Face à de vieilles constructions dont la majorité date de l’époque coloniale, les autorités provinciales ont déjà fait part de leur intention de moderniser la ville de Gitega. Bâtir oui, mais pas n’importe comment ! Les propriétaires des parcelles surtout les moins nantis redoutent une forme expropriation.
<doc2637|left>Ils n’ont pas choisi le centre ville par hasard. Beaucoup de maisons sont vieilles, elles ont été construites à l’époque coloniale. Elles ont depuis longtemps servi d’habitations et de magasins. Aujourd’hui, elles sont délabrées et menacent de s’écrouler. Exceptés les jours de fête de l’indépendance où les propriétaires repeignent les murs à la chaux, ces architectures sont restées là, sans aucune rénovation. Une partie de la population de la ville soupçonne les propriétaires, des commerçants omanais, indiens et pakistanais pour la plupart, de manquer de volonté d’investir à Gitega. Pourtant, même les maisons des nationaux ne diffèrent guère de celles-là.
Défaillance de l’administration
Certains citadins accusent les autorités qui se sont succédé à la tête de la province d’avoir manqué de fermeté à l’égard de ces propriétaires qui ne veulent pas construire de belles maisons. « Il est intolérable qu’on continue de les laisser à amasser de l’argent sans les obliger à développer le milieu où ils vivent. Depuis qu’ils sont sur place, ils n’ont jamais construit d’autres maisons ; peut-être qu’ils investissent ailleurs. S’ils ne veulent pas contribuer au développement de la ville, qu’ils vendent alors ces parcelles à ceux qui veulent y bâtir des maisons présentables », suggère Aloys Ncahoruri, habitant le quartier Swahili depuis 1960.
Comme ce quinquagénaire, les natifs de Gitega affirment que la ville a gardé l’image qu’elle avait depuis les années 70. « La plupart de ces Asiatiques préfèrent aller construire dans leurs pays d’origine au lieu de développer la ville de Gitega. Nous comprenons mal comment un commerçant qui s’est enrichi grâce à nous ne fait rien en retour pour développer le milieu dans lequel il vit », souligne Ali M. qui prétend avoir eu connaissance de ces commerçants parmi ces étrangers qui possèderaient des industries en Inde. Il préconise donc des sanctions sévères pour ceux qui ne veulent pas construire alors qu’ils ont des moyens.
Les souhaits de la population commencent à être exaucés. Les services habiletés auraient dernièrement empêché la réhabilitation de l’une de ces maisons que les citadins ne veulent plus voir dans la ville.
« Nous serons obligés de brader nos parcelles »
Cette politique qui pointe à l’horizon pour rénover la ville avec de nouvelles constructions ne manque pas de faire peur à certains, surtout les moins nantis. Ils craignent de vendre à perte et d’être obligés un jour de quitter les lieux sous prétexte qu’ils ne peuvent pas construire selon les normes. Aussi demandent-ils au gouvernement de ne pas les forcer dans l’immédiat à quitter les lieux. « Nous sommes inquiets pour notre avenir. Si cette politique est vraiment appliquée, beaucoup seront obligés de brader leurs parcelles », explique Salima, petite-fille d’un ancien commerçant asiatique. « Personne ne souhaite vivre dans une vieille maison. Si nous avions des moyens nous n’aurions pas attendu d’être obligés de construire », ajoute-t-elle.
D’après des sources proches des services de l’urbanisme à Gitega, il n’y a pas à s’inquiéter : le programme concernera d’abord ceux qui sont tout près du parking Gitega –Bujumbura ; car cette partie est occupée par des gens qui ont de moyens. Quant aux autorités provinciales accusées, à tort ou à raison, de passivité, elles indiquent que le programme doit être appliqué. Pour elles, c’est la politique du gouvernement qui consiste à améliorer l’habitat. « Certes, ils sont déjà informés de ce programme, mais cette décision n’est pas encore officielle. Des consignes ont été données à tous les propriétaires des parcelles dans la ville de Gitega.
Plus question de construire n’importe comment au centre ville. La priorité est de construire en hauteur », a annoncé Sylvestre Sindayihebura, gouverneur de Gitega. D’après cette autorité provinciale, l’administration a d’abord pris le temps nécessaire pour sensibiliser tous les propriétaires pour qu’ils se préparent à cette éventualité. En clair, il y aura un temps limite pour les attendre. Le gouverneur a aussi fait savoir que la majorité des propriétaires demanderaient des exonérations sur les matériaux de construction.