Dès lundi 5 mars, les enseignants du secondaire sont en grève de quatre jours. Ils exigent la suppression des disparités salariales et la baisse de l’IPR. La ministre de la Fonction publique, propose une harmonisation des salaires effective en 2013. La situation est bloquée.
<doc3266|right>La ministre Annociata Sendazirasa cache à peine son exaspération : « S’ils ont opté pour la grève qu’ils y restent jusqu’en 2013. Ce n’est pas en quatre jours que nous allons harmoniser les salaires. Nous avons débattu depuis longtemps sur cette question, pour le moment, ce qu’ils demandent est impossible. » Cette mise au point a été faite par celle qui a la Fonction publique, le Travail et la Sécurité sociale dans ses attributions suite au mouvement de grève observée depuis ce lundi 5 mars par le Conseil National du Personnel de l’Enseignement Secondaire (CONAPES). Car d’après elle, la question d’harmonisation des salaires ne sera pas réglée avant l’année prochaine puisqu’il n’y a pas de budget, cette année.
Pour Emmanuel Mashandari, président du CONAPES, le recours à la grève est dû au manque de dialogue depuis le début de l’année. Le syndicat en coalition avec trois autres à savoir le SLEB, STEB et SYNAPEP, a d’abord envoyé un mémorandum, ensuite un communiqué de presse. Il demande la suppression des disparités salariales et dénonce l’Impôt Professionnel sur le Revenu (IPR) qui est trop élevé pour les enseignants, mais en vain.
Le CONAPES fait cavalier seul
Affirmation rejetée par la ministre de la Fonction Publique, du Travail et de la Sécurité : « On ne fait que dialoguer avec les syndicats. Au cours du mois de février, j’ai accueilli les syndicats des enseignants au moins trois ou quatre fois pour dialoguer les différentes questions. » Elle précise, par ailleurs, que le CONAPES fait cavalier seul, car les autres ont compris que la seule voie de sortie d’une crise, est le dialogue.
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{La ministre Sendazirasa vient de déclarer sur les ondes des radios que les enseignants avaient la nostalgie de grever. Pour le syndicat du CONAPES, cette déclaration est une provocation, mais ils ont opté pour la sagesse. « Nous n’allons pas y répondre. Elle veut que nous basculions dans une grève illégale. Le délai de quatre jours, nous allons le respecter » tout en précisant que prochainement, une rencontre à l’intention des représentants d’enseignants au niveau national est prévue pour parler des attitudes conséquentes face à la déclaration de la ministre de la Fonction publique, du Travail et de la Sécurité.}
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La ministre voit aussi en cette grève une façon de faire pression au ministère afin qu’il prenne des mesures qui avantagent les enseignants: « Ils sont plus de 83% des fonctionnaires. Leur nombre constitue une force. C’est pourquoi ils font beaucoup de bruit. C’est de bonne guerre.»
Les mal-aimés de la Fonction publique
Pour le président du CONAPES, le problème n’est pas leur nombre, mais simplement ils sont « les mal aimés » de la Fonction publique. Alors que les enseignants n’ont qu’une seule indemnité de logement (qui n’est pas imposable), d’autres fonctionnaires dont ceux des ministères de la Santé publique et de la Justice, en ont beaucoup, ce qui augmente leur rémunération. Et de préciser que les salaires de ceux qui travaillent à la bonne gouvernance sont exempts d’impôt.
Argument qui n’est pas fondé, selon la ministre qui avoue toutefois, que sauf ceux du ministère de la Santé publique, les autres fonctionnaires n’ont pas beaucoup de primes et indemnités. Pour lui, ils n’ont seulement que celles de logement et déplacement : « La seule solution à envisager, c’est d’abord le changement du statut, ensuite l’harmonisation. Ceux qui sont en train de crier aujourd’hui savent pertinemment qu’ils seront aussi touchés par cette réforme car ils sont parmi les mieux lotis. Mon souhait est que les salaires augmentent, car ils ne correspondent pas au coût de la vie. »
Et de poursuivre qu’elle ne comprend pas comment les enseignants se prennent pour des victimes alors qu’ils sont par contre, parmi les plus aimés. D’après elle, quand un enseignant commence le métier, il touche le salaire de celui qui vient de faire six ans. D’office, ils ont six ans d’ancienneté. Ce qui est encore regrettable, d’après la ministre, c’est qu’ils se comparent aux magistrats ou ceux de la bonne gouvernance : « Ceux qui ont les gros salaires ne constituent même pas 1% des travailleurs de la Fonction publique. C’est pourquoi nous faisons tout pour harmoniser les salaires. »
Une réforme de toute l’administration publique
Une harmonisation dont les syndicalistes désespèrent de voir un jour la mise en application: « La patience a des limites. C’est depuis 2007 qu’on n’en parle. Jusqu’en 2012, toujours rien. Pourtant, cela n’a pas empêché que certains secteurs jouissent des avantages en leur donnant des indemnités mais pas les enseignants. » Mme Sendazirasa réplique en affirmant qu’une réforme prend normalement beaucoup de temps, voire plusieurs années : « Deux ans après la sortie du rapport de programme national de réforme, c’est un record! Car la réforme concerne toute l’administration publique. » Pour elle, il n’y aura plus de différence entre ceux de la brigade anti- corruption ou ceux des services paraétatiques ou les cadres nommés par décret : « Pourquoi resteraient-ils bien nantis plus que les autres ? »
Ce qui importe pour Mme Sendazirasa est que la volonté du gouvernement existe bel et bien. Par ailleurs, il n’a pas voulu adopter le rapport seul : « Lorsque je l’ai envoyé au conseil des ministres, on m’a dit que le mieux c’est de l’adopter ensemble avec les partenaires au développement et des partenaires sociaux, à savoir les syndicats des travailleurs et des employeurs (Association des Employeurs du Burundi). »
Un IPR trop élevé, un fardeau pour les enseignants
Les syndicalistes s’indignent en outre du fait que l’IPR soit devenu un fardeau pour les enseignants où il est de loin supérieur à l’unique indemnité de logement. Et de citer l’exemple où parfois, l’impôt atteint 52 mille Fbu au moment où l’indemnité de logement est de 30 mille Fbu.
La ministre admet que l’IPR est élevé, que même lors du salon de l’emploi organisé du 2 au 4 mars 2012, ceux qui travaillent dans le secteur privé lui ont fait la remarque affirmant payer plus par rapport à celui de la Communauté Est Africaine qui ne dépasse pas 30% : « Il ne faut pas se voiler la face. Ce n’est pas seulement pour les enseignants, c’est un cas général. Néanmoins, c’est une question à prendre au sérieux. » De ce fait, elle indique avoir adressé une lettre au ministre des Finances afin d’associer des syndicats surtout celui des enseignants qui constituent la majorité des fonctionnaires puisque la révision du code des impôts et taxes est en cours : « Qu’est-ce que vous voulez qu’un ministre de la Fonction Publique fasse au- delà de cela? »
Concernant la question de la transposition, la ministre ne nie pas qu’il existe des enseignants qui n’ont pas été ou mal transposés. Pour elle, ce sont des dossiers que le ministère va gérer cas par cas sinon, « la question de la transposition est réglée.»