Chargé de la prise en charge des victimes des VBG et de la répression, son travail est différemment apprécié. Plus de 12 mille survivants des VBG ont été accueillis.
Il est le centre pilote de prise en charge intégrée des survivants de violences basées sur le genre. Ouvert par le gouvernement du Burundi en partenariat avec les agences du système des Nations Unies, le centre Humura a suscité pendant longtemps la peur aux hommes qui, selon la plupart d’entre eux, est venu pour dresser les femmes contre leurs époux. Pour cette catégorie de personnes, fini l’autorité des hommes au foyer car les femmes qui se considéraient comme victimes ont trouvé un moyen sûr pour prendre leur revanche sur les hommes.
« Avant c’était la terreur. Ce centre restait toujours comme une épée de Damoclès sur nos têtes. C’était toujours des menaces, il suffit que tu parles mal à ta femme et cette dernière te menace de te traîner devant ce centre », affirme Daniel qui indique avoir été souvent malmené par son épouse de peur d’être condamné pour violences conjugales. Même son de cloche chez de nombreuses personnes de sexe masculin qui disent avoir été convoquées en catimini devant les services judicaires de ce centre, mais à la fin comme il n’y avait pas d’éléments à charge, ont été vite relâchées.
« Les femmes étaient capricieuses, elles croyaient qu’il suffisait de porter plainte pour être emprisonné », relate Siméon de Mungwa, commune Gitega. D’après lui, beaucoup de maris se sont résignés ou ont fui leurs ménages de peur d’être condamnés pour violence, séquestration, viol ou autre chose en rapport avec les violences basées sur le genre. Une idée réfutée par Ernest Ndakoraniwe de Giheta. « Ceux qui disent que les femmes abusaient de ce centre pour asseoir leur autorité sur nous ont tort. Avant J’étais parmi eux mais quand j’ai été convoqué j’ai compris que je n’étais pas un ange comme nous le prétendions », a-t-il expliqué tout en ajoutant qu’il avait été auteur de plusieurs violences sur sa femme. « Tout a changé chez moi, nous vivons dans l’harmonie et les voisins sont témoins ».
Le combat continue
Pour les responsables du Centre Humura, le travail est loin d’être terminé. Les violences sexuelles et celles basées sur le genre constituent un problème mondial et un problème de santé publique, c’est une atteinte aux droits fondamentaux de l’être humain. « Les violences sont de plusieurs formes. Beaucoup pensent que seules les femmes sont victimes, même les hommes sont visés. Toutes les femmes ne sont pas innocentes », a reconnu Dr. Alida Manariyo, coordinatrice du centre. Avec des chiffres à l’appui, depuis son ouverture le 28 juin 2012 jusqu’aujourd’hui, 10 761 femmes et 1 491 hommes ont été accueillis, entendus ou pris en charge. Parmi ces cas, la grande majorité provient de la province Gitega tandis que 832 sont originaires d’autres provinces. La raison serait que le centre est situé en province de Gitega. On compte 12 252 qui ont bénéficié gratuitement des services psychosociaux suite aux violences physiques, sexuelles et psychologiques. Le service médical quant à lui a traité 2 231 patients qui ont subi des violences sexuelles et/ou physiques.
« Dix ans après, les violences basées sur le genre restent une réalité et font encore beaucoup de victimes au Burundi. Les filles et les femmes sont les plus touchées selon les chiffres. Il ne faut pas baisser la garde, le combat continue .J’appelle les communautés à la sensibilisation et à la lutte contre ce fléau », déplore Tantine Ncutinamagara, assistante de la ministre de la Solidarité nationale, des affaires Sociales, des droits de la personne humaine et du genre lors de la célébration du 10ème anniversaire du centre Humura de Gitega.