La présence de la Rwandaise Laure Uwase de Ijambo Asbl dans la Commission spéciale belge consacrée à la « décolonisation » contraint le collectif burundais à prendre ses distances avec la Commission. Dans une lettre au président de cette commission et dont Iwacu a pu voir la copie, le collectif indique qu’il avait espéré que la Commission allait comprendre la gravité d’un tel choix controversé et regrette que les protestations du Collectif des Burundais n’aient eu aucun effet.
Bruxelles, le 24 septembre 2020
A M. Wouter De Vriendt, Président de la Commission spéciale de la Chambre sur le passé colonial de la Belgique
A M. Patrick Dewael, Président de la Chambre des Représentants
Aux Présidents des groupes Parlementaires
A tous les Parlementaires
Aux Présidents de tous les partis politiques
Objet : Refus de cautionner la présence de Mme Laure Uwase au sein du groupe des Experts de la Commission Décolonisation.
Monsieur le Président de la Commission spéciale de la Chambre sur le passé colonial belge,
Le Collectif des Burundais constitué pour offrir un partenariat dynamique et constructif à la Commission spéciale de la Chambre sur le passé colonial de la Belgique vous remercie infiniment d’avoir délègué M. Briers, votre Vice- président, afin qu’il participe à notre Conférence publique sur Zoom organisée en date du 11 Septembre 2020.
Au cours de cette Conférence, le Collectif des Burundais sur la colonisation belge a clairement indiqué à M. Briers qu’il ne cautionnerait jamais la présence au sein de votre Commission, de Mme Laure Uwase, affiliée à Jambo asbl et Jambo News, plateformes véhiculant des idées négationnistes et révisionnistes par rapport au génocide des Tutsi au Rwanda.
Pas plus qu’il ne cautionnerait jamais, non plus, la présence de Burundais présumés coupables de crimes contre l’humanité́, de Congolais présumés coupables de propager des discours de haine contre certaines communautés établies dans la région des Grands Lacs, de Belges présumés coupables de racisme ou appartenant aux groupes néonazis du pays,…
Pour une raison très simple. La présence, au sein du groupe des Experts de la Commission Décolonisation, de personnes présumées coupables de graves crimes, ruinerait définitivement sa crédibilité́ auprès de l’opinion publique de nos quatre pays, la Belgique, le Burundi, la République Démocratique du Congo et le Rwanda.
Par ailleurs, les organisations de la société́ civile et les médias, dans ces quatre pays, ne manqueraient pas de dénoncer avec véhémence et à juste titre, la compromission de la Commission Décolonisation avec des personnes dont le positionnement moral, intellectuel et politique, par rapport aux crimes contre l’humanité́, aux crimes de guerre et surtout au crime de génocide, ne serait pas exempt de tout soupçon de complicité́ ou de culpabilité́. Or, la composition du groupe des experts est hautement controversée, et nos inquiétudes ont été largement communiquées lors de la réunion avec notre Collectif.
Le Collectif des Burundais n’a absolument pas l’intention de pratiquer la politique de la chaise vide. Au contraire, il avait l’espoir, qu’après la conférence du 11 Septembre 2020, la Commission spéciale de la Chambre sur le passé colonial belge allait enfin se rendre compte de la gravité de la blessure que le choix controversé provoque auprès des survivants et des victimes du génocide des Tutsi au Rwanda, d’une part, et de toutes les personnes attachées au respect des droits humains dans le monde d’autre part.
En maintenant son choix, la Commission spéciale de la Chambre sur le passé colonial de la Belgique persiste et signe et montre qu’elle n’accorde aucune importance aux protestations du Collectif des Burundais exprimées au cours de la Conférence mentionnée ci-haut. Le Collectif des Burundais prend donc acte de l’entêtement et de l’aveuglement de la Commission spéciale de la Chambre sur le passé colonial de la Belgique et a décidé́, avec grand regret, de prendre ses distances.
Comme nous l’écrivions dans le plaidoyer initial, notre Collectif ainsi que « les jeunes générations burundaises d’ailleurs, souhaitent, avant tout, connaitre la vérité́ des faits historiques liés à la colonisation belge ». Cependant, revisiter la période coloniale peut se faire sans raviver les souffrances du passé.
Par conséquent, le Collectif des Burundais sur la Colonisation continuera, de façon autonome, à mettre à jour les vérités parfois douloureuses liées à la colonisation belge « tout en s’inspirant du discours du Prince Louis Rwagasore prononcé le 18 Septembre 1961, jour de la victoire électorale de son parti pour l’indépendance, l’UPRONA dont certains Belges étaient d’ailleurs membres. Le Prince Louis Rwagasore exprimait son vœu le plus ardent pour que nos deux peuples bâtissent ensemble une amitié́ qui transcende les douleurs du passé.
Au-delà̀ de la recherche de la vérité́ des faits qui ont blessé́ la nation burundaise au cours de la colonisation belge, le Collectif des Burundais sur la Colonisation souhaite, par conséquent, contribuer à inventer des nouvelles solidarités belgo-burundaises. D’autant plus que des Belges de souche burundaise constituent depuis plusieurs années une formidable Diaspora, un trait d’union précieux entre nos deux peuples.
Nous vous prions, d’agréer, M. le Président de la Commission spéciale de la Chambre sur le passé colonial belge, les sentiments de notre plus haute considération.
Coordonnateur du Collectif des Burundais sur la Colonisation