Des ravins qui ne cessent de s’élargir dangereusement vers les infrastructures privées et publiques, des éboulements des rives des rivières… entre autres menaces de la ville de Bujumbura. Rencontre avec le géographe Jean-Marie Sabushimike.
Observez-vous des signes de risques de catastrophes dans certains endroits de Bujumbura?
Il y a une généralisation des fissures du sol et des ravins. Et ces derniers attaquent systématiquement toutes les maisons et infrastructures privées ou publiques. C’est un phénomène naturel extrêmement inquiétant. Et ce, dans la mesure où on peut lire sur le visage des habitants un grand désarroi. Ils ont raison d’être inquiets.
Quelles sont les causes de ce phénomène ?
Cette fissuration généralisée du sol peut s’expliquer sans doute par la nouvelle occupation du sol sans contrôle sur le plan technique. Je me permets de le dire avec une certitude scientifique qu’on n’a pas du tout tenu compte des propriétés géotechniques des sols.
On voit aujourd’hui des parties de murs qui s’affaissent tandis que d’autres sont dans leur état initial. Et il y a des problèmes de fermeture des maisons. Par exemple, à l’endroit appelé « Winterekwa », zone Gihosha, commune Ntahangwa, sur plus d’une dizaine de maisons, on remarque que les portes sont bloquées. Là, le sol doit être bien étudié.
Une autre cause majeure?
C’est la forte pluviométrie dans la sous-région. Actuellement, avec le phénomène El-Nîno, on peut s’attendre à tout un mois d’avril pluvieux.
Il y a donc une urgence aigüe de faire un contrôle systématique des maisons directement menacées par ces destructions. Afin de déterminer rapidement le nombre d’habitants qui doivent être localisés ailleurs.
Quelle stratégie proposez-vous pour éviter ce genre de situations ?
La mairie de Bujumbura va bientôt disposer de plans de contingence où figurent la classification et la hiérarchisation des risques. Aujourd’hui, dans les trois communes de Bujumbura (Ntahangwa, Mukaza et Muha), nous constatons que ces mouvements de terrain prennent de plus en plus des allures catastrophiques.
Que faire concrètement ?
Il faut que l’on arrive à construire ce qu’on appelle des plans de prévention des risques en s’inspirant des plans de contingence. La ville de Bujumbura ne pourra pas connaître un développement durable sans le respect des objectifs du développement durable (ODD). Ceux-ci sont proposés dans le cadre des changements climatiques. Il faut que la ville de Bujumbura soit résiliente. C’est-à-dire une ville qui a la capacité de s’adapter aux événements afin de limiter les effets des catastrophes naturelles et de retrouver un fonctionnement normal le plus rapidement possible.
Est-ce le cas ?
Non. Nous n’avons pas encore bien intégré ces objectifs du développement durable. Et le premier responsable est celui qui a la planification et la gestion urbaine dans ses attributions.
Propos recueillis par Rénovat Ndabashinze