commence cette formule par le Peuple burundais.
Parmi les inquiétudes exprimées par le Forsc, il y a l’absence dans le nouveau projet de loi régissant la CVR de références au Tribunal spécial. « Il faut que ce texte introduise au moins ce mécanisme judicaire sinon, la recherche de la vérité ne servirait à rien sans poursuites judicaires pour les auteurs des crimes qui ont endeuillé ce pays », fait remarquer Vital Nshimirimana. Le Forsc a déjà proposé un avant projet de loi régissant le tribunal spécial.
« La sélection des Commissaires pose aussi problème parce qu’il y a risque d’avoir une composition des membres de la CVR résultant des arrangements entre différents partis politiques représentés dans différentes institutions à l’image des autres organes comme la CNTB. Ceci met un bémol à la crédibilité de ce mécanisme », s’inquiète le délégué général du Forsc.
Selon lui, lors des Consultations nationales sur la mise en place des mécanismes de Justice de transition, menées en 2009 et pilotées conjointement par des représentants du Gouvernement, des Nations Unies et de la Société civile, la plupart des personnes interrogées proposaient plutôt des commissaires issus des confessions religieuses, de la société civile et non des sphères politiques.
« Il faut des critères objectifs de sélection des commissaires pour avoir des hommes et des femmes neutres et indépendants. Il faudrait également un large consensus de la part des confessions religieuses pour un commissaire qui serait issu de ce milieu. Par les temps qui courent, rien n’est moins sûr, il y a des prélats plus politiciens que les politiciens », fait remarquer Vital Nshimirimana.
La vérité, rien que la vérité, toute la vérité
Il s’interroge aussi sur la CNTB, qui est normalement une des composantes des mécanismes de Justice de transition déjà opérationnelle au moment où la mise en place de la CVR prend du retard. Pour le délégué général du Forsc, « la recherche de la vérité avec la CVR devrait commencer avant toute forme de réparation ». Quant à la proposition de réécriture de l’histoire du Burundi, qui selon lui, est un exercice quasiment impossible, « il faut peut-être identifier et revoir quelques éléments clés qui ont marqué l’histoire du Burundi, sinon tout effacer pour tout reprendre à zéro est impensable ».
L’autre inquiétude soulevée par le FORSC est la protection des témoins. D’après Vital Nshimirimana, il faut des préalables sécuritaires et un contexte politique apaisé pour que le travail de recherche de la vérité puisse se faire dans la sérénité sans intimidations ou manipulations politiques surtout au moment où les élections s’annoncent.
? Propositions d’amendement du projet de loi de mai 2013 par le Groupe de Réflexion de la Société civile sur la Justice de transition
? Observations des Nations Unies faites à l’Assemblée nationale sur le projet de loi portant création, mandat, composition, organisation et fonctionnement de la Commission Vérité et Réconciliation