La ministre de la Santé Publique a mis en en place un système d’audit des décès maternels. Cette mesure va inciter le personnel soignant à être plus vigilant. Pour le président de l’Association burundaise pour la défense des droits des malades, cela permettra également aux malades de faire prévaloir leurs droits. <doc2955|left>« Cette mesure est un rappel à l’ordre des médecins qui ont prêté le serment d’Hippocrate. La négligence du personnel soignant est une triste réalité dans notre pays. Plus de laisser-aller dans les établissements hospitaliers », espère Moise Ntiburuburyo, président de l’Association burundaise pour la défense des droits des malades (ABDDM). D’après des chiffres fournis par le président de l’ABDDM, une femme sur 12 meurt en couches. Chaque jour, les plaintes devenaient plus nombreuses. Et la ministre de la Santé a réagi. Le président de l’ABDDM y voit également un moyen pour provoquer une prise de conscience : « Auparavant, la mort d’une femme en couches était juste perçue comme un incident malheureux. Désormais, les ayants droit pourront exiger que l’hôpital ou le centre de santé leur dise la cause de décès, pour savoir s’il y a eu négligence ou non. » Ainsi, par peur des sanctions ou des poursuites judiciaires, les médecins et les services de maternité se soucieront des patientes plus qu’ils ne le faisaient avant. Des décès par manque de matériel L’audit des décès maternels a une autre implication : il va inciter les professionnels de la santé à réclamer de meilleures conditions de travail pour éviter des incidents susceptibles d’être imputés au personnel médical. Moise Ntiburuburyo reconnaît que certains décès peuvent être dus au manque de matériels. Il cite l’exemple de la carence d’appareils d’échographie à l’origine du manque de suivi des femmes enceintes. Il regrette également l’insuffisance des lits et des salles d’attente par rapport au nombre de femmes qui accouchent : « Avec la politique de gratuité des soins, les mères qui mettent au monde sont nombreuses. Leur nombre dépasse la capacité d’accueil des structures sanitaires. » L’audit ne précise pas les sanctions prévues, et Moise Ntiburuburyo estime que ceci laisse penser qu’elles seront purement administratives : des avertissements ou demandes d’explication. Pour lui, le ministère de la Santé devrait être intransigeant pour les cas de manquement à la déontologie médicale et laisser la voie à des sanctions pénales. Interrogé, le président de l’Ordre des médecins du Burundi, docteur Nitunga, a indiqué qu’il s’exprimera après une réunion du Conseil. Pour le président de l’Association burundaise pour la défense des droits des malades, les décès des femmes en couches sont souvent imputables à la mauvaise qualité de l’accueil : certains cabinets privés n’ont ni salle de réanimation ni bloc opératoire. M. Ntiburuburyo épingle également la non-application de certains principes de la déontologie médicale : l’écoute attentive et l’échange d’information sur la santé de la patiente. Il évoque l’inégalité des malades : « C’est déplorable qu’un professionnel de santé privilégie d’abord une patiente qu’il connaît personnellement au détriment d’une autre. » Le président de l’ABDDM relève d’autres pratiques répréhensibles. Il y a d’abord la corruption : « des professionnels de santé acceptent des présents des malades pour s’attirer leurs faveurs. » Puis, « l’utilisation de méthodes interdites par l’OMS, notamment les ventouses lors de l’accouchement. » Sans oublier la lenteur dans le traitement des cas d’urgence. Cette dernière lacune est parfois occasionnée par les procédures administratives d’admission dans les établissements hospitaliers, telles que le payement des cautions. Du côté du malade, il arrive que la patiente arrive tardivement pour accoucher ou que pendant la grossesse, elle n’ait jamais fait de consultations prénatales pour prévenir d’éventuelles complications.