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Hassan Ruvakuki condamné à perpétuité

05/05/2013 Commentaires fermés sur Hassan Ruvakuki condamné à perpétuité

Consternation totale dans la famille des journalistes après cette décision du tribunal de Grande Instance de Cankuzo. L’avocat de Ruvakuki promet cependant de porter l’affaire devant d’autres juridictions plus compétentes.

<doc4307|left>Après plus de 200 jours d’emprisonnement, Hassan Ruvakuki, journaliste à la radio Bonesha FM, vient d’être condamné à la réclusion à perpétuité par le tribunal de Grande Instance de Cankuzo. Maître Onésime Kabayabaya, son avocat, parle d’un procès rocambolesque, caractérisé par plusieurs irrégularités. Il estime que son client n’a pas été arrêté, selon les règles de la procédure en matière pénale : « Il a été littéralement enlevé dans une rue de Bujumbura, alors qu’il venait d’un reportage. » En outre, selon, Me Kabayabaya, Ruvakuki n’a pas eu de mandat d’arrêt et le motif d’arrestation ne lui a pas été signifié dès son arrestation. Il précise qu’il a été gardé au camp Mutukura à Cankuzo, ce qui est contraire à la loi.

Quand les gens ont crié, poursuit Onésime Kabayabaya, il a été placé dans un cachot du tribunal de Grande Instance de Cankuzo. Là aussi, constate-t-il, le calvaire s’est prolongé. « Ruvakuki a été placé en détention préventive. Celle-ci a été confirmée dans des conditions irrégulières parce qu’à cette phase, on n’a pas permis à la défense de l’assister. » Quand l’affaire est venue devant le juge pour instruction, explique Me Kabayabaya, il était toujours dans un cachot, alors que la loi ne permet pas qu’on puisse comparaître devant le juge étant en détention préventive et installé dans un cachot. « On doit être dans une maison d’arrêt reconnue par la loi. Il a fallu crier pour qu’il soit placé à Ruyigi », affirme-t-il.

Me Onésime Kabayabaya indique que les juges n’ont pas accordé la parole à la défense : « Ils ont plus joué le rôle du ministère public que celui de juge à tel point que nous avons récusé des juges d’abord, et tout le tribunal ensuite. » Il se souvient avoir fait une requête écrite pour demander que l’affaire soit transférée dans un autre tribunal du ressort de la Cour d’Appel de Gitega. Malheureusement, déplore-t-il, elle a été balayée du revers de la main. Me Kabayabaya raconte qu’il a saisi la Cour d’Appel de Gitega pour statuer sur ce rejet. malheureusement, rappelle-t-il, celle-ci a aussi rejeté l’appel. « Elle a même refusé de notifier ces décisions de rejet aux intéressés pour que ce rejet ne soit pas porté devant la Cour Suprême », indique-t-il.
D’après Me Kabayabaya, tous ceux qui ont plaidé et ceux qui ont refusé ont été jugé en même temps.

Toutefois, l’avocat d’Hassan Ruvakuki ne désarme pas : « Sans être naïf, nous allons, encore une fois, saisir la Cour d’Appel de Gitega puisque, la loi le veut ainsi. » Cependant, il estime que la libération de Ruvakuki dépendra de l’exécutif. Là, il revient sur la réunion tenue par le premier vice-président à l’endroit du corps diplomatique pour brandir les preuves de la culpabilité d’Hassan Ruvakuki. «Quand l’exécutif se mêle d’une affaire, les juges ne peuvent pas le contrarier, alors qu’ils sont nommés, recrutés, promus et payés par l’exécutif. » Pour obtenir une décision équitable, Me Kabayabaya promet de saisir les juridictions d’Arusha pour être à l’abri de toutes ces pressions relevant du gouvernement.

<img4308|left>{ «La décision était prévisible» 

La condamnation d’Hassan Ruvakuki n’a pas surpris Pierre Claver Mbonimpa, président de l’APRODH : « Son procès était déjà caractérisé par de graves irrégularités. » Il espère qu’il sera libéré parce que des procès pareils ont été prononcés pour certaines personnes qui sont actuellement parmi les dirigeants de ce pays. « Mais cela dépendra de la volonté politique », insiste-t-il. Et de demander à son avocat de faire recours et à tous les journalistes de l’encourager.

{ « Il n’a commis aucune infraction » }

C’est la consternation, une injustice de plus, selon Jean Claude Bitsure, président du Centre Burundais pour la Liberté de la Presse (CBLP). Il estime que la justice burundaise n’a pas rendu un verdict équitable. Par ailleurs, rappelle-t-il, cette affaire est entachée de beaucoup d’irrégularités. « Lors de son arrestation, on ne lui a pas signifié de manière précise le chef d’accusation », fait-il remarquer.

Arrivé à Cankuzo, Ruvakuki a été accusé de collaborer avec des groupes rebelles : « C’est un tâtonnement. En faisant cela, on viole le pacte relatif aux droits civils et politiques en son article 9 alinéa 2 », assure-t-il. En outre, il considère que le journaliste Ruvakuki n’aurait pas dû être arrêté, car il ne faisait que son travail, au regard de l’article 3 de la loi sur la presse et de l’article 18 du code de déontologie. : « Il n’a commis aucune infraction en tendant le micro à des groupes armés. Ce n’est pas la première fois que les médias donnent le micro aux rebelles, cela a été fait dans le passé. »
Pour la suite, indique le président de CBLP, une réunion urgente doit être tenue avec d’autres journalistes pour se convenir sur les pressions à exercer afin d’en finir avec l’empiétement de la liberté de la presse.

{ « Il est victime de sa profession » }

« Nous sommes ulcérés par cette condamnation », déclare Vincent Nkeshimana, président de l’Association burundaise des radios diffuseurs (ABR). Le procès, d’après lui, a échappé à toutes les normes juridiques. De plus, le journaliste Ruvakuki a été arrêté sur le lieu de travail. « Il faut comprendre le rôle d’un journaliste : chercher, collecter, traiter et vérifier l’information. Selon lui, il est victime de sa profession. Tout simplement, estime le président de l’ABR, il voulait traiter une information qui gênait les pouvoirs publics. Vincent Nkeshimana indique que les journalistes vont rester solidaires : « D’abord, nous allons nous concerter avant toute décision. S’il s’avère nécessaire, nous demanderons des appuis pour que Ruvakuki reste une préoccupation de tout le monde. »

<img4310|right>{ « Cela ne fait que tenir l’image du pays » }

Même réaction pour Innocent Muhozi, président de l’Observatoire de la presse burundaise (OPB) : « Nous sommes scandalisés. C’est incompréhensible! Il est condamné pour un crime qui n’existe même pas dans la législation burundaise. » Pour lui, cette condamnation va coûter chère au pays. Car ce journaliste est condamné, alors qu’il n’a tenu aucun propos divisionniste. « Cela ne fait que tenir l’image du pays », déplore-t-il. Idem pour les exécutions extrajudiciaires, les emprisonnements abusifs et les exilés. Dans l’immédiat, il déclare que tous les professionnels des médias vont mener des actions légalement reconnues pour ramener à la raison les pouvoirs publics.

<img4309|right>{ « S’il s’avère nécessaire, nous allons recourir à d’autres juridictions » }

« Une entorse à la liberté de la presse », regrette Jérôme Niyonzima, vice-président de l’Union Burundaise des Journalistes (UBJ). Selon lui, cela prouve la partialité de la justice burundaise dans cette affaire et l’absence d’indépendance de la magistrature. D’après lui, il est évident qu’il existe une main invisible, une pression pour garder sous les verrous le journaliste Hassan Ruvakuki. Comme ses confrères, le vice-président de l’UBJ estime qu’aucune action ne sera menée avant la concertation avec d’autres concernés. « S’il s’avère nécessaire, nous allons recourir aux juridictions de la sous-région ou d’autres pays pour que la vérité éclate au grand jour », avertit Jérôme Niyonzima.

ABR

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