La crise à la compagnie vietnamienne de téléphonie mobile s’enlise. La direction de cette société semble rechigner à négocier avec ses employés, en grève depuis le 6 septembre 2018. Un dossier qui semble brûlant.
L’impasse totale. Après plusieurs réunions avec la direction de Viettel-Burundi et les employés, l’Inspection générale du Travail a fini par jeter l’éponge. Impuissante, elle refile le bébé au ministre de la Fonction Publique, du Travail et de l’Emploi. «Nous avons pris la décision de clôturer, par le présent procès-verbal, la procédure de conciliation initiée depuis le 22 août 2018…» Cela ressort d’un procès-verbal de la séance de conciliation du 17 septembre 2018.
Cette décision a été motivée par la non-présence de la direction de Viettel-Burundi à la 4ème séance de conciliation. Cette dernière, par une correspondance, demandait d’attendre la fin des enquêtes policières avant de reprendre la conciliation. «Après analyse de cette dernière, nous avons constaté que la partie employeur a pris le chemin de la justice», souligne l’Inspection générale de l’Etat.
Entre accusations et arrestations…
Dans ladite correspondance datant du 17 septembre 2018, la direction de Viettel-Burundi accuse les employés grévistes d’actes de vandalisme contre son réseau technique. Une autre accusation de la direction est que tous les centres d’affaires et magasins ont été gravement endommagés par leurs responsables qui ont gardé les clés, les produits et autres actifs de la société. Du coup, indique la direction, nous n’avons pas pu trouver le temps pour assister aux négociations avec les représentants du personnel. « La grève illégale de nos employés et les actions de vandalisme organisées par certains employés ont causé intentionnellement des dommages matériels à notre société et à la sécurité nationale ».
Les grévistes réfutent ces accusations. Dans une lettre du Syndicat des travailleurs de la société Viettel-Burundi (Sytravibu), envoyée le 24 septembre 2018 au ministre du Travail, les employés dénoncent des cas de menaces et d’intimidation. «L’employeur a pris l’option de faire des montages dans le but de faire arrêter les leaders et faire oublier les cas d’injustice que les employés ont endurés pendant 4 ans ».
Jeudi dernier, 3 employés de Viettel-Burundi ont été arrêtés par la police. «Nous avons voulu coopérer avec la police pour clarifier la situation, mais notre voix n’a pas été entendue. Par contre, la police a pris le choix d’arrêter quelques leaders qui s’étaient rendus au bureau du Commissaire général de la police judiciaire pour demander une audience», signale le syndicat. D’après des sources, le directeur général de Viettel et le chef du département juridique étaient sur place, ce jour-là. Ils seront relâchés, le lendemain.
…en attendant le conseil d’arbitrage
Dans la correspondance au ministre, les travailleurs se demandent pourquoi le conseil d’arbitrage n’est pas encore mis sur pied. «Le rapport de l’Inspection générale du Travail vous a été transmis depuis le 18 septembre 2018 et vu l’état d’urgence de cette affaire, le conseil d’arbitrage devrait avoir été déjà mis en place.» Ils s’appuient aussi sur l’article 200 du Code du Travail qui stipule : « Dans les quatre jours francs suivant le jour de la réception du dossier complet de l’affaire, le conseil d’arbitrage instruit le différend dont il est saisi et arrête une sentence arbitrale. Le conseil d’Arbitrage a les plus larges pouvoirs pour s’informer sur la situation économique des entreprises et celle des travailleurs intéressés par le conflit.»
Le ministre du travail et de l’Emploi, Félix Mpozeriniga, assure qu’il a reçu la lettre le 21 septembre 2018. «Nous avons envoyé des correspondances aux représentants des travailleurs et des employeurs afin qu’ils nous envoient des assesseurs qui vont composer ce conseil d’arbitrage. Lorsqu’ils le feront, il sera mis sur pied». Toutefois, le ministre est conscient que ce dossier constitue un problème sérieux d’autant plus que la conciliation a échoué. Du côté de la Confédération des Syndicats du Burundi (Cosybu), on indique qu’ils ont reçu la lettre du ministre. De même qu’à l’Association des employeurs du Burundi (AEB).
Signalons qu’entre autres 17 revendications des travailleurs, la question des contrats pose problème. Selon ces derniers, l’employeur licencie tous les anciens travailleurs qui ont une expérience de 3 ans ou 4 ans pour les réembaucher en tant que stagiaires. « En revenant, ces ‘’stagiaires’’ perçoivent 3000 Fbu par jour, alors qu’ils font le même travail qu’auparavant.»
Ils soulignent, par ailleurs, que l’employeur a suspendu les contrats à durée indéterminée. Ce qu’a fustigé l’Inspection générale du Travail dans sa lettre du 29 mai 2018 au directeur général de Viettel-Burundi. Une autre revendication est que la direction rechigne à déclarer certains cas d’accident de travail. «
Souvent, l’employeur chasse sans ménagement les accidentés ». Les travailleurs dénoncent aussi le mode ambigu de calcul de la prime d’ancienneté, de l’IPR et de l’INSS, etc.