La jeune élève de la 9ème année au Lycée de la Persévérance de Mweya, en province Gitega, se remet lentement de son agression. Son professeur et présumé agresseur est recherché. Sa famille demande une assistance, les factures s’accumulant.
Son présumé agresseur court toujours. Nestor Habarugira est en cavale depuis la nuit de samedi 10 mars 2018 où il a tenté d’assassiner Yvette Nshimirimana, son élève qu’il a mise enceinte. Cette dernière est clouée sur son lit d’hôpital. Pansements à la tête, visage tuméfié, les yeux bouffis, le bras droit bandé, cette fille d’une vingtaine d’années ne sait plus à quel saint se vouer. Sa famille aussi.
Son grand-frère, très affecté, avoue que sa famille n’est pas capable de payer tous les soins nécessaires. «Nous lançons un appel à toute âme charitable de nous venir en aide pour sauver notre sœur.»
Originaire de la colline Bihanga, zone Mungwa, commune et province Gitega, elle a subi une opération dimanche dernier à l’Hôpital de Gitega. La famille est désespérée : «Il nous faut une assistance car il nous sera difficile de payer la facture de l’hôpital.» De plus, confie le grand-frère, le fait que le présumé agresseur est toujours en fuite n’arrange pas les choses. Et de souligner que sa sœur se remet lentement. «Toutefois, elle portera des séquelles toute sa vie.»
Aucune trace de l’agresseur
Le gouverneur de la province Gitega, Venant Manirambona, se dit horrifié par la cruauté de cet acte : « C’est vraiment regrettable qu’une enfant supposée être à l’école pour préparer son avenir soit agressée à ce degré.»
En collaboration avec les forces de l’ordre, assure-t-il, nous sommes à l’œuvre pour que l’auteur de ce crime soit arrêté.
Pierre Nkurikiye, porte-parole du ministère de la Sécurité Publique, indique que le présumé agresseur d’Yvette Nshimirimana n’est pas encore appréhendé et que les recherches continuent.
La population réclame justice
Les membres de la famille de la jeune fille n’en reviennent pas. «C’est un monstre ! Yvette est comme sa fille», confie sa tante, les larmes dans les yeux. «Quelles valeurs ce professeur peut inculquer à nos enfants?», s’interroge la sœur d’Yvette. Pour elles, le présumé agresseur ne mérite pas d’être appelé enseignant. «Il mérite la perpétuité pour ce qu’il a fait».
Certains n’hésitent pas à demander la peine capitale. C’est le cas des habitants vivant tout près du lieu du crime, sur la frontière entre les communes Makebuko et Gishubi. «Nous savons que la peine de mort a été abolie, mais cet homme la mérite», juge Pierre Claver. «C’est horrible ! Nous demandons que le coupable nous soit livré. Nous saurons quoi en faire», renchérit Diane. Ces habitants demandent que des mesures drastiques soient prises contre les enseignants qui mettent enceintes leurs élèves. « La justice s’acharne parfois sur ceux qui ont commis de petits larcins et laisse en liberté ce genre de personnes ». Ils déplorent, par ailleurs, qu’aucun policier ne soit encore venu pour voir la scène du crime et faire des enquêtes. «On dirait que rien ne s’est passé ici.»
Pour Me Dieudonné Bashirahishize, une telle cruauté est le fruit de cette impunité ambiante qui caractérise le Burundi, depuis un bon moment. «S’il est établi que cet enseignant a essayé d’attenter à la vie de son élève après le viol commis sur cette même victime, il va y avoir un concours réel d’infractions conformément à l’article 112 du code pénal.» Le juge pourrait, poursuit-il, appliquer l’article 558 du code pénal qui prévoit la perpétuité lorsque le viol a été suivi par des actes de torture et de barbarie. «Au regard de ces faits si choquants, le présumé coupable ne pourra pas bénéficier de circonstances atténuantes et risque la peine de perpétuité.» Toutefois, pour Me Bashirahishize, des enquêtes approfondies doivent être menées.
Retour sur un crime vraisemblablement planifié
«Nous avons perdu sa trace, depuis mardi dernier», assure sa sœur. D’après Yvette Nshimirimana, elle s’était rendue au domicile de Nestor Habarugira, sis au quartier Nyabututsi dans la vile de Gitega, car ce dernier rechignait à prendre soin d’elle. Il parlait même d’avortement, selon la victime. La jeune fille raconte toute l’histoire à la femme de son professeur. Des problèmes naissent dans le ménage. Nestor Habarugira ne sait plus où donner de la tête.
Samedi 10 mars, ils ont pris ensemble une voiture pour aller en commune Bukirasazi, selon Nestor Habarugira, où vit la mère de ce dernier. «Il m’a dit que j’allais y passer quelques jours, le temps de trouver une solution». Ils s’arrêtent à Mwanzari, à une trentaine de kilomètres de la ville de Gitega, aux environs de 18h. Ils bifurquent pour prendre une route en terre battue. «Il avait préparé le coup car cette route ne mène pas vers la commune Bukirasazi, mais vers Gishubi », indiquent les habitants de cette localité.
Ils ont marché pendant 2h avant d’arriver au pont de la rivière Ruvyironza. «Il m’a demandé si je portais un short sous ma jupe et j’ai répondu par l’affirmative. Il me l’a enlevé ainsi que ma culotte.» Par après, il l’a grippée au cou et a commencé à la tabasser avec un objet tranchant puis l’a projetée dans la rivière. «Il a pensé que la fille était tombée dans la rivière car des gens l’ont vu courir, mais ils ne savaient pas pourquoi», confient les habitants de la colline Nyamirama en commune Gishubi.
Elle est tombée sur la berge. Depuis le pont jusqu’en bas, le sang est toujours visible. Yvette a réussi à se traîner vers les maisons environnantes. Evacuée dans un premier temps à Ntita, elle a été transférée à l’Hôpital de Gitega où elle a subi une intervention chirurgicale.