Je viens d’apprendre avec tristesse la mort de Boutros Boutros Ghali que j’ai eu le privilège de côtoyer quand j’étais ministre des Relations extérieures et de la Coopération de la République du Burundi. Sa mort est une grande perte pour sa famille, son pays l’Egypte, l’Afrique et la communauté internationale dans son ensemble.
Je me souviens du rôle de Boutros Boutros Ghali pendant les réunions ministérielles qui préparaient les Sommets des Chefs d’Etat de l’OUA. Tout le monde le respectait, tout le monde l’écoutait et ses avis nous permettaient chaque fois de sortir des situations difficiles du continent africain.
Quand il a fallu que l’Afrique présente son candidat au poste de Secrétaire général de l’ONU, la candidature de Boutros Boutros Ghali est passée comme une lettre à la poste.
Je garde un souvenir inoubliable de la visite officielle que j’ai effectuée en Egypte et où j’ai été encadré pendant trois jours par Boutros Boutros Ghali. Nos entretiens ont permis de lancer la coopération entre le Burundi et l’Egypte.
Comme Secrétaire général des Nations unies, sa tâche n’a pas été facile surtout quand il a été impuissant à empêcher le génocide du Rwanda parce que les membres du Conseil de Sécurité n’avaient pas de position commune sur la question. Boutros Boutros Ghali a tenté à plusieurs reprises de réaffirmer le rôle primordial du Secrétaire général des Nations unies dans le maintien de la paix mondiale mais ses initiatives se heurtaient le plus souvent aux grandes puissances (« The Big five ») dont les intérêts ne convergent pas nécessairement avec ceux du reste de la communauté internationale.
Plus tard, dans ses mémoires, Boutros Boutros Ghali dira : « L’échec des Nations unies est aussi mon échec et que très probablement, je n’ai pas été suffisamment agressif envers les membres du Conseil de Sécurité ». Au sujet du génocide au Rwanda en 1994, Boutros Boutros, il a eu ces mots : « Le génocide en Afrique n’a pas suscité la même attention que le génocide en Europe, le génocide en Turquie ou dans d’autres parties du monde, il y a une sorte de discrimination envers les peuples d’Afrique et les problèmes africains ». C’est pour cette raison que Boutros Boutros Ghali a beaucoup milité pour la réforme du système des Nations unies.
A côté de ce drame du Rwanda auquel le monde associe le nom de Boutros Boutros Ghali, il convient de ne pas oublier les nombreuses initiatives heureuses prises par les Nations unies sous son mandat. Je citerai :
La conférence des Nations unies sur la population et l’environnement, Rio de Janeiro 1992 ;
La conférence sur les droits de l’Homme, Vienne 1993 ;
La conférence mondiale sur la population et le développement, 1994 ;
La conférence mondiale sur le développement social, Copenhague 1995 ;
La quatrième conférence mondiale sur les femmes : lutte pour l’égalité, le développement et la paix, Beijing 1995 ;
Le sommet mondial de l’alimentation, Rome 1996.
Ces différentes conférences mondiales montrent à suffisance que Boutros Boutros Ghali s’est montré très préoccupé par le sort des populations pauvres et très vulnérables dont beaucoup sont en Afrique.
Que le Tout Puissant l’accueille dans son Royaume.
Ambassadeur Cyprien Mbonimpa