Dans le cadre des projections de la 6ème édition du Festicab (Festival International du Cinéma et de l’Audiovisuel du Burundi), j’ai glané dans le vergé cinématographique nous proposé durant cette semaine de la mi-juin 2014 et j’ai découvert un fruit cinématographique de la saveur de nos mangues de novembre. « I Mashoka », long métrage réalisé par Jean-Marie Ndihokubwayo et Pascal Capitolin est tout à fait succulent.
Du point de vue thématique, le film revient sur le thème de l’eau ((Comme son nom l’indique, il s’agit du pays de l’eau. C’est le lieu où les troupeaux vont s’abreuver après avoir brouté, avant de rentrer au bercail.)) . Il est dans la droite ligne des « romans paysans » dont parle Lylian Kesteloot. ((Kesteloot, Lilyan, Histoire de la Littérature Négro-Africaine, Paris, Karthala – AUF, 2001(mis à jour en 2004), p 27.))
Comme le magnifique livre Gouverneur de la Rosée (1944) du Haïtien Jacques Roumain et les films français Jean de Florette et Manon des Sources (1986) de Claude Berri, le nœud du drame tourne autour de la lutte âpre pour contrôler la gestion de l’eau. « I Mashoka » est aussi une histoire d’amour entre des jeunes de deux communautés antagonistes. Comme les « Montaigu » et les « Capulet » dans Roméo et Juliette de Shakespeare, comme les « Bahutu » et les « Batutsi » dans L’Optimiste de François-Xavier Nayigiziki ou comme les « Nta » et les « Mbala » dans Au Pays de Mbala d’Ambroise Niyonsaba, la jeunesse peut incarner le pire comme le meilleur. Mais, pourvu qu’on lui permette de s’épanouir dans le vrai et la fraternité elle est toujours grosse d’un avenir radieux.
« I Mashoka » est un long métrage ((C’est le second long métrage jamais réalisé par un Burundais depuis « Gito, l’Ingrat » (1991))) d’une facture exceptionnelle. Par-delà l’intérêt évident des thèmes développés, le film est joué admirablement par des comédiens mis en bouquet à l’aide d’une technique de son et de lumière de très grande qualité. Les réalisateurs ont su rendre justice à la beauté inoubliable des collines du pays par des panoramiques et des plans fixes de la région du Mumirwa. ((Le versant Ouest de la Crête Congo-Nil)) L’adjonction du dessin animé dans l’écriture et la projection de la narration dans un futur lointain donne à l’œuvre une dimension qui transcende les contingences de l’heure pour préserver la quintessence de l’humanité dans ses faiblesses, mais aussi dans toute sa grandeur.
« I Mashoka » est un film à voir et qui fera date car il s’agit d’une œuvre artistique qui s’est refusée de verser dans la médiocrité ou même simplement dans la facilité. Avec peu de moyens et beaucoup d’amour et d’abnégation toute l’équipe qui a créé ce film vient de marquer du sceau de l’excellence l’histoire du cinéma burundais.
« I Mashoka » est un fruit à déguster à pleins… yeux et oreilles!
Mbe izo film mukora zivuga ururimi ruhe ? Ni mwaba muzikora mugifaransa, muzoba mutarategera…
Comment peut-on se procurer ce film à partir de l’étranger?
Bien cordialement!
A Annah et à Anselme Nimbesho,
Je ne puis répondre à vos attentes. C’est ça la grande question de la distribution des films africains. Tous les chefs d’oeuvre du Tiers Monde que personnellement j’ai pu voir, c’était à l’ex Centre Culturel Français (CCF) actuel IFB (Institut Français du Burundi). Je parie qu’ailleurs dans le monde il faille se rendre soit aux mêmes endroits, soit aller voir des festivals spécialisés dans le cinéma africain!
Le chemin est encore long, mais il faut se battre sans relâche pour gagner notre place au soleil.
Fraternellement
Pour ceux qui sont a l’etranger, y aurait il un moyen de voir le film?