Les consommateurs font les frais de cette hausse et la société civile évoque les conséquences d’une mauvaise gouvernance. Mais le gouvernement n’avait pas d’autre choix, selon un économiste.
<doc4867|right>La Brarudi augmente les prix de ses produits. Pour mieux décrypter les conséquences sur le marché, Iwacu a effectué une tournée dans différents points de vente de la capitale.
Il est aux environs de 18h30, les lieux de travail se vident. Mais les bistros peinent à attirer les clients. De passage dans un bistro de la capitale, le patron accepte de nous parler, sous condition de garder l’anonymat. Selon lui, « les consommateurs sont extrêmement sensibles à cette hausse ». Tenez, explique-t-il, je vendais l’Amstel à 1600Fbu, et suite à la hausse de 250Fbu par bouteille, je ne la vends qu’à 1800Fbu. Il considère que la perte est double : on vend à perte et les clients ne viennent plus.
L’enquête se poursuit. En commune kamenge, la nuit tombe, mais la circulation reste dense. Nous sommes dans le quartier Heha, chez Marc Ndayishimiye. Des poulets sont entassés sur un plat, les braseros sont allumés. Ndayishimiye nous révèle que les clients ont vite changé de comportement : « Celui qui prenait deux Amstels n’en prend plus qu’une seule. » La consommation de brochette en fait les frais, selon certains consommateurs. Un client, qui nous a rejoints sur les lieux, après avoir commandé une Amstel, nous assure que des mesures d’austérité doivent être prises au sein des ménages. « Dommage que les consommateurs ne peuvent pas s’unir pour se passer complètement de ces produits », déplore-t-il. Les commerçants interrogés convergent sur le fait que le gouvernement et la Brarudi devraient se consulter pour alléger les souffrances de la population.
La Brarudi s’explique
La Brarudi dont la production annuelle oscille autour de 170 millions bouteilles de Primus, ne tarde pas à s’expliquer. Par le biais de son porte-parole, cette société impute la responsabilité de la fixation de ces nouveaux tarifs au gouvernement. « Nous avons, comme tout le monde, appris ces nouvelles mesures, par les médias », a-t-elle soutenu, lors d’une émission radiodiffusée. Néanmoins, elle reconnaît que la Brarudi encaisse 4% des 250Fbu d’augmentation sur le prix d’une Amstel.
<doc4866|left>Des retombées en cascade d’une mauvaise gouvernance
Gabriel Rufyiri, président de l’Olucome n’y va pas par quatre chemins : «Le gouvernement veut compenser les promesses non tenues des donateurs, par la hausse des impôts et taxes. » Il signale que le trésor public ne verra pas la couleur des 26,5 millions d’euros, soit environ quarante milliards de Fbu que l’Union Européenne avait promis. Selon lui, les autorités doivent regarder la réalité en face. « Les dossiers de malversations économiques doivent être traités pour soulager la misère des citoyens », précise-t-il. Et d’ajouter que vivre à la hauteur de ses moyens est la leçon que l’autorité publique doit en tirer.
Le gouvernement n’a pas de choix
Selon Dr. Gilbert Niyongabo, expert en économie, malgré la hausse des prix de la bière, la production de la Brarudi a toujours connu une courbe ascendante. Depuis 1991, la Primus affiche, jusqu’en mai dernier, une hausse de 991,4% et l’Amstel 1190% à Bujumbura, d’après l’ISTEEBU. « Durant la saison sèche – la période des fêtes -, les consommateurs n’ont d’autre choix que d’adopter un profil bas » explique le docteur.
Par ailleurs, il indique que les boissons et le tabac sont des produits que le fisc doit fortement taxer, surtout dans les situations d’urgence, comme celle-ci. « Sans oublier que ces produits sont considérés comme nuisibles », poursuit-il.
Pour cet expert, le gouvernement devrait élargir l’assiette fiscale. Et il insiste également sur la lutte contre la spéculation financière : « Les privés qui construisent deux, trois voire quatre bâtiments et ceux qui possèdent plusieurs véhicules, doivent être taxés. » Sinon, d’après lui, quelques entreprises paieront toujours le coût de leur comptabilité bien tenue.