Depuis 2019, les agriculteurs d’avocats de Giheta n’arrivent plus à écouler leurs produits. L’usine de l’Associazione Amici Dell Africa, ‘’Dutezanye imbere’’, qui achetait la plus grande partie de leur récolte pour en extraire de l’huile, est à l’arrêt. Elle a dans ses cuves des méventes de plus de 20 tonnes d’huile d’avocat.
Implantée à Murayi commune Giheta depuis 2007, l’usine de transformation semi-industrielle Associazione Amici Dell Africa « Dutezanye imbere » fait partie des pionniers dans la promotion de l’huile d’avocat fabriquée au Burundi, avec de la matière première locale. Aujourd’hui, les machines sont à l’arrêt, 50 travailleurs sont au chômage. En attendant le déboucher, des dizaines de tonnes d’huile attendent dans les cuves hermétiquement bien fermées.
« C’est un niveau qui devient critique puisque si on ne vend pas l’huile, l’argent ne rentre pas. On doit arrêter d’acheter les avocats de nos clients, mettre au chômage technique les travailleurs d’ici deux mois voire même toute une année », a expliqué Renato, le propriétaire d’usine.
Selon lui, la cause de cette fermeture est due en grande partie à des tonnes d’huiles invendues et cela date des mois. Comme il l’indique, les Burundais habitués à consommer d’huile de palme ou de coton ne savent pas les bienfaits de l’huile d’avocat. D’après cet initiateur, c’est de l’ignorance, l’huile d’avocat est différente des autres huiles. L’avocat est le fruit qui contient la plus grande teneur en matières grasses de tous les fruits et légumes connus. L’huile extraite contient donc une bonne base d’acides gras insaturés et de vitamine E. L’huile d’avocat est également connue pour préserver le système cardiovasculaire et avoir un effet régulateur sur l’insuline. On recommande de l’intégrer dans le régime alimentaire des personnes souffrant de diabète de type 2.
« Utilisée crue, elle est aussi délicieuse dans les salades et dans le riz ou les légumineuses », ajoute-t-il. A part la concurrence avec les huiles importées, le producteur pointe du doigt une faible visibilité, les taxes ainsi que le coût d’exportation. « En attendant le développement du marché local, nous aurions pu les exporter mais les taxes et les frais de transport freinent toute amélioration possible de la situation. L’huile produite au Burundi est de loin la meilleure que celle venue d’Europe ou ailleurs. Mais c’est très cher de l’acheminer jusqu’ au Dar- es-Salaam ou au Kenya.»
Elle assiste impuissamment
Aux alentours de Murayi ainsi qu’a Giheta, la population est déboussolée. Leurs avocats ne trouvent plus de preneur comme à l’accoutumée. La seule solution qu’ils ont, c’est de les laisser mûrir sur l’avocatier ou les brader chez les commerçants qui les vendent à Bujumbura. L’idée d’une fermeture de cette usine est un scénario catastrophique aussi bien au niveau du climat social qu’économique. L’ensemble des actions doit s’étendre à une régulation des conditionnalités en matière d’importation des autres huiles et aussi à veiller à ce que l’huile importée soit de grande qualité.
« Avec l’usine, tout le monde a planté deux ou trois avocatiers chez lui. C’était un bon business mais aujourd’hui les avocats sont trop nombreux jusqu’à ce que même les porcs ne les mangent plus », déplore Jacqueline rencontrée à Murayi venue s’enquérir des nouvelles de l’usine. Que ce soit à Murayi ou au chef-lieu de la commune Giheta, la situation est la même, personne ne veut plus acheter un avocat.
« Comme il y a trop de sacs d’avocat à amener vers Bujumbura tout le long de la route de Giheta jusqu’à Kibimba, les chauffeurs ont majoré le prix de transport. Un sac était à 10. 000Fbu, maintenant même à 15.000Fbu il arrive que les chauffeurs n’acceptent pas. Sans oublier aussi que les prix de vente ont chuté», souligne Egide.
Aujourd’hui, ce qui est sûr dans la ville de Gitega où ces fruits étaient très cher, c’est qu’ils sont vendus comme des arachides. Au grand bonheur des citadins qui ne manquent plus un avocat pour garnir leurs tables à manger.