Malgré une ordonnance ministérielle du mois de juillet 2021 portant classification des établissements scolaires et harmonisation des frais scolaires, cette réforme n’a jamais vu le jour. Certains établissements contournent cette loi en complicité avec les comités des parents.
L’ordonnance ministérielle numéro 620/630/04 du 17 juillet classait les établissements scolaires en quatre catégories à savoir la catégorie A, B, C et D.
Ils étaient classés selon la qualité des infrastructures, la superficie de la parcelle dans laquelle est érigée l’établissement, le matériel didactique, les contrats des enseignants et les suscriptions aux assurances.
Pour la catégorie A, les conditions requises sont d’avoir des infrastructures modernes non louées ou sinon avoir un bail d’au moins 10 ans, être dans une parcelle de 50 ares ou plus, avoir des enseignants permanents, avoir des infrastructures sportives et un laboratoire et avoir déjà participé au concours et examen d’Etat.
Les établissements classés dans la catégorie B devaient avoir des équipements moins modernes, non loués ou avec un bail de 10 ans, avec des enseignants à contrat déterminé dépassant une durée d’une année.
Ceux de la catégorie C sont ceux qui ont des infrastructures non modernes mais répondant aux normes, des enseignants à contrat déterminé avec une durée d’une année et qui sont conformes au code du travail burundais.
Dans la catégorie D se trouvent des écoles qui possèdent des infrastructures qui ne répondent pas aux normes, des conditions d’études non satisfaisantes et une majorité d’enseignants vacataires.
La ministre de l’Education de l’époque, Janvière Ndirahisha, avait instauré des frais de scolarité à ne pas dépasser pour les quatre catégories d’écoles privées ainsi que pour les écoles publiques à régime d’internat et d’externat.
Pour les trois premiers cycles de l’enseignement fondamental, le maximum des frais scolaires a été fixé à 150 000 BIF pour la catégorie A, 90 000 BIF pour la catégorie B, 45 000 BIF pour la catégorie C et 30 000 BIF pour la catégorie D. Pour les trois cycles du post-fondamental, le maximum des frais scolaires est fixé à 180 000 BIF pour la catégorie A, 125 000 BIF pour la catégorie B, 60 000 BIF pour la catégorie C et 45 000 BIF pour la catégorie D.
Les frais de scolarité sont plus élevés pour les établissements techniques qui utilisent des moyens coûteux pour l’apprentissage. L’ordonnance du ministère de l’Education et de la Recherche scientifique suspendait également certaines contributions demandées aux parents comme les frais d’inscription et ceux de renforcement.
Quid de la mise en application?
Le ministère avait instauré ces prix pour limiter les augmentations fréquentes des frais de scolarité par les établissements qui enfonçaient davantage les ménages dans la pauvreté, a expliqué la ministre de l’Education devant les deux chambres du Parlement en 2018.
Les frais fixés par l’ordonnance ministérielle ont été appliqués dans un premier temps avant d’être revus à la hausse par la plupart des établissements par la suite, affirment plusieurs parents ayant des enfants dans des établissements privés en mairie de Bujumbura.
« C’était un soulagement lorsque le ministère a prix cette décision. Par après, les frais d’inscription sont revenus et ils ont commencé à augmenter les frais de scolarité au début de chaque année. Nous payons 100 mille pour les frais d’inscription et on ne nous donne même pas des reçus de paiement », s’indigne un parent de la zone Kinindo en commune urbaine de Muha.
Certains parents affirment, néanmoins, que c’est le prix à payer pour une bonne éducation de leurs enfants.
Certains établissements classés dans la catégorie B appliquent des frais scolaires variant entre 120 et 145 mille BIF pour les trois premiers cycles du fondamental et entre 150000 et 170000 pour les trois cycles du post-fondamental.
Des manquements lors de la classification
David Ninganza est membre des comités des parents de trois établissements en mairie de Bujumbura et représentant légal de la Solidarité de la Jeunesse chrétienne pour la Paix et l’Enfance (SOJEPAE), une association œuvrant pour les droits de l’enfance. Il affirme qu’il y a eu des manquements du gouvernement lors de la mise en place de cette réforme.
Pour lui, les parents auraient dû étre associés lors de la prise de cette décision du fait que l’école ne fonctionne bien que lorsque les parents, le gouvernement et l’établissement travaillent en synergie.
« Malgré les règles fixées par l’Etat, ce qui ressort des engagements entre les parents et les responsables des établissements doit être mis en application. La première erreur que le gouvernement a faite a été de ne pas avoir mis parmi les critères de classification, la qualité de la formation. Dans le public, les parents sont associés mais dans le privé non», assure David Ninganza.
Il déclare également que certains établissements ont été mis dans les deux premières catégories alors qu’ils ne remplissent pas les normes. Selon lui, les frais de scolarité devraient être un accord entre parents et établissements. Quant à l’Etat, il devrait intervenir comme régulateur.
Quand les parents sont complices du non-respect de la loi
Si David Ninganza regrette que certains responsables d’établissements, surtout dans les quartiers périphériques, aient augmenté les frais de scolarité sans le consentement des parents, il affirme que plusieurs parents se sont mis d’accord avec les établissements pour contourner cette loi du ministère.
« Nous nous impliquons dans la gestion des écoles. Nous savons les moyens financiers engagés pour le fonctionnement et nous sommes d’accord sur le prix à payer pour l’excellence. Nous avons alors décidé ensemble de payer plus pour le bon fonctionnement de l’établissement», témoigne un autre parent.
David Ninganza lance un appel aux parents de s’impliquer dans la gestion des établissements que fréquentent leurs enfants. Contacté le ministère de l’éducation affirme être au courant de ces contours de la loi. « Nous effectuons des descentes dans différents établissements et nous avons vu que certains augmentent et d’autres créent des moyens pour soutirer de l’argent aux parents, nous avons déjà pris des dispositions pour certains établissements allant jusqu’à la fermeture », explique Steve Niyongabo, directeur général des Finances et du Patrimoine au sein du ministère en charge de l’Education.
Eclairage d’un responsable d’établissement
Sous couvert d’anonymat, un responsable d’un des établissements situés en mairie de Bujumbura s’explique : « Avec la somme imposée par le gouvernement, il serait très difficile de rester dans les catégories dans lesquelles nous sommes classés. On ne serait pas en mesure de donner des contrats déterminés ou indéterminés à nos enseignants et de garantir un enseignement de qualité. Certains professeurs aussi, selon leurs compétences, mettent la barre un peu haute pour ce qui est des salaires. Pour avoir du personnel compétent, il faut engager des moyens. Les parents comprennent cela. Nous leur expliquons et par le comité, ils comprennent que cette somme ne pourrait pas couvrir la bonne marche des établissements. Il faut aussi noter que même le matériel devient de plus en plus cher sur les marchés. »
Quant aux frais d’inscription, ce responsable explique que cet argent couvre les frais liés à la rentrée ainsi qu’à payer les salaires des enseignants pendant les vacances.
Nous sommes dans un pays où on applique la loi quand cela nous arrange.
Vous allez dire que je vous embête avec mon refrain.
Mugabo umwera uva hejuru.
Pourquoi les dignitaires ne déclarent pas leurs biens au moment d’entrer en fonction?
C’est inscrit dans la constitution.
Un décret ministériel est il plus important?