Pour mettre fin aux abus et à la discrimination dont elles sont victimes, elles demandent la décriminalisation de la prostitution. Selon une activiste, cela n’est pas nécessaire. Il faut, cependant, que la communauté les reconnaisse.
<doc4413|right>Elles sont plus de 200 à reconnaître pratiquer le plus vieux métier du monde au chef-lieu de la province de Gitega. G. K. a 21 ans. C’est une travailleuse de sexe depuis plus de cinq. Elle habite dans le quartier Yoba au chef-lieu de la province de Gitega. L’éternel argument : c’est la misère et la pauvreté qui l’ont contrainte à se prostituer pour subvenir aux besoins de son fils dont le père n’a pas voulu reconnaître sa paternité, et partant ses responsabilités.
Elle est parmi celles qui demandent que la prostitution soit légale : « Nous subissons tous les jours des violences dues à notre statut. Les policiers ne nous donnent pas de répit, ils nous pourchassent comme des criminelles. » Elle se rappelle qu’il y a seulement une semaine que des policiers l’ont arrêtée, alors qu’elle rentrait. Ils lui ont demandé les papiers et elle leur a montré. Comme elle n’avait commis aucun délit, ils lui ont dit de s’asseoir dans la boue pour l’humilier : « C’est souvent comme ca, ils abusent de leur pouvoir. J’ai eu la chance car ils ne m’ont pas pris mon argent comme ils le font souvent », indique-t-elle.
D’après elle, la reconnaissance de leur statut leur procurera des conditions de travail plus sécurisées et plus saines. En plus, la discrimination dont elles sont victimes peut diminuer. La jeune maman indique qu’elles sont au courant que certains pays européens dépénalisent la prostitution, pourquoi pas le Burundi ?
Elles ont besoin d’un cadre de protection …
Jeanne d’Arc Kabanga, coordinatrice nationale de la SWAA Burundi, estime qu’il n’est pas question de légalisation de la prostitution car « ce serait aller à l’encontre de notre culture et de notre morale. » Par ailleurs, ajoute-t-elle, le Burundi veut éradiquer la prostitution. En effet, le code pénal burundais prévoit des sanctions pour le racolage et la pratique de la prostitution.
Cependant, pour la coordinatrice nationale de la SWAA, il faut que les prostituées soient respectées en tant qu’être humains : « Elles sont sujettes à la discrimination sociale. Pourtant, la plupart le font par contrainte non par choix. Il faut que la communauté les reconnaisse. » Elles ont besoin d’un cadre de protection et d’expression, le changement de comportement suivra.
Les pouvoirs publics font la sourde oreille
Comme les travailleuses de sexe cherchent les clients potentiels pendant la nuit, elles sont souvent agressées. Elle regrette que les victimes de violences physiques et morales, lorsqu’elles portent plainte, ne sont pas écoutées, comme si elles l’ont cherché. « Il existe des droits par rapport à la sexualité », précise Mme Jeanne d’Arc. En essayant de trouver les réponses à ce phénomène, l’association, dont elle est la coordinatrice, les a soutenus pour les rassembler au sein des associations afin de mieux parler de leurs problèmes au quotidien. Notamment sur les comportements à tenir et l’assistance mutuelle.
Elle regrette l’attitude des pouvoirs publics face à cette question : « Ils font la sourde oreille au lieu de chercher une solution. La question de la prostitution est un sujet tabou. » Et d’ajouter que l’on évoque la prostitution que lorsqu’elle est associée à la transmission du VIH/Sida. Or, elle considère qu’il s’agit d’une communauté qui existe bel et bien. D’après elle, un débat de société est nécessaire sur cette question qui n’est pas d’abord un problème de santé publique, mais une question d’égalité entre les femmes et les hommes et de dignité. « C’est un phénomène social qu’il ne faut pas prendre à la légère, puisque le nombre de jeunes filles qui se prostituent ne cesse d’augmenter », interpelle-t-elle.