Samedi 23 novembre 2024

Opinions

I Opinion I Tu as le droit de manifester … pourquoi pas moi ?

15/04/2015 13

Les partis politiques et la société civile face à l’effet boomerang de l’intolérance : Si le parti au pouvoir a le droit d’organiser une activité politique interprétée comme un évènement de campagne électorale déguisé en manifestation de soutien à un éventuel troisième mandat, l’opposition et la société civile n’en ont pas moins le droit et ne devraient pas avoir de problème pour organiser une manifestation originale en faveur du respect des Accords d’Arusha, de la Constitution et de la loi que le parti au pouvoir serait libre d’interpréter, mais sans interférence, comme un évènement de campagne électorale clairement contre un troisième mandat.

ManifestationQuoique les circonstances aient changé, une partie de la classe politique ne semble pas avoir tiré de leçons des élections de 1993 lorsque, face à une opposition canalisée au sein du Frodebu naissant, le monopole réel et apparent des moyens de violence, de coercition et de manipulation de l’électorat dans un contexte de contradictions profondes, n’a pas produit les résultats escomptés par le parti au pouvoir.

Les membres des partis politiques de l’opposition et de la société civile ont assisté avec la même tolérance qu’ils préconisent et réclament, la manifestation récente qui a mis en évidence une farouche détermination du parti CNDD-FDD et son leader à utiliser tous les moyens pour forcer la main de tous ceux qui, indépendamment du mode d’élection à la magistrature suprême, sont par principe opposés à un troisième mandat présidentiel. Néanmoins, ils ne semblent pas avoir été impressionnés par la démonstration de force du parti au pouvoir qui a fait une exhibition de sa capacité de mobilisation qu’ils taxent de coercitive.

Des moyens financiers considérables entre les mains d’un leadership tamisé …

De plus la manifestation a été un avant-goût des moyens financiers considérables (aucun mot sur leur provenance) dont le pouvoir dispose et des méthodes destinées à secouer une coalition informelle d’une majorité silencieuse résignée et de « ventriotes » qui n’attendent que le coup de sirène pour sauter du navire dépourvu de quelques-uns de ses matelots d’hier les plus compétents quand bien même devenu aujourd’hui les moins fidèles et les plus indésirables.

La manifestation a également exposé un leadership du parti résiduel du processus de tamisage politique qui a mis à nu, après la perte de cadres et membres influents, la prédominance mais aussi la vulnérabilité d’une aile intolérante et intransigeante à l’égard de toute dissension interne, et surtout allergique et violemment opposée à la compétition externe.

L’opposition et la société civile enrichies par leur diversité mais affaiblies par leur sectorisation autour d’intérêts individuels et sectaires à courte portée politique doivent également s’en prendre à elles-mêmes : même face à la témérité du parti au pouvoir dont ils ne doivent pas espérer de cadeau, ils doivent faire montre de plus de créativité et de courage politique pour revendiquer leurs droits avec succès.

L’opposition et la société civile réactives : Si tu as le droit de manifester … pourquoi pas moi ?

Si le parti au pouvoir a le droit d’organiser une activité politique interprétée comme un évènement de campagne électorale déguisé en manifestation de soutien à un éventuel troisième mandat, l’opposition et la société civile n’en ont pas moins le droit et ne devraient pas avoir de problème pour organiser une manifestation originale en faveur du respect des Accords d’Arusha, de la Constitution et de la loi. Le parti au pouvoir serait libre d’interpréter cela comme un évènement de campagne électorale visiblement contre un troisième mandat, mais dans un effet de boomerang positif, sans interférence pouvant suggérer une quelconque intolérance politique dont il est d’habitude accusé à tort et/ou à raison.

Malgré les encouragements sincères (ou même fourbes) et le support (possible) des partenaires du Burundi favorables à un régime stable bâti autour des valeurs de bonne gouvernance qui ne soit pas hostile à leurs propres intérêts, l’opposition et la société civile semblent minées par un ventriotisme latent et inhibant. Apparemment, elles n’apprécient pas la profondeur et l’étendue de la déception de l’électorat qui est à la recherche de leadership pouvant rassembler tous ces courants dans un mouvement offrant une meilleure alternative à un pouvoir dont le bilan de deux législatures qu’elles jugent loin en deçà des expectations.
____________________
A propos de l’auteur

Gervais CishahayoGervais Marcel Cishahayo est un membre de la diaspora burundaise depuis les années 1970s et établi à Malte, UE. Professeur, consultant sur les questions relatives à l’éducation, la géophysique, les NTICs, la diplomatie et les relations internationales, il est l’auteur d’articles d’analyses et de contributions diverses dans les médias sur l’immigration, la sécurité et l’intégration régionale. Avocat de la bonne gouvernance démocratique bien connu des milieux politiques et académiques et n’ayant jamais adhéré officiellement à aucun parti politique depuis les années 1980s, il est l’auteur d’une thèse d’analyse de la dimension de la sécurité de la Communauté Economique des Pays des Grands Lacs (CEPGL) présentée à l’Académie Méditerranéenne d’Etudes Diplomatiques de l’Université de Malte.

Forum des lecteurs d'Iwacu

13 réactions
  1. Mutima

    Je me demande bien pourquoi Iwacu ne publie plus mes commentaires…

  2. Moteur C

    Il avait calculé sortir son article aujourd’hui ou hier car il savait ou pensait que la police allait frapper les manifestants ou les interdire la manif. Son timing est raté. On attend toujours les manifestants.

  3. Ngenzi

    Manifester, OUI, mais pas n’importe comment ni pour n’importe quoi pouvant mettre en péril la vie, la famille, la communauté ethnique d’origine, l’ emploi, le travail, l’occupation, le militantisme et devoir de citoyen des gens (populations) appelés à manifester! Il faut reconnaître que le Burundi est parmi les pays où tout est encore fragile, soyons alors vigilants et surtout prudents dans nos manières d’agir et surtout de faire avancer nos opinions/revendications respectives, ibi biraba twebwe abanyagihugu n’abadutwara bose. Nitwubake Igihugu cacu natwe twiyubaka, tureke kwisenyerako canke kwimaramaza devant la Communauté internationale itugwanyeko muri vyinshi. Tureke kuba ubusimbirahamwe, dusenyere ku mugozi umwe w’Amahoro, w’Ubumwe n’Iterambere, habe gukeburana ivy’amatati n’indyane tubishire pembeni, vyanse naho twirinde intambara no gusesa amaraso, habe kwumvikana biciye mu biganiro vyuzuzanya et non qui divisent.

    • Stan Siyomana

      @Ngenzi: « Manifester…POUVANT METTRE EN PERIL LA VIE, LA FAMILLE… »
      La DECLARATION UNIVERSELLE DES DROITS DE L’HOMME, adoptee le 10 decembre 1948 a Paris, dit:
      Article 2
      Chacun peut se prevaloir de tous les droits et de toutes les libertes proclames dans la presente Declaration, sans distinction aucune, notamment de race,…D’OPINION POLITIQUE OU DE TOUTE AUTRE OPINION D’ORIGINE NATIONALE OU SOCIALE,…
      Article 19
      Tout individu a DROIT A LA LIBERTE D’OPINION ET D’EXPRESSION, ce qui implique LE DROIT DE NE PAS ETRE INQUIETE POUR SES OPINIONS…
      (Voir « Declaration Universelle des Droits de l’Homme », http://www.toupie.org).
      Merci.

  4. Gakwikwi

    Maze imisi mbona uyu mushingantahe Gervais Marcel Cishahayo yandika muri iki kinyamakuru mbere akanashikuza ahandi naho akerekana aho ahengamiye cane ariko ivyo ni vyiza muri democratie. Niba bishoboka ko mbona namashuri yize menshi yotubwira aho yandika article yiwe yambere ku Burundi naho yayisohoreye?
    Frequence amaze imisi yandikana niyurukundo rwubutse muri we muri ino misi?
    Ubwo ntiyoba yafashw na yandwara abategetsi bahora bagwara yo kwumvaa ko babizi kandi babishoboye vyose?

    • Baobab

      @Gakwikwi
      « Ubwo ntiyoba yafashw na yandwara abategetsi bahora bagwara yo kwumvaa ko babizi kandi babishoboye vyose? »
      Kandi umenga iyo ndwara uvuga umenga hari gihe yandukira! Kenshi n’ukuhitondera!

    • Muhabura

      @Gakwikwi
      Uvuze uti: Niba bishoboka ko mbona namashuri yize menshi yotubwira aho yandika article yiwe yambere ku Burundi naho yayisohoreye? Aho washatse kumenya canke washatse kuvuga ko atarigera yandika? Lui au moins turabona ivyo yandika n’aho usa n’uwubigaya. Wewe none articles wanditse n’izihe? Zabaye publier mu kihe kinyamakuru? Tubwire aho ziri ngo tuzisome.
      Nagomba ahubwo kukumenyesha ko amashure ntaho ahuriye no kwandika. Hari abantu benshi bafise amashure menshi mugabo ntibazi kwandika nk’uko hari abantu benshi badafise amashure menshi mugabo bazi kwandika. Kwandika rero birigwa.
      To make my story short, just come with your arguements instead of just coming with unproductive comments on this forum.
      Gira amahoro

  5. kibwa

    Ce mec est aujourd’hui très actif sur les réseaux sociaux. Il veut prendre le train DD en marche ou c’est un sursaut de patriotisme. Il a pas mal d’idées même si son style est quelque peu lourd.
    Quant au fond de sa pernsée, il s’adresse à sourds qui sont devenus muets dans l’entre temps. « Asurira mu muyaga nka ya mbwa » comme iamait dire mon grand-père
    Je prends ma bière et je reviens
    Kibwa

  6. warapfunywe ntiwapfuye

    très bel article, pauvre burundi à la perpetuelle recherche d’un leadership digne de son nom. face au manque de résultats des deux législatures du CNDD-FDD, quelles solutions nous proposes ceux qui prônent le changement (lequel, comment/processus, quels résultats/indicateurs, quels moyens???)

  7. KAISER

    C’est la première fois que j’entends parler d’un boumerang positif, excepté dans l’usage original, parce que le boumerang est une petite planche taillée en forme d’aile d’avion, que les noirs australiens (aborigènes) utilisaient pour frapper en vol les oiseaux qu’ils voulaient attraper. Cette planche a les formes aérodynamiques qui lui permettent de retourner près de celui qui l’a lancée, avec le risque de le blesser s’il ne fait pas attention. D’où le sens figuré, càd, déclencher une situation pour nuire aux autres, et en finir victime. En kirundi on dirait: « inkubisi y’amazi iyitarukirizako ».

  8. Kana Antoine-Marie

    Marcel, ton opinion est malheureusement une réalité. Si la sublimité du bruit que fait l’opposition équivalait à sa capacité créative, on ne serait plus au niveau des manifs qui ne font que rendre ridicules les soi-disant chefs des partis qui s’en réclament.
    Si le FRODEBU dont parle Monsieur Cishahayo a pu faire la différence 1993, c’est qu’il a su faire les choses différentes au lieu de faire les mêmes choses différemment. L’UPRONA et ses satellites, avec leurs moyens et arrogance se limitaient seulement à leur marque soignée de snobs, alors que les autres allaient dans le fin fonds des collines ou se trouvent les votes. Le même scenario de snobisme s’observe chez l’opposition « intello » qui, malheureusement est incapable de faire un compromis sur un seul candidat de consensus. Sorry les amis, vous êtes RIDICULES et ne devriez pas vous attendre à ce que les gens vous donnent un crédit quelconque.
    Est-ce trop tard ? Non. Il suffit de vous ramasser et vous occuper de votre propre projet au lieu de celui du CNDD-FDD et de ses éventuels candidats. A l’heure qu’il est, peu importe le candidat que CNDD-FDD va aligner, il va gagner les élections avec une marge confortable. Pourquoi ? Parce qu’il a en face de lui un groupe de ramassis incapables de parler un même langage autour d’un projet commun. Ça rappelle le fameuse tour de Babel !
    Si tu ne peux pas me battre, joins-toi à moi, comme dirait l’autre.

    • mahoro

      @Kana, tu as totalement raison! Cependant, si on compare 1993 et aujourd’ hui, c’ est quand même la nuit et le jour. En 93, il n’ y avait pas autant de partis d’ opposition , et encore moins une milice qui semait la terreur, des démobilisés qui montraient leurs biceps. De plus, la grande majorité aspirait à un changement de pouvoir raison pour laquelle elle avait opté de s’ opposer au pouvoir quasimment en un seul parti. Or , aujourd’ ui le climat politique et l’ atmosphère dans les différents villages du pays sont remplis de brume, de brouillards épais. Les conditions se sont dégradées au su et au vue de cette opposition, ça fait 10ans! 10 ans d’ in action, 10ans de pleurniche sans aucune action complète. Je peux comprendre qu’ il marche sur des terrains minés, mais les choses ont évoluées, il fallait suivre le mouvement et adopter à temps une stratégie. Autrement dit, il fallait et il faut vaincre la peur en s’ armant de courage et de determination.

      Ce n’ est plus le temps de faire cavalier seul face à un « monstre  » qui veut broyer tout sur son passage. Il faut mette de côté vos propres intérêts secteriels car vous ne serez pas tous président. Cependant, une chose est certaine, chacun de nous serait au moins président de sa déstinée ce qui faut lementablement défaut sous le règne des dd.

      Dans la même veine d’ idées, vous avez tendance à trop demander à la communauté internationale d’ intervenir dans votre propre maison alors que vous mêmes avez vos mains croisées. On dirait que vous avez des yeux bandés. Elle est,de prime abord, soucieuse du bien être de ses citoyens et se contente de déclaration pour condamner ces régimes sanguinaires. On dirait que vous n’ avez jamais saisi que c’ est qui est important pour elle qui prime. c’ est de l’ intérêt qu’ elle y gagne!

      Alors mes chers compatriotes, il nous faut un changement de mentabilité. Si les dd ont investi de l’ énergie corossale pour nous  » nyakurize », nous devons quadripler la même énergie pour nous unir autour d’ un même projet de société. Nous devons vaincre notre peur et apprendre à nous battre ensemble pour notre survie sinon nous allons mourir collectivement comme des idiots.

      • Baobab

        @mahoro
        « Il faut mette de côté vos propres intérêts secteriels car vous ne serez pas tous président. »
        Souvent je me mets dans la peau d’un villageois observant les politiciens à partir de Cendajuru, Mukike, Gasanda, etc., et l’mpression que j’ai est que opposition ou pouvoir en ce qui concerne sa vie de tous les jours c’est « blanc bonnet et bonnet blanc »! La lutte politique ne consiste qu’à « ôte-toi de là pour que je m’y mette »!!!

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