La hausse vertigineuse du prix du ciment Buceco 32.5R et 42.5R, décidée par l’entreprise Buceco le 19 août 2024, a des répercussions importantes sur l’économie burundaise et le quotidien des citoyens. Cette décision affecte particulièrement les projets de construction pour les particuliers, tandis que les coûts de la vie continuent d’augmenter.
La recente décision soudaine de Buceco d’augmenter les prix du ciment 32.5 de 38 000 à 45 OOO BIF et du ciment 42.5R de 55 000 à 66 000 BIF, a suscité une vive colère au sein de la population burundaise déjà fragilisée par la crise économique et les récentes inondations à Bujumbura.
« J’avais budgété 11 400 000 BIF pour l’achat de 300 sacs de ciment Buceco, nécessaires à la construction de ma maison à Kinama, et avais déjà remis cette somme au chef de chantier. Malheureusement, la récente hausse des prix m’oblige à prévoir un supplément de 2 100 000 BIF », a déploré un ingénieur rencontré à Kinama.
Face à cette augmentation inattendue, l’ingénieur s’est tourné vers son chef de chantier : « J’ai demandé au chef de chantier de me donner cet argent qui s’est ajouté sur le prix d’achat d’un sac, mais il a refusé en m’accusant d’escroquerie. Je lui ai même montré le communiqué de Buceco, mais en vain. J’ai décidé de lui renvoyer son budget afin d’éviter les conflits », déplore-t-il.
À Gatumba, alors que la population tente de se relever des récentes inondations, une nouvelle difficulté vient s’ajouter à leurs problèmes : la hausse vertigineuse du prix du ciment de Buceco. « Nous ne comprenons pas comment Buceco a pu augmenter les prix deux fois dans un même mois », s’indigne Marc, un habitant de Gatumba en plein travaux de reconstruction.
Malgré les prix officiels fixés par Buceco, le ciment se vend à prix d’or sur le marché burundais, au grand dam des consommateurs. « Le problème, c’est que si le ciment arrive dans un magasin, les vendeurs ne respectent même pas les prix fixés par Buceco. Il y en a qui le vendent même à 70 000 BIF. Comment allons-nous pouvoir protéger nos maisons pour la nouvelle saison des pluies ? », s’indigne Marc.
Ces propos trouvent un écho dans les faits. Un vendeur de matériaux de construction, situé à l’avenue Mubarazi, au quartier Asiatique, en commune Mukaza, confirme cette situation. La spéculation fait rage sur le marché du ciment Buceco : « Un sac de 50 kg de 32.5R, affiché à 45 000 FBu, se revend en réalité à 66 000 FBu, et le 42.5R atteint 70 000 FBu contre 55 000 FBu officiellement. » Interrogé sur les raisons de cette hausse illégale, le vendeur explique : « On peut passer un mois sans ciment de Buceco, on l’obtient à peine, ce qui nous amène à ne pas respecter le prix fixé par Buceco. Il y a même des vendeurs qui préfèrent cacher ce ciment dans leurs stocks pour le vendre à un prix très élevé. »
Face à cette situation, une intervention urgente des autorités est nécessaire : « Il vaut mieux que l’État s’implique dans la régulation des prix du ciment pour qu’un tarif fixe soit appliqué, et qu’il collabore avec la société Buceco pour rendre ce ciment disponible », plaide le vendeur du quartier Asiatique. Cette hausse des prix et la pénurie de ciment Buceco poussent certains acteurs du marché à des pratiques peu orthodoxes.
Une vendeuse de ciment en témoigne : « Hier, nous espérions recevoir notre commande de ciment Buceco, mais avons été déçus. Étant donné les nouveaux prix, et compte tenu de la rareté actuelle du produit, je compte bien revendre mon sac avec une marge de 20 000 FBu une fois que je l’aurai en main », confie-t-elle.
Selon Jean Nduwimana, porte-parole de l’OLUCOME, le ministère du Commerce, du Transport, de l’Industrie et du Tourisme est pointé du doigt : « Je commence à douter de leur utilité. Tout grimpe, c’est le désordre : le carburant, les prix de transport. Le ministère a carrément échoué à réguler les prix dans notre pays, que ce soit pour les produits de première nécessité ou pour le ciment. En un mot, c’est le désordre », a-t-il dénoncé.
Face à la hausse vertigineuse des nouveaux tarifs, l’entreprise Buceco demeure muette quant aux raisons justifiant cette décision. Nos tentatives de contacter l’entreprise pour obtenir des explications sur cette augmentation et sur la pénurie actuelle sont restées vaines.
Le Ministère du Commerce, du Transport et du Tourisme, sollicité pour clarifier la situation et son rôle dans la régulation des prix, n’a pas non plus daigné répondre à nos questions. Ce silence assourdissant des acteurs clés de cette filière laisse planer le doute sur la transparence des opérations et les motivations réelles de cette hausse.
Notons cependant que certaines initiatives ont été prises au niveau local. Jean Muyoboke, chef de zone de Gatumba, a rappelé que des détaillants avaient été sanctionnés pour avoir augmenté de manière abusive les prix officiels du ciment Buceco dans sa zone : « Ceux qui ont vendu le ciment de Buceco à un prix élevé ont été arrêtés. Je lance un appel aux détaillants pour qu’ils respectent les prix fixés par Buceco, sinon ils seront sanctionnés selon la loi », a-t-il averti.