Gitega : des moutons surprotégés

Ils sont une vingtaine et arpentent tous les jours les rues de la ville de Gitega, sans berger et ce depuis des années. Ces moutons causent beaucoup d’accidents parfois quasi mortels. Tout cela sous les yeux des autorités administratives et policières qui brillent par leur inaction.

Devant la poste, devant le parquet de la République, autour de l’ancien marché de Gitega, au milieu des voitures dans différents parkings, … ces moutons sont partout. Tous les jours, les habitants de la ville de Gitega les voient marcher gaillardement au milieu de l’asphalte sans se soucier le moins du monde des voitures ou des motos. C’est une scène ubuesque à laquelle assiste la population de Gitega chaque jour et depuis des années. « Pourquoi les autorités ne font rien. Ces moutons sont un danger public.», martèle un motard. «Ils sont intouchables.», renchérit un autre.

Ça alors et pourquoi donc? «Ils appartiennent à un agent de la documentation.», répondent en chœur les motards d’un des parkings de Gitega. Ce dernier s’appelle Gérard Ndayisenga. Il est agent du Service national de renseignement (SNR) à Bujumbura, selon ses collègues de Gitega. «On le dit intouchable parce qu’il est de la documentation.», confie un habitant de Gitega. Sinon, poursuit-il, ses moutons ne se promèneraient dans la rue sans être inquiétés.

Des accidents quasi mortels causés par ces moutons

«Ces moutons causent tout le temps des accidents parfois graves. Et gare à toi si tu les heurte.», s’indignent les habitants de Gitega. Jeudi dernier, une religieuse des Sœurs missionnaires de Marie mère de la réconciliation a été grièvement blessée quand une moto qui la transportait a heurté un de ces moutons. Les témoins assurent que la moto roulait lentement tandis que les moutons traversaient la rue. La responsable de cette congrégation, Sœur Godelive Miburo, ne décolère pas. Avec des larmes aux yeux, elle souligne que cette sœur divaguait tout le temps car sa tête avait heurté l’asphalte lors de l’accident puis elle est tombée dans le coma. «Il est temps que les autorités nous expliquent ce qui se passe avec ces moutons.»

D’après des informations recueillies à Gitega, celui qui a la malchance de heurter ces moutons le paie cher. «Un ami a payé un million parce qu’il l’avait écrasé alors qu’il se trouve sous sa voiture.», raconte une source. «En cas d’accident avec ces moutons, le responsable disparaît pendant quelque jours s’il n’a pas de quoi payer», assurent les motards.

Contacté pour la première fois, Gérard Ndayisenga nous informe qu’il est à Bujumbura. Deux jours après, il nous raccroche au nez après notre présentation. Au troisième appel, il prétend que ce n’est pas lui. Nous demandons alors son numéro à ses collègues de Gitega. Le numéro correspond à celui que nous avons composé.

Interrogé, l’administrateur de la commune Gitega, Valentin Nahimana, répond qu’il ne peut pas s’exprimer sur un seul individu mais qu’il va répondre dans l’ensemble. Il reconnaît toutefois que des animaux errent dans les rues de Gitega. Il rappelle qu’il existe une loi qui punit cela (errance d’animaux domestiques sur la voie publique). «Avec la police, nous allons prendre des mesures afin que ces moutons ne causent plus d’accidents.»